Plus d’un mois après l’annonce de l’alliance entre la formation du président sortant et celle de son prédécesseur, en prélude à la présidentielle, un nouveau pas a été franchi ce week-end. En se rendant en province, le président gambien a fait un tour inopiné et express à Kanilaï pour rendre visite à la famille de son prédécesseur. Une première depuis son accession au pouvoir. Si l’exécutif avance un acte de réconciliation, les victimes, elles, ne l’entendent pas de cette oreille. Cette visite est perçue comme un énième « pied de nez » pour l’association des victimes qui entend manifester samedi prochain pour exprimer son ras-le-bol.
Alors qu’elles attendaient impatiemment le rapport de la Commission de réconciliation pour qu’en fin justice leur soit rendue, grande a été la désillusion des victimes du régime du président Yaya Jammeh en apprenant l’énième report de la remise du précieux document. La visite qu’a effectuée le président Barrow chez les Jammeh à Kanilai sonne comme un pied-nez après le désenchantement.
« Avant de parler de réconciliation, il faut d’abord rendre justice, préconise Keba Diom, le coordonnateur national de ladite association qui estime que le chef de l’État est en train de brûler les étapes. Il faut s’adresser aux victimes pour les consoler avant de voir les bourreaux. En tant que victimes, nous sommes les plus concernées pour parler de réconciliation. »
Sherif Kijera à la tête des victimes est du même avis. Il se sent « insulté », vitupère-t-il. « Adama Barrow n’a pas à se réconcilier avec Yahya Jammeh en personne. Il n y a aucun contentieux entre eux, à ce que je sache. Ce dont il s’agit, c’est la réconciliation entre nous et nos bourreaux. Le premier pas à faire c’est que les victimes confessent leurs torts avant de demander pardon. Diantre ! Pourquoi tant de mépris à notre égard ? »
Pour Awa Manneh, une des victimes, les yeux larmoyants, la désillusion est grande. Elle s’était investie personnellement pour l’élection du président sortant. Aujourd’hui, elle se sent doublement trahie.
« Barrow ose s’afficher publiquement avec nos pires ennemis au lieu de rendre justice, s’enrage la quinquagénaire. Alors qu’il sache qu’il n’aura plus nos voix et nous battrons activement campagne contre lui.
Les victimes comptent faire une démonstration de force dans la rue, samedi prochain pour crier leur ras-le-bol accumulé ces derniers mois.