Les élections municipales et départementales du 23 janvier prochain s’annoncent épiques entre les trois rivaux politiques d’hier. En effet, ce scrutin consacrera une prolongation de la confrontation électorale qui avait opposé la coalition Bennoo Bokk Yaakaar aux deux grands blocs de l’opposition formés d’un côté autour de Khalifa Ababacar Sall et du Parti démocratique sénégalais de l’autre. L’inconnu représenté par la coalition «Gueum sa bopp» de Bougane Guèye et Cie en embuscade, les jeux semblent ouverts dans ces élections locales censées profiler la grande reconfiguration du champ politique au Sénégal avant la présidentielle de 2024.
Le Parti démocratique sénégalais et ses alliés ont procédé, le vendredi 8 octobre, en perspective des élections municipales et départementales du 23 janvier 2022 prochain, au lancement officiel de leur « Grande » coalition « Wallu Senegal ». Organisée sur l’esplanade de la Place du souvenir africain, cette cérémonie intervenait un mois environ après le lancement de l’autre « Grande » coalition de l’opposition « Yewwi Askan wi », initiée par le Pastef d’Ousmane Sonko, le Pur du marabout Serigne Moustapha Sy et le Taxaw Sénégal de l’ex-maire de Dakar, Khalifa Ababacar Sall. Attendu depuis l’échec de la tentative de création d’une «grande coalition de l’opposition» annoncée par Serigne Moustapha Sy en début du mois d’août dernier, la « Grande Coalition Wallu Senegal » composée du Pds d’Abdoulaye Wade, de Bokk Gis Gis de l’ancien maire de Dakar Pape Diop, de l’AJ/PADS de Mamadou Diop Decroix, de la coalition Jotna et du Congrès de renaissance démocratique d’Abdoul Mbaye et cie, mais sans la République des valeurs de l’ancien ministre Thierno Alassane Sall et du mouvement «Ensemble » du juge démissionnaire Ibrahima Hamidou Dème va compléter le peloton à trois des grandes coalitions qui vont s’affronter lors de ces prochaines élections locales.
LES LOCALES 2022, UN AIR DE DEJA-VU
Les jeux d’alliance en cours en perspective de ces prochaines élections municipales et départementales dégagent un air de déjà-vu. La formation des deux grandes coalitions de l’opposition avec toujours d’un côté le Parti démocratique sénégalais de Me Abdoulaye Wade et de l’autre, l’ancien maire socialiste de Dakar, Khalifa Ababacar Sall, qui feront face au bloc de la majorité rappelle à bien des égards les élections législatives du 30 juillet 2017. En effet, à l’époque, après son divorce avec l’Initiative 2017 de Khalifa Sall, le Pds avait claqué la porte de ce qui devait être la grande coalition de l’opposition pour lancer sa propre coalition avec Bokk Gis Gis, AJ/PADS et le mouvement Tekki du député Mamadou Lamine Diallo. De l’autre côté, nous avions le bloc constitué par le Taxaw Sénégal, Rewmi d’Idrissa Seck, le Grand parti de Malick Gakou, Fsd/Bj de l’honorable député Cheikh Bamba Dièye… Aujourd’hui, près de cinq ans après, l’histoire semble bégayer puisque comme en 2017, la coalition majoritaire Bby va encore faire face à deux grands blocs de l’opposition en plus d’autres candidats lors de ces élections aux allures d’une présidentielle anticipée. Le défi de ces deux blocs semble donc de tenter le tout pout le tout pour remporter la majorité des collectivités territoriales lors de ces élections locales qui se déroulent à moins de deux ans de la présidentielle de 2024.
QUI DE BBY, « WALLU SENEGAL » ET « YEWWI ASKAN WI » DICTERA SA LOI ?
Au pouvoir depuis 2012, la coalition majoritaire Bennoo Bokk Yaakaar a pratiquement gagné toutes les grandes élections depuis cette date à l’échelle nationale. En plus de cette prouesse, son président Macky Sall, par ailleurs chef de l’Etat, a réussi également à inverser la tendance dans toutes les zones bastion de l’opposition grâce à une politique de débauchage qu’il a initiée dans le cadre de sa stratégie de « réduction de l’opposition à sa plus simple expression ». Aujourd’hui, la majorité des collectivités sont contrôlées par les responsables du régime. Une situation qui donne à Bennoo une petite longueur d’avance sur ses deux principales concurrentes le 23 janvier prochain. Aujourd’hui, l’unique menace sur la route des camarades du président reste sans nul doute les frustrés des investitures. En effet, à force de débaucher dans les rangs de l’opposition, le président a fini par créer les conditions d’une concentration de responsables qui nourrissent les mêmes ambitions politiques dans leur localité.
De son coté, on se demande si le Parti démocratique sénégalais, qui avait créé la surprise en 2017 en passant devant la coalition Manko Taxaw Sénégal grâce à l’implication personnelle de l’ancien président, Me Abdoulaye Wade, qui n’a pas hésité à sillonner tout le Sénégal pour battre campagne en sa faveur sera-t-il en mesure de rééditer ce même coup au soir du 23 janvier prochain ?
En attendant de voir un peu plus clair la position qu’adoptera vis-à-vis de ces élections, le Secrétaire général national du PDS, Me Abdoulaye Wade, il faut dire que rien ne semble être joué d’avance pour la formation libérale. Selon le quotidien «SourceA » dans sa parution du mercredi 6 octobre 2021 dernier, « plus de la moitié des 117 maires ayant gagné sous sa bannière ont transhumé à l’Apr depuis 2014 ». A cela s’ajoute le fait que la plupart des formations qui composent sa coalition à l’exception de Bokk Gis Gis, AJ/PADS et le mouvement Tekki, n’ont pas une réelle expérience des élections locales.
Par ailleurs, pour ce qui est de la coalition «Yewwi Askan wi », il faut dire également qu’il est difficile de pronostiquer sur son poids électoral. En effet, dans certaines localités comme Dakar où Khalifa Ababacar Sall a été dépouillé non seulement de son mandat de maire dans l’affaire de la caisse d’avance de la ville de Dakar mais aussi perdu la plupart des 16 communes qu’il avait remportées sur les 19 que compte la capitale lors des locales de 2014, rien n’est joué d’avance. Cependant, dans les zones comme le Sud du pays, la popularité et le score obtenu par le leader de Pastef lors de la dernière présidentielle pourraient faire une différence en la faveur de « Yewwi Askan wi ».
Dans ces confrontations locales ouvertes, la coalition «Gueum sa bopp» de Bougane Guèye et cie semble en embuscade et prête à jouer à l’arbitre pour peser sur la majorité représentative des uns et des autres dans les collectivités territoriales, étant que pour cette élection la grande nouveau reste l’élection des maires et présidents de Conseils départementaux au suffrage universel direct.