A Dakar, Thiès, Fatick, Saint-Louis et beaucoup d’autres localités du pays, les membres de la majorité présidentielle se livrent une rude bataille pour se faire investir candidat aux Locales du 23 janvier 2022. Une division qui risque de faire les affaires de l’opposition si elle était tant soit peu unie.
A l’approche des Locales, le feu couve dans la coalition Benno bokk yaakaar. Les divergences entre responsables de la majorité s’intensifient et les soutiens entre camarades de parti ou de coalition ne sont plus à l’ordre du jour. La dernière sortie de Biram Faye tirant sur la gestion du maire de Fatick, Matar Ba, en dit long sur le choc des ambitions dans la mouvance présidentielle, en particulier au sein de l’Apr. «Je suis convaincu que je peux faire 100 fois mieux que lui (Matar Ba)», a déclaré M. Faye, coordonnateur de la Task-force républicaine, mercredi dernier sur la 7Tv. S’il loue l’engagement et la loyauté de l’édile de Fatick, Biram Faye estime que les populations locales n’ont pas profité des fonctions de Matar Bâ. «Aujourd’hui, il est maire et ministre mais ce que j’ai fait à Fatick, il ne l’a pas fait. Les Fatickois et les Sénégalais m’en sont témoins», a ajouté le Directeur général de l’Agence d’assistance à la sécurité de proximité (Asp). A noter que cette localité compte aussi d’autres candidats déclarés comme Sory Kaba, Cheikh Kanté ou Maïssa Mahécor Diouf.
Biram Faye sur Matar Ba : «Si le Président le choisit, il y aura vote-sanction»
L’ancien adjoint de Abdou Mbow à la Cojer a même averti le président de la République sur les conséquences d’un choix portant sur Matar Ba pour porter les couleurs de Bby. «Je ne suis pas en train de me vanter mais s’il y a un autre choix que moi, les populations peuvent ne pas y adhérer. Parce que nous sommes en train de travailler depuis années pour ça. Si le Président le choisit, il y aura vote-sanction», a prévenu Biram Faye, investi il y a quelques jours par ses partisans comme candidat à la mairie de Fatick. Ce département n’est pas un cas isolé. Partout au Sénégal ou presque, les candidatures déclarées de part et d’autre donnent naissance à des conflits ouverts entre membres de la coalition au pouvoir ou camarades de parti.
Secrétaire d’Etat aux Sénégalais de l’extérieur, Moïse Sarr défie la maire sortante, Thérèse Faye, dans la commune de Diarrère. A Dakar, Abdoulaye Diouf Sarr et Amadou Ba se livrent actuellement à une bataille de positionnement. Le maire de Yoff est dans l’agitation depuis quelques mois, tandis que l’ancien ministre de l’Economie et des finances fourbit ses armes dans le plus grand secret. Il y a deux jours, une rumeur faisant état d’un choix de Macky Sall sur Amadou Ba, a mis le camp du ministre de la Santé dans tous ses états. Diouf Sarr multiplie les sorties pour avoir la confiance de Macky Sall. «Mon patron, c’est le peuple de Dakar. J’ai reçu le message des Dakarois et je vais le porter. Les Dakarois me demandent de rester debout. C’est pourquoi, il y a tout ce tollé. Encore une fois, je tends la main à tous les Dakarois. S’ils prient pour moi, je pense que le succès sera au bout», a-t-il invité la semaine dernière dans son fief.
Diouf Sarr-Amadou Ba à Dakar, Mary Teuw-Mansour Faye à Saint Louis, Wilane-Laye Sow à Kaffrine…
Une déclaration qui risque de plomber ses chances et peut être vue comme une défiance envers le patron de l’Apr qui appelle ses hommes à lui faire confiance pour les investitures. A Thiès, Macky Sall devra trouver la bonne formule entre Talla Sylla, son allié-maire sortant, et les responsables de l’Apr. Abdou Mbow, Siré Dia, Augustin Tine, nourrissent des ambitions de diriger la mairie de Thiès, fief absolu de Idrissa Seck. A Saint-Louis, Alioune Badara Cissé est parti mais un autre opposant au pouvoir se dresse sur le chemin du maire Mansour Faye. L’ancien ministre de l’Enseignement supérieur a déclaré sa candidature depuis longtemps et n’hésite jamais à réduire au néant le bilan du beau-frère du Président Sall. Il se dit qu’il n’exclut pas de s’allier avec Yewwi askan wi pour déboulonner Mansour Faye.
Macky devra aussi gérer l’appétit de Ahmed Fall Braya, transhumant venu du Pds et arrivé deuxième en 2014. A Ziguinchor, Doudou Ka (Apr) veut la mairie gérée depuis 2009 par Abdoulaye Baldé (Ucs) qui a rejoint la majorité à la veille de la Présidentielle de 2019. Benoît Sambou, rival historique de Doudou Ka, n’a pas encore dit son dernier mot après son échec en 2014. A Kaffrine, Abdoulaye Wilane digère mal les attaques du ministre Abdoulaye Sow, candidat déclaré à la mairie. Le Socialiste et l’Apériste se livrent un combat épique par médias interposés. A Tambacounda, le député-maire, Mame Balla Lo, n’aura pas que l’opposition face à lui. Le ministre Sidiki Kaba qui a dirigé le département lors des Législatives de 2017, a pris goût à la politique et ne dirait pas non à la mairie Tambacounda.
A Podor, Racine Sy veut sa revanche face à l’actuel ministre des Affaires étrangères, Me Aïssata Tall Sall, qui l’avait battu par une différence de 6 voix en 2014. Une chose est sûre : les investitures vont forcément générer des frustrations, avec comme conséquence la création de listes parallèles. A Dakar, Taxawu Dakar de Khalifa Sall en avait profité pour faire une razzia (15 sur 18) en 2014. 8 ans après, les mêmes causes risquent de produire les mêmes effets. D’autant plus que le maître, qui devrait siffler la fin de la récréation, semble, sur ce point comme sur d’autres, avoir adopté la position qu’il semble affectionner, celle du Lion qui dort, comme il l’avait dit à l’inauguration du Pont de l’Emergence.
Par Khalifa Mbaye DIOP