Ouvertes par décret présidentiel n°2021-976, depuis le 31 juillet dernier, les demandes d’opérations sur les listes électorales prévues par l’article 3, formulées par les électeurs auprès des Commissions administratives, prennent fin ce jour, mercredi 8 septembre 2021. Place alors à la période contentieuse, du jeudi 9 septembre au mardi 14 septembre 2021, durant laquelle seules les décisions de justice sont prévues. Durant plus d’un mois, le pays a vécu au rythme d’une ouverture/révision exceptionnelle des listes électorales tant soit peu mouvementée.
«Ce transfert d’électeurs a été cautionné par le sous-préfet de Grand-Dakar qui n’est pas une autorité mais un autorisé. Il s’est permis aujourd’hui d’exclure le représentant de notre coalition, comme dans une garderie d’enfants, en disant que c’est lui qui décide à titre personnel». Ces propos sont du tonitruant maire de Mermoz Sacré-Cœur qui s’était rendu, le samedi 4 septembre dernier, à la Sous-préfecture de Grand-Dakar pour faire l’état des lieux sur «la campagne de transfert d’électeurs» qu’il a dénoncée.
Très en verve contre le comportement de l’autorité administrative locale, Barthélémy Dias promet de sévir. «Nous l’avons constaté par voie d’huissier et nous allons le prendre en compte dans le contentieux. Nous sommes descendus pour faire comprendre à l’autorité qu’il n’a pas le monopole de la bêtise. Aucune autorité n’est outillée pour mettre à la porte d’une commission un représentant d’un parti politique», a promis ce responsable de Taxawu Sénégal, membre de la coalition de l’opposition dénommée «Yewwi Askan Wi».
Des sorties et accusations de «fraudes» du genre sont le lot quotidien des dénonciations, depuis le lancement, le 31 juillet dernier, de la révision exceptionnelle des listes électorales, dont les demandes d’opérations effectuées par les électeurs prennent fin aujourd’hui, mercredi 8 septembre 2021. En effet, depuis le jour de démarrage de ces opérations sur l’ensemble du territoire national, opposition et pouvoir se livrent à une véritable guerre d’opinion, sur fond d’accusations et de récriminations dans la délivrance des certificats de résidence, toute chose qui serait opérée de manière discriminatoire. Pas un jour ne passe sans que la presse ne fasse écho de tensions autour de l’octroi de ce document exigé par le Code électoral à tout citoyen qui voudrait opérer des modifications sur son adresse électorale.
A Pikine Nord, des incidences violentes ont opposé des militants du mouvement politique République des valeurs (Rv) de Thierno Alassane Sall à l’équipe municipale du maire Amadou Diarra, membre du PDS, qui a récemment rejoint le parti au pouvoir. Les membres de la Rv dénoncent «l’impossible obtention de documents aussi simples qu’un certificat de résidence ou un extrait de naissance». L’affaire est entre les mains de la justice.
Dans la région de Dakar, les problèmes de «délivrance de manière discriminatoire des certificats de résidence» notés ont poussé le chef de l’exécutif régional à rappeler aux différents acteurs politiques les «principes qui fondent l’action publique». Saisi par des responsables de l’opposition, le gouverneur Al Hassan Sall, dans une Lettre circulaire datée du 3 août dernier, a invité tout le monde à avoir le «sens élevé des valeurs de la République pour un retour à l’orthodoxe administrative, en délivrant l’acte demandé par le citoyen, dès que ce dernier satisfait aux conditions d’obtention prévues par les lois et règlements.»
Toujours dans la capitale sénégalaise, plus précisément au niveau de la commune de Dakar-Plateau, les partisans du leader de Pastef, Ousmane Sonko, et leurs camarades d’autres formations de l’opposition n’ont cessé de dénoncer des «pratiques antirépublicaines du maire de Dakar-Plateau», Alioune Ndoye, par ailleurs ministre des Pêches et de l’Economie maritime. Ce dernier, à leur avis, «sans aucune base légale, s’est autoproclamé seul signataire de ce document administratif», en «dessaisissant de facto les officiers d’état civil, les Commissariats de Police, les Brigades de Gendarmerie ainsi que les Préfectures de leur compétence à délivrer les certificats de résidence». Une accusation, tout naturellement, démentie par le mis en cause qui précise qu’«aucun certificat de domicile n’a à ce jour enregistré un refus de délivrance. Même si certaines demandes restent étonnantes, aucun refus n’a été enregistré dans la commune du Plateau».
Ailleurs, c’est le maire de Thiès, Talla Sylla, qui est accusé par ses détracteurs «d’instrumentaliser la loi pour empêcher les électeurs d’avoir le certificat de résidence, après une fermeture de 15 jours de l’état civil, en pleine période de révision des listes électorales». Il en est de même dans la commune de Matam où le maire Mamadou Mory Diaw est incriminé de faire un transfert d’électeurs et de refuser la délivrance de certificats de résidence à ses administrés qui ne sont pas acquis à sa cause. Le 15 août dernier, le site d’information en ligne du groupe Walfadjri (walfnet) a fait état de l’arrestation d’une jeune femme âgée de 24 ans qui serait impliquée dans une histoire de confection de faux certificats de résidence par la Brigade de Gendarmerie de la localité. Que dire des dénonciations de «fraudes», de «blocages» et de présence de Commissions administratives illégales chez des responsables de la mouvance présidentielle, faites par le parti Pastef à Joal Fadiouth, à Dakar, à Ziguinchor, tout comme à Linguère ?
Ou encore de l’insuffisance desdites Commissions administratives dans certaines localités, comme le département de Kaffrine qui n’en compterait que 4, dont 2 à Kaffrine commune, 1 à Nganda et l’autre à Gniby, selon le responsable de l’Alliance pour la République (Apr) à Kaffrine, Abdoulaye Sow ? Cette tension notée durant les opérations sur les listes électorales présage d’une période contentieuse houleuse. Du jeudi 9 au mardi 14 septembre, l’électeur qui a fait l’objet d’une radiation d’office, pour d’autres causes que le décès, ou celui dont l’inscription est contestée, reçoit de la part de l’autorité administrative compétente, notification écrite de la décision de la Commission administrative à sa dernière résidence connue. Ils peuvent, dans les cinq (05) jours qui suivent, intenter un recours devant le président du Tribunal d’Instance, qui statue dans un délai de 10 jours suivant ladite déclaration.
JEAN MICHEL DIATTA