Ça pourrait être le tube de l’été si les Sénégalais avaient la tête à la fête : pluies, réunions d’urgence, recasements, plan Orsec. Depuis 2005, plus de 1000 milliards sont annoncés pour une solution définitive. Retour sur 16 années de programmes.
C’est ce qu’on appelle un marronnier : Chaque année, Dakar est plongée dans les eaux après les pluies des mois d’août et de septembre. Les autorités, après des réunions d’urgence, déclenchent le plan Orsec (Organisation des secours) tout en annonçant des milliards pour une solution définitive.
Wade et son plan Jaaxay
Dakar et pluies ne font pas bon ménage. Des milliers de personnes ont été déplacées pendant que d’autres pataugent en attendant la «solution durable» à ce problème qui indispose la capitale depuis 2005. A cette période, le Président Wade était en pleine période de grâce. Il avait les yeux virés sur les élections législatives de 2006. Mais au mois d’août de 2005, les pluies diluviennes viennent chambouler son agenda. Pas moins de 3 mille familles, majoritairement issues de la banlieue, pataugent dans les eaux. Wade se tourne vers les Malaisiens qui devaient construire 70 mille logements sociaux à Diamniadio. L’objectif de ce plan était de reloger les familles qui ont des maisons dans des zones non aedificandi. Pour financer le projet, Wade reporte les élections législatives et réaffecte ce budget à son Plan Jaaxay. D’un montant total de 52 milliards Cfa, Jaaxay devait reloger les familles sinistrées mais le projet a accusé du retard et sa gestion confiée à l’Agence nationale de prévention des pluies logée au Palais a été fortement décriée. Des dignitaires du Pds ont été pointés du doigt pour avoir «détourné l’objectif du projet». En 2020, 386 familles à travers le Collectif Jaaxay diot sa ak ont fait une sortie médiatique pour dénoncer l’arrêt du processus.
Macky et son plan décennal
Les autorités n’ont pas retenu la leçon de 2005. En effet, 4 années après, les pluies ont encore plongé une bonne partie de la région de Dakar dans les eaux. Cette fois-ci c’est le Premier ministre d’alors, Souleymane Ndéné Ndiaye, qui est monté au créneau. A la sortie d’une réunion d’urgence avec les maires des communes affectées, il annonce une enveloppe de 2 milliards pour accompagner le Plan Orsec. La Route nationale qui relie Dakar et sa banlieue était impraticable. Le pouvoir d’alors s’était limité tout simplement aux effets d’annonce sans réellement apporter une solution durable. Ce qui va coûter la vie à 4 personnes en 2012. En effet, le 27 août 2012, Dakar connaît un énième épisode d’inondation. Macky Sall fraîchement élu président de la République, décide de prendre le taureau par les cornes. Il supprime le Sénat pour allouer son budget de 8 milliards Cfa à la lutte contre les inondations. Il lance un Programme décennal de gestion des inondations. C’est plus de 750 milliards qui doivent être investis en 10 ans. Lancé en 2012, le programme s’articule sur 3 phases. Dans un premier temps, le plan d’urgence de 69,6 milliards Cfa pour 2012 et 2013 est lancé. L’objectif était de soulager les sinistrés par des recasements en attendant les travaux de construction des édifices de drainage d’eau. Ensuite, la deuxième phase va s’étaler entre 2014 et 2017 pour 339,6 milliards Cfa. Et la dernière qui va s’achever en 2022 avec 336,6 milliards Cfa. A un an de son terme, les solutions du régime ne sont pas autant efficaces comme annoncés. Keur Massar a connu deux ans de suite des inondations tout comme la banlieue. Si Dalifort, Ouest Foire ne sont plus affectés par les inondations, les autres zones ciblées par le projet sont dans l’urgence. Et pourtant, Omar Guèye, le ministre des Collectivités locales, avait annoncé que «85% des travaux liés à la lutte contre les inondations à Keur Massar ont été réalisés» au mois de mai dernier. Mais avant que Oumar Gueye ne sente le besoin d’éclairer la lanterne des Sénégalais, Ousmane Sonko avait déclaré que «seuls 48 milliards Cfa ont été exécutés sur 767». L’Assemblée nationale avait dépêché une mission d’information qui a conclu que les travaux du Plan décennal ont été exécutés à hauteur de 38%, soit plus de 291 milliards Cfa.
Par Malick GAYE