Depuis quelques temps, l’opposition et le pouvoir se livrent une guerre ouverte sur la question de la délivrance des certificats de résidence. Cette bataille qui fait rage laisse à penser qu’on s’achemine tout droit vers un contentieux électoral au lendemain des locales du 23 janvier 2022.
Les germes d’un contentieux électoral sont-ils en train de gagner petit à petit le processus électoral pour les prochaines élections municipales et départementales du 23 janvier 2022 ? Tout porte à le croire si on s’en tient à l’évolution de l’actualité autour des inscriptions et réinscriptions dans le cadre de la révision exceptionnelle des listes électorales en vue de ces élections départementales et municipales du 23 janvier 2022.
En effet, depuis le samedi 31 juillet, jour de démarrage de ces opérations sur l’ensemble du territoire national, opposition et pouvoir se livrent à une véritable guerre d’opinion sur fond d’accusations et de récriminations dans la délivrance des certificats de résidence, toute chose qui serait opérée de manière discriminatoire. Pas un jour ne se passe sans que la presse ne fasse écho de tensions autour de la délivrance de ce document exigé par le Code électoral à tout citoyen qui voudrait procéder à la modification de son adresse électorale.
De la commune de Dakar Plateau à celle de Matam, en passant par la ville de Thiès, les communes de Dankhe Sène dans l’arrondissement de Ndindy, les départements de Diourbel, de Mbacké, de Castors-Dieuppeul Derklé et des Parcelles assainies pour ne citer que ces localités-là, le constat est partout le même. Les opérations de révision exceptionnelle des listes électorales sont polluées dans ces localités par des accusations de trafic, de rétention ou de délivrance de manière discriminatoire des certificats de résidence. Dans la capitale, cette « bataille » autour de la délivrance du certificat de résidence a même poussé le chef de l’Exécutif régional à sortir de sa réserve pour rappeler aux différents acteurs politiques les « principes qui fondent l’action publique ».
En effet, saisi par les responsables de l’opposition sur cette situation de délivrance de manière discriminatoire des certificats de résidence, le gouverneur Al Hassan Sall, dans une lettre circulaire datée du 3 août dernier, a indiqué à l’endroit de tous les chefs d’exécutifs locaux que « si cette situation est avérée, celle-ci est contraire aux principes qui fondent l’action publique qui se doit être générale et impersonnelle ».
Sous ce rapport, il a ainsi invité tout le monde à avoir le «sens élevé des valeurs de la République pour un retour à l’orthodoxe administrative, en délivrant l’acte demandé par le citoyen, dès que ce dernier satisfait aux conditions d’obtention prévues par les lois et règlements. » Dans la foulée de cette sortie du chef de l’Exécutif régional, Birahim Seck, coordonnateur du Forum civil rappelant que « nous avions vu, lors de l’élection passée, une localité dont le nombre d’inscrits était supérieur au nombre de résidents », a demandé tout simplement l’implication du commandement territorial dans le processus de confection de ces certificats.
A Dakar, c’est la commune de Dakar Plateau qui cristallise le plus la tension autour de cette question. Depuis le démarrage des opérations de révision des listes électorales, les partisans du leader de Pastef, Ousmane Sonko, et leurs camarades d’autres formations de l’opposition dénoncent des « pratiques antirépublicaines du maire de Dakar-Plateau et membre de la coalition Benno Bokk Yaakar (Bby), Alioune Ndoye par ailleurs, ministre de la Pêche. Ce dernier, selon eux, « sans aucune base légale, s’est auto-proclamé seul signataire de ce document administratif » en « dessaisissant de facto les officiers d’état civil, les commissariats de police, les brigades de gendarmerie ainsi que les préfectures de leur compétence à délivrer les certificats de résidence ». Une accusation formellement démenti par le mis en cause.
S’exprimant lors d’un point de presse tenu hier, lundi 16 aout, le ministre-maire de Dakar Plateau a réfuté toutes ces accusations. « Je dis bien aucun certificat de domicile n’a à ce jour enregistré un refus de délivrance, même si certaines demandes restent étonnantes, aucun refus n’a été enregistré dans la commune du Plateau».
Du côté de la capitale du rail, le maire Talla Sylla est lui aussi accusé par ses détracteurs « d’instrumentaliser la loi pour empêcher les électeurs d’avoir le certificat de résidence, après une fermeture de 15 jours de l’Etat civil, en pleine période de révision des listes électorales ». Il en est de même dans la commune de Matam où le maire Mamadou Diaw est accusé de faire un transfert d’électeurs et de refuser la délivrance de certificats de résidence à ses administrés qui ne sont pas acquis à sa cause. Le 15 août dernier, le site d’information en ligne du groupe WalFadjri (walfnet) a fait état de l’arrestation d’une jeune femme âgée de 24 qui serait impliquée dans une histoire de confection de faux certificats de résidence par la Brigade de Gendarmerie de la localité.
NANDO CABRAL GOMIS