Référence dans le monde universitaire et du droit, la ‘’Peule-Léboue’’, Amsatou Sow Sidibé, célébrée samedi par la faculté des Sciences juridiques et politiques de l’Ucad, revient sur son parcours, ainsi que sur certains sujets brûlants de l’actualité
Pouvez-vous nous parler un peu plus de vous, de vos origines, de votre parcours… ?
Amsatou Sow Sidibé est une Sénégalaise née à Dakar. Son père, Aladji Pape Sow, lui-même est né à Dakar. Son grand-père, Djibril Sow, a quitté le Macina et est venu à l’école des fils de chefs de Saint-Louis. Il est descendu à Dakar et fait partie de ceux qui ont créé la Médina jusqu’à l’avenue Faidherbe. Par contre, la mère de mon père, Fatou Hann, est originaire de Pété, dans le Fouta.
Amsatou Sow Sidibé est donc une femme peule-léboue. C’est comme ça qu’on nous appelait. D’ailleurs, mon père porte le nom d’un Lébou de la Médina, en l’occurrence le père de l’honorable députée Adjaratou Arame Diène. Je suis donc une pure Dakaroise. Mon père est né là où se trouve la Société générale, sur l’avenue Faidherbe et était fonctionnaire des chemins de fer.
Ma mère, elle, est née à Thiès ; mais son père est de Guidakhar, dans le Walo, à une trentaine de kilomètres de Richard-Toll. Sa mère est de Ndiagne, dans le Ndiambour. Enfant, nous habitions là où se trouve aujourd’hui le Grand Théâtre. Bien évidemment, ce Dakar n’avait rien à voir avec celui que vous avez connu (rires). C’était un Dakar si calme, si charmant et si accueillant. Aujourd’hui, la ville est agressée, elle est mise sens dessus-dessous…
C’est le moment pour moi de lancer un appel pour une réconciliation de l’humain, de l’homo senegalensis avec son terroir, avec son environnement… Ainsi, je peux dire que je suis du Fouta, du Ndiambour, du Macina, du Cayor, j’ai également des parents à Foundiougne. Mais je suis née à Dakar dans le Cap-Vert. Bref, je suis une belle synthèse du Sénégal (elle sourit).
Qu’en est-il de votre parcours scolaire et universitaire ? Etes-vous de ceux qui se réclament ‘’pur produit de l’école sénégalaise’’ ?
C’est une mission périlleuse, mais puisque vous m’y invitez, je vais essayer. Je peux le revendiquer parce que j’ai fait l’essentiel de mon parcours ici. J’ai fait Berthe Maubert jusqu’à l’entrée en 6e ; ensuite, j’ai débuté le secondaire au petit lycée qui était à côté d’Air France, avant de rejoindre l’alors nouveau lycée John Fitzgerald Kennedy, où j’ai obtenu mon baccalauréat. Ensuite, j’ai rejoint, en 1974, l’université Cheikh Anta Diop, à l’époque université de Dakar. Après la Licence, le professeur Ibrahima Fall (ancien candidat à la Présidentielle) que je salue, à qui j’adresse un témoignage déférent, m’a donné une bourse pour aller poursuivre mon troisième cycle en France.
J’ai alors intégré l’université de Paris II-Sorbonne, où j’ai commencé le troisième cycle en prenant un sujet de thèse, tout en fréquentant la Sorbonne pour préparer le Certificat de droit et économie d’Afrique. J’avais commencé la rédaction de la thèse, mais je suis vite rentrée au Sénégal, parce que j’ai été recrutée à l’université de Dakar. J’ai soutenu ma thèse en 1987, à l’université Paris II Panthéon-Sorbonne sur le pluralisme juridique en Afrique. C’est-à-dire le fait qu’il y ait plusieurs systèmes de droit en Afrique avec les droits moderne, musulman, coutumier… Et j’ai eu la chance d’avoir le prix de thèse de l’université de Paris II. Elle a donc été publiée par la Librairie générale de droit et de jurisprudence (LGDJ) Paris en 1991.
Pour l’Agrégation, c’était en 1991 ou 1992. Je suis devenue par la suite professeure titulaire et enfin professeure titulaire de classe exceptionnelle. J’ai donc essayé de faire le maximum pour être là où je suis.
Depuis 1974, vous n’avez pas quitté cette université qui vous rend aujourd’hui hommage. Qu’avez-vous ressentie quand vous avez été choisie comme marraine de la promotion sortante de la FSJP ?
Cela m’a fait beaucoup plaisir. Je suis très contente de cette marque de reconnaissance. Je remercie infiniment les étudiants et les autorités de l’université. Vous savez, j’ai fait presque 40 ans dans cette université et je resterai toujours disponible pour les étudiants, pour mon pays. Comme vous le savez, j’ai toujours eu une relation assez particulière avec les étudiants. J’avais choisi de m’investir dans ce grand amphi qu’on appelait l’amphi B, où il y avait des milliers d’étudiants. Non seulement, il y avait ceux qui étaient inscrits à la Fac Droit, mais aussi d’autres qui venaient d’autres facultés pour suivre mon cours. J’ai toujours essayé de dispenser ce cours avec générosité, avec cette passion que j’ai pour le droit et l’envie de le faire aimer aux autres. Et je sentais que cette passion, cet amour était bien transmis aux étudiants, pour qui j’étais la maman, la ‘’badiene’’. J’étais sans complaisance, mais je défendais leurs intérêts de façon très juste. C’est peut-être ce qu’ils ont apprécié.
Aujourd’hui, cet espace auquel vous avez consacré 40 ans de votre vie est émaillé de violence. L’actualité est même marquée par ces sanctions infligées à certains étudiants par l’Assemblée de l’université. Votre commentaire sur ces sanctions ?
Moi, je n’aime pas la violence. Je me veux apôtre de la non-violence. J’ai été dans beaucoup d’espaces, aussi bien au Sénégal qu’à l’étranger, pour essayer de régler des conflits. Alors, quand la violence se passe chez moi, surtout dans l’espace universitaire, spécialement celui de Dakar dont la devise est ‘’Lux Mea Lex’’, je suis peinée. Assesseure à la faculté de Droit, ancienne directrice de l’Institut des Droits de l’homme et de la paix, j’ai beaucoup réfléchi avec mes collègues pour voir comment mettre un terme à ces cycles de violence. Des séminaires ont été organisés, des propositions faites, mais on y voit toujours de la violence. Et les causes sont toujours les mêmes, à l’occasion des renouvellements des bureaux des amicales. C’est incompréhensible, c’est inadmissible.
Moi qui vous parle, j’ai eu à me mettre entre des étudiants qui se battaient pour les séparer. C’était risqué, mais je ne pouvais les laisser s’entretuer. Mais malgré tout ce qu’on a fait, les conflits sont toujours là. Quel est le problème ? Je pense qu’il faut davantage impliquer les jeunes dans la prise en charge de cette problématique. Qu’on leur fasse comprendre que la violence ne règle rien du tout. C’est la pire des choses et cela ne fait que les retarder. L’université doit être un espace de réflexion et non un espace où ce sont les biceps et les armes qui règnent. Nous ne sommes pas dans une jungle.
Pensez-vous donc que l’université a bien fait de sanctionner certains étudiants qui sont allés trop loin ?
J’ai été choquée de voir ce niveau de violence. Quand on parle de franchise universitaire, cela veut dire que ce sont les enseignants, les enseignés, le personnel qui doivent évoluer en harmonie pour produire. Ce n’est pas un endroit où on doit être en permanence en inquiétude. Sur la nature des sanctions, c’est l’Assemblée de l’université qui est habilitée et elle a pris sa décision.
Les politiques sont souvent accusés d’être les instigateurs de cette violence. Que pensez-vous d’une telle accusation ?
Allez à l’Assemblée nationale où on se donne maintenant des coups de poing ! C’est tellement vilain. Et c’est ce qui est donné en exemple à notre jeunesse. Si les représentants du peuple se comportent de cette manière, le peuple les regarde et les imite. La violence doit être bannie de notre société et je pense qu’il faut, ensemble, œuvrer pour cela. Dans une société civilisée, la tolérance, la discipline, le respect de l’autre doivent primer. Mais, malheureusement, nous constatons de plus en plus de dérives.
Êtes-vous de ceux qui pensent que la politique doit être bannie de l’espace universitaire ou simplement encadrée ?
Quand on dit ‘’Lux Mea Lex’’, il y a des attitudes à bannir, des activités à encadrer scrupuleusement. L’universitaire a certes le droit d’avoir des positions, d’intervenir dans la politique, qui n’est rien d’autre que l’art de gérer la cité. C’est un droit fondamental. Mais c’est une certaine manière de faire la politique qui n’a pas sa place dans l’espace universitaire.
En tant que juriste qui a travaillé sur le foncier et le pluralisme juridique en Afrique, quelle lecture faites-vous des multiples litiges fonciers au Sénégal ?
Le problème du Sénégal, c’est la boulimie foncière. Les gens s’arrachent les terres comme ils s’arrachent des petits pains ou bien un bol de riz. C’est incroyable. Or, si la loi sur le domaine national avait été bien appliquée, nous n’en serions jamais là. Avec cette loi, le président Léopold Sédar Senghor avait décidé que 99 % des terres du Sénégal appartiennent à la nation. C’est-à-dire que toute personne qui a besoin de la terre peut avoir son lopin pour le travailler. C’était ça la finalité. Aujourd’hui, on a tellement grignoté qu’une grande partie de ces terres n’appartiennent plus à la nation. L’Etat s’en est approprié ; et plus grave, les particuliers s’en sont aussi appropriés. Et cela continue de plus belle. Mieux, on se permet même de dégager des familles qui occupent des terres depuis des siècles pour en faire une appropriation privative. C’est ce qui est à la base de la plupart de ces conflits. Et il faut faire très attention. Partout où il y a des problèmes dans le monde, c’est parce que des groupes ont senti qu’on les a privés de leur droit à la terre, alors que d’autres y ont droit.
Est-ce à dire que vous êtes pour le maintien de la loi sur le domaine national, décriée, jugée parfois ‘’rétrograde’’ et contraire aux exigences du développement dans un monde de plus en plus libéralisé ?
Moi, je suis pour le respect de l’esprit de la loi sur le domaine national tel que cela a été fait par le président Senghor. Malheureusement, dans la pratique, cet esprit a toujours été dévoyé. Pourquoi (elle hausse le ton) est-ce que des personnes doivent devenir des ouvriers agricoles, alors que d’autres peuvent se taper des hectares et des hectares ? C’est injuste. C’est scandaleux dans un Etat démocratique. Chacun a droit à la terre, pour se loger, pour travailler.
Si on veut maintenant privatiser, on doit le faire en tremblant. Ce n’est pas une décision simple qu’on fait aveuglément. Si on le fait, un groupuscule va s’accaparer de toutes les terres au détriment du plus grand nombre. C’est ce qui crée des histoires. Je répète : il faut faire très attention avec la gestion de la terre. Il faut une gestion responsable. Faire en sorte que tout le monde puisse en jouir.
Universitaire reconnue, respectée par tout le monde, pourquoi avez-vous décidé, à un moment, d’entrer en politique ? Qu’est-ce qui a sonné le déclic ?
Justement, c’est pour changer cette façon de faire la politique dans notre pays. Et pour cela, il faut des hommes et des femmes de qualité dans cet espace politique marqué par la politique politicienne. J’ai donc voulu apporter ma touche, cette touche nouvelle, pour qu’enfin on ait une façon civilisée de faire la politique. Notre engagement ne doit être guidé que par la volonté d’être au service de notre peuple, d’être utile à notre pays. Malheureusement, ce n’est pas toujours le cas. Voilà pourquoi est née Car (Convergence des acteurs pour la défense des valeurs républicaines) Lenen qui n’est rien d’autre que la rupture. Ce que nous voyons dans ce pays n’augure rien de bon. Il faut y remédier et c’est la raison pour laquelle on s’est engagé.
Vous êtes entrée dans le champ politique depuis 2010, mais on ne sent pas trop Car Lenen dans l’espace. Est-ce à dire que votre message n’est pas suffisamment entendu ? Vous arrive-t-il d’avoir des regrets ou de vous décourager ?
Je ne me décourage pas ; je n’ai aucun regret par rapport à cet engagement. Bien au contraire ! Moi, j’observe et je tire des conclusions. Globalement, je pense que nous avons un parcours positif. Au moins, nous ne faisons pas de dégâts et nous posons des actes positifs et utiles pour notre pays, des actes qui inspirent.
Par exemple, en 2012, alors que nous venions juste de créer notre manifeste, avant même le récépissé, on s’est présenté à la présidentielle…
Cela avait fait long feu… ?
Mais c’était très important. A travers cette candidature, nous avons voulu montrer la voie, inviter les femmes à prendre conscience qu’elles doivent participer et qu’elles en ont les moyens et les capacités. Et je pense que sur ce plan, on a réussi. L’initiative a fait des émules et les femmes se sentent de plus en plus concernées.
En 2019, nous avons voulu encore participer, mais on nous a dénié ce droit, sous le prétexte du parrainage, dont on ne maitrise pas les tenants et les aboutissants. Et les juridictions africaines l’ont d’ailleurs sanctionné.
Aujourd’hui, vous vous opposez au régime du président Macky Sall, après avoir cheminé avec lui pendant un moment. En regardant dans le rétroviseur, quel est votre sentiment ?
Je n’ai aucun regret. C’était une bonne occasion pour mettre mes compétences au service de mon pays, dans le domaine des droits humains et de la paix dont j’étais chargée en tant que ministre-conseiller. A ce titre, nous avons beaucoup contribué à l’accalmie du conflit en Casamance, en rencontrant notamment beaucoup de communautés dans cette région sud du pays. Nous avons eu à leur parler avec l’EDVR (Espace, dialogue, vérité et réconciliation) pour la paix définitive en Casamance. Nous discutions, dans ce cadre, avec les communautés, autour des questions qui pouvaient nous mener vers la paix. Nous avons non seulement apporter notre modeste contribution, mais mieux, nous avons laissé des documents de stratégie pour arriver à la paix définitive.
Pouvez-vous rappeler les circonstances de votre départ ? Vous aviez semblé un peu en colère ?
Je n’étais pas en colère, mais un peu désolée, je l’avoue. Par exemple, quand on refusait de me verser un salaire de la présidence ou un salaire de l’université, alors que je travaillais comme tout le monde. Je pense que c’était le minimum. Je suis restée pendant six mois sans aucun salaire et je n’ai pas compris le pourquoi. Mais comme je ne fais pas beaucoup de bruit autour de ces choses, certains en ont profité peut-être. Je profite de l’occasion pour rappeler que le salaire est fondamental et on ne doit pas jouer avec. On doit le respecter, le protéger pour tous les travailleurs.
Le Dialogue politique a aujourd’hui livré ses conclusions, sanctionnées par le vote prochain du projet de loi portant Code électoral. Etes-vous satisfaite des résultats ?
Le dialogue politique est important, mais il y a d’autres aspects du dialogue qui sont déterminants pour tous, surtout pour les jeunes. Et cela me tient à cœur. Maintenant, pour le dialogue politique, puisque vous me le demandez, j’ai essayé de chercher les consensus, mais je dois dire que je n’ai pas vu de résultats significatifs du dialogue politique. Pour la caution qui est importante, je n’ai pas vu de solution. Pour le parrainage, c’est réglé pour les élections territoriales, mais on ne sait pas encore pour les Législatives et la Présidentielle… On constate que cela n’a pas été enlevé dans la loi électorale. Pour moi, ce machin est une catastrophe. Le Sénégal n’est pas prêt pour le parrainage. Il faut d’autres formes de filtre.
Diriez-vous donc que le dialogue n’a pas servi à grand-chose ?
Vous voulez me demander si la montagne a accouché d’une souris ? (Elle éclate de rire) En tout cas, sur ce machin du parrainage, je pense qu’il faut le régler avant d’aller aux Législatives. C’est fondamental pour les Législatives et la Présidentielle. Encore une fois, j’ai beaucoup œuvré pour qu’il y ait un dialogue. Mais dans mon entendement, le dialogue devait être non seulement politique, mais aussi social, économique, éducationnel… Le dialogue politique, seulement, ce n’est pas ce qui fait vivre le pays. C’est pourquoi j’avais fait un document que j’avais envoyé au président de la République pour qu’il s’en inspire. Et je crois qu’il avait tenu compte de mes suggestions. Moi, la conception que j’ai du dialogue, c’est qu’il doit permettre aux Sénégalais de vivre mieux. Sans cela, ce n’est pas la peine. Ne l’ayant pas senti, je n’ai pas voulu déranger. C’est pourquoi je me suis gardée à l’époque de faire du bruit. Je n’ai eu à parler à aucun journaliste. J’ai quitté le dialogue sur la pointe des pieds.
Les élections territoriales arrivent à grands pas. Comment comptez-vous y aller ? Amsatou Sow Sidibé est-elle candidate à la succession de Barthélémy Dias à la mairie de Mermoz-Sacré-Cœur ?
Vous savez, les élections territoriales, c’est une question de proximité. Chaque militant, en fonction des réalités de sa localité, va apprécier et agir en conséquence. Pour ma part, je préfère parler des militantes et militants ; des sympathisantes et sympathisants de Car Lenen. Ce n’est pas ma personne qui importe. Nous allons vers des élections de proximité et nous allons voir le meilleur moyen d’y participer.
Parlons du troisième mandat. Quel est votre commentaire sur ce débat ?
Moi, je ne comprends pas. Il y a tellement de problèmes urgents dans ce pays. Les questions éducatives, de la santé avec la Covid, la jeunesse qui a fait un cri du cœur terrible au mois de mars… C’est pourquoi je ne comprends pas que le président de la République ne mette pas un point final, je dis bien un point final à cette question du mandat. Il sait comment mettre un terme à ce débat. Il est temps qu’on passe à autre chose. Cette question du mandat est devenue ennuyeuse, c’est une question qui m’ennuie. Nous devrions nous concentrer sur les questions brûlantes de l’actualité. C’est pourquoi j’ai vraiment du mal à mêler mon nom à ce débat.
Mais parfois, certains citoyens se sentent abusés à cause des multiples interprétations des spécialistes du droit. Est-ce la discipline qui est aussi aléatoire ou ce sont les hommes et femmes de droit qui posent problème ?
Ce que je peux dire, c’est que le droit est un phénomène social, humain. Mais la règle de droit est une base. Il faut, aujourd’hui, que nous retournions à la règle de droit, sans laquelle il n’y a ni développement ni vie possible en société. En tant que phénomène social et humain, cette règle peut être susceptible d’interprétation, mais cela doit se faire en toute objectivité. Pour ce faire, il y a la volonté du législateur qu’il faut prendre en compte. Que voulait le législateur, celui qui a fait la loi ? Quand on ne tient pas compte de cette volonté, interpréter devient effectivement difficile. Il est donc utile, parfois, de retourner aux travaux préparatoires pour comprendre ce que le législateur a voulu dire.
Par rapport à la question de l’emploi des jeunes, particulièrement ceux issus de votre département, la faculté de Droit. Ne pensez-vous pas qu’il faut davantage ouvrir les professions libérales pour accroitre leurs chances ?
Le problème de l’emploi des jeunes est une question de fond, une question globale. Il faut aider les jeunes à se remettre sur les rails, les accompagner dans le renforcement de leurs capacités. La question de l’école et de la formation est fondamentale. Je pense que ce qu’il faut aux jeunes pour leur insertion, c’est les accompagner dans leur savoir, c’est-à-dire dans leurs connaissances qui doivent être renforcées ; ensuite dans leur savoir-faire, c’est-à-dire en termes d’efficacité dans leurs recherches de la qualité, dans leurs compétences… Il faut aussi les accompagner dans l’exercice de leur savoir-être ; c’est-à-dire qu’ils aient plus conscience de leurs valeurs intrinsèques, qu’ils aient aussi confiance en eux, pour ne pas céder au découragement et à certains phénomènes comme le ‘’barsa wala barsax’’. Notre jeunesse doit certes avoir des emplois, mais elle doit aussi rompre avec la violence dont on parlait tout à l’heure. Elle doit faire partie de la crème de la jeunesse du monde. Elle en est capable et en a les capacités intellectuelles. Il leur manque juste les fondamentaux.
Mais n’y a-t-il pas lieu d’ouvrir également les quelques opportunités qui existent, notamment les professions libérales ?
Il faut ouvrir toutes les opportunités. Mais il y a des préalables qui sont nécessaires à l’épanouissement de cette jeunesse.