Contrôle de la ville de Dakar : le dilemme de Macky

par pierre Dieme

Remporter la bataille de Dakar, au soir du 23 janvier 2022 ! C’est ce challenge presque titanesque que la mouvance présidentielle doit relever aux élections locales prochaines, après le revers de 2014. Par ailleurs, le chef de l’Etat reste aussi confronter à un dilemme pour le contrôle de la capitale, d’autant que le futur maire de Dakar peut constituer un challenger de taille à l’élection présidentielle de 2024. Surtout que le troisième mandat taraude toujours les esprits. Surtout si le futur maire est de l’APR.

A Dakar, les manœuvres et autres stratégies pour le contrôle de la capitale sénégalaise et la succession de l’ancien maire de la ville, Khalifa Sall, révoqué par décret présidentiel, a démarré depuis belle lurette. Les ténors de la mouvance présidentielle affutent en sourdine les armes. Mais, il faudrait bien un leader charismatique pour vaincre le signe indien. Et pour cause, le président Macky Sall est le seul chef d’Etat qui n’a pas encore un maire à la tête de la ville de Dakar. Tel un ouragan, Taxawu Ndakaru de Khalifa Sall avait presque tout balayé sur son passage, lors des locales de 2014. «Plus jamais ça !», aurait laissé entendre le président Sall à ses proches collaborateurs, ne pouvant plus accepter une défaite de plus dans la capitale. Se pose, cependant le problème du candidat à même de porter la bataille de Dakar. Cela, d’autant plus que celui qui avait arrêté «l’hémorragie» a été écarté pour ses supposés ambitions présidentielles. L’ancien ministre de l’Economie, des Finances et du Plan, Amadou Ba avait un large avantage sur ses concurrents directs à cause de ses récentes performances, lors de la présidentielle de 2019, mais aussi et surtout aux élections législatives de 2017.

AMADOU BA, A L’HEURE

Tête de liste de la coalition Benno Bokk Yakaar à Dakar, il avait réussi là où Aminata Touré et Abdoulaye Diouf Sarr avaient échoué en 2014, aux locales, et en 2016 à l’issue de l’élection des Hauts conseillers des collectivités territoriales. Mais, il semble être freiné dans ses ardeurs par le chef de l’Etat qui lui avait fait quitter la puissante station du département de l’Economie et des Finances pour celle de ministre des Affaires étrangères, avant de lui porter «le coup de semonce» en l’écartant de la gestion des affaires publiques. Ce qui n’empêche pour autant pas le «Coordonnateur» de l’Apr aux Parcelles assainies et à Dakar de réclamer toujours son compagnonnage avec le président Sall.

ABDOULAYE DIOUF SARR ET SON PROBLEME DE LEADERSHIP

Quid du ministre-maire de la commune de Yoff, seul leader de Bby à Dakar à avoir résisté face à la déferlante Taxawu Ndakaru, en 2014 ? Abdoulaye Diouf Sarr qui bénéficie d’une longévité dans le gouvernement du président Macky Sall, a pris du galon à la tête de la Coordination des Cadres de l’Apr. Il s’était alors fixé comme mission de massifier l’Apr pour en faire un parti leader dans le département de Dakar, notamment les 19 communes de la capitale. Ce qui lui aurait permis d’émerger comme le leader de Dakar. Les raisons qui avaient poussé, cependant, le chef de l’Etat à faire recours à Amadou Ba, lors des législatives et pendant la présidentielle, semblent persister jusqu’ici. Le maire de Yoff peinerait à faire l’unanimité au sein du parti au pouvoir, et même dans la mouvance présidentielle.

ALIOUNE NDOYE DU PS A L’AFFUT

Au-delà de la guerre de positionnement qui fait rage au sein du parti présidentiel, il faudrait aussi résoudre l’équation de la Mouvance présidentielle. Le chef l’Etat qui serait dans les dispositions de conserver sa coalition jusqu’au-delà de 2024, dans le but de garder le pouvoir le plus longtemps possible, prendra-t-il le risque de vouloir barrer la route à l’actuel ministre de la pêche, non moins maire de Dakar Plateau ? De toute évidence, le PS ne cracherait pas sur un maire socialiste, de surcroit issu de la communauté «Léboue» fortement représentée à Dakar. Alioune Ndoye se positionne aussi comme un potentiel concurrent contre tous les autres aspirants au poste de maire de la ville de Dakar.

DAKAR DONNE DES AILES

Le chef de l’Etat n’est par conséquent pas sorti de l’auberge d’autant plus qu’il devrait résoudre le dilemme cornélien auquel il est confronté. Il est en effet, obligé d’arbitrer entre un maire issu de son parti, ce qui pourrait être analysé par d’aucuns comme son «dauphin», ou un autre issu des partis alliés de la mouvance présidentielle pour éviter de saper l’unité de la grande coalition. C’est ce qui aurait expliqué l’agitation de l’idée de nomination du maire de la ville de Dakar. De toute évidence, le prochain maire de la ville de Dakar, s’il est bien évidemment élu au suffrage universel direct, aux élections locales prochaines, pourrait bien constituer un challenger de taille pour la présidentielle de 2024. Surtout en tenant entre les mains un budget annuel de plus 60 milliards et un électorat de plus de 663.020 (chiffres présidentielle de 2019). Ce qui représente un couteau à double tranchant pour Macky Sall qui garde toujours le clair-obscur sur sa candidature à ces joutes.

JEAN MICHEL DIATTA

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