Bamba Dièye: « Il n’y a pas une politique d’emploi crédible »

par pierre Dieme

Le député Cheikh Bamba Dièye est revenu sur la problématique de l’emploi des jeunes au Sénégal. Invité de l’émission Grand Oral sur les ondes de la 97.5 Rewmi FM, samedi 1er mai, le leader du Front pour le Socialisme et la Démocratie/Benno Jubël (Fsd/Bj) invite l’Etat à soutenir les familles pour juguler la faim avant de proposer des schémas fast-track d’emploi sur lesquels on n’a aucune prise. Morceaux choisis. 

A votre avis qui est-ce qui est à l’origine du chômage des jeunes e cet état de fait?

Ce sont  des échecs répétés de toutes les politiques de développement qui ont été mises en branle depuis les indépendances. Vous savez lorsqu’après plusieurs siècles de colonisation, d’esclavage etc, le moment des indépendances aurait dû être un moment d’introspection. On devait se dire que maintenant que nous sommes libres qui voulons-nous réellement être maintenant? Je crois qu’on a raté le coche à l’époque des indépendances. Ceux qui ont remplacé les occidentaux, ils se sont juste contentés d’occuper leurs places, d’avoir les mêmes habits, les mêmes attitudes, les mêmes comportements. C’est la raison pour laquelle en 1965 lorsque le Sénégal a eu plus d’un million de tonnes d’arachides, nous étions un peu plus de 3 millions et  vous vous rendez compte presqu’en 2017, 2019 voire 2020, ce même Sénégal qui est aujourd’hui composé de presque de 16 millions d’individus peine à avoir ce même tonnage qui était disponible parce que des conditions climatiques s’y prêtaient. Cela veut dire que sur toutes ces périodes là sur un secteur aussi stratégique que l’agriculture nous n’avons pas été capables de performance. Si nous avons observé cet immobilisme sur le secteur primaire, vous pouvez donc comprendre que les enfants qui sont nés dans la fourchette de 60 à nos jours n’ont pas eu la chance de vivre dans un environnement où la formation était de qualité, orientée dans le secteur du travail et que les opportunités étaient créées pour leur permettre de pouvoir aujourd’hui se réaliser. Nous avons une économie extravertie. Nous n’avons pas une réelle prise sur les économies profondes du pays qui tournent autour de l’Agriculture, de l’élevage, de la pêche qui englobe 70% des jeunes en âge de travailler. Et qui développement, qui dit création d’emplois, si cela répond à des critères objectifs cela suppose qu’on en parle là où le besoin est et là où la réactivité de l’activité économique est (…).

Donc, vous plaidez pour le développement de la production intérieure ?

C’est la production intérieure qui fait la richesse d’un pays. Plus vous produisez sur le marché extérieur et sur le marché intérieur plus vous avez des opportunités. Si aujourd’hui on avait fait en sorte d’accompagner un secteur comme l’élevage dans la manière où le jeune puisse avoir les moyens, d’avoir un minimum d’apport technologique pour aller dans le sens du développement profond de ce qui fait son métier traditionnel et son histoire. Je pense qu’aujourd’hui du point de vue de la production de protéine animale on serait dans d’autres secteurs. Les secteurs qui absorbent presque la totalité de nos jeunes n’ont pas d’opportunités. Il n y’a pas de conserveries, il n’y en a pas d’entrepôts frigorifiés,… alors que ce sont des technologies élémentaires. Tant que nous ne rectifions pas le tir et que nous n’allons pas dans cette dynamique-là,  je ne pense pas qu’on puisse parler ici au Sénégal d’une politique d’emploi crédible.

Vous ne pensez pas donc que le Président a pris la bonne mesure ?

Sur la politique de l’emploi, je pense que nous sommes encore en train de nous tromper. Depuis les indépendances jusqu’à maintenant on a construit plus la pauvreté que des opportunités d’emplois. On a construit la pauvreté, on l’a ensuite entretenue avant de la faire évoluer. La réalité aujourd’hui et dans les enquêtes les plus récentes qu’on a sorties, la pauvreté a atteint un niveau extraordinaire dans notre pays. Les enquêtes nous ont montré que dans la banlieue de Dakar, les gens sont réduits à avoir un seul repas par jour. Et quel repas ? C’est de la bouillie de maïs sans sucre ou sucrée avec du sel. C’est une enquête qui ne date même d’un mois.

Le Président Sall a mis sur pied une politique sociale depuis qu’il est à la tête du pays. Vous êtes en train de dire qu’elle n’a pas servi à grand-chose ?

La réponse est dans la question. Malgré tout ce qui a été fait, il sent encore la nécessité d’organiser un conseil présidentiel sur l’emploi. Aujourd’hui quand un citoyen parle on ne doit pas regarder sa casquette politique mais, qu’on regarde les faits. Les faits montrent que nos enfants préfèrent abandonner la société sénégalaise pour un voyage hypothétique. La réalité nous montre aujourd’hui malgré tout ce qui a été fait, je ne critique pas les options, je pense même que la Der sous certains rapports, les bourses familiales sous certains rapports, tout ce qui est initié sous le vocable d’aide ou d’appui à la famille est intellectuellement quelque chose de positive et qui peut donner des résultats. Mais est-ce que ça a l’amplitude qu’il faut ? Est-ce que ça a atteint les cibles ? C’est des questions sur lesquelles aucune enquête n’a répondu. Et, le constat que nous faisons aujourd’hui nous montre à suffisance que ces politiques-là ne sont pas du tout porteurs de solution. Parce que le problème il est encore là. Pourquoi je suis parti de la pauvreté avant de parler de l’emploi ? C’est parce que la pauvreté est la véritable donnée pour les ménages sénégalais. Avant de proposer des schémas fast-track d’emploi sur lesquels on n’a aucune prise, je crois que le premier objectif aurait dû être soutenir la famille pour juguler la faim dans les familles.

Cheikh Moussa SARR

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