L’on se demande même comment cela est devenu possible. Les populations locales de Moussala (Sénégal) et Mahinamine (Mali) dénoncent les 600 sites installés tout au long du fleuve par les Chinois et les orpailleurs traditionnels
La Falémé est polluée par les exploitants aurifères. Le long de ce fleuve qui sert de frontière naturelle entre le Sénégal et le Mali, les trafiquants chinois et les orpailleurs traditionnels y ont élu domicile, plongeant les villages de Moussala et Mahinamine dans une détresse incroyable : l’eau n’est plus potable, les périmètres maraîchers s’assèchent. Alors que 600 sites clandestins sont recensés dans la zone.
La Falémé est devenue un désastre écologique. L’on se demande même comment cela est devenu possible. Les populations locales de Moussala (Sénégal) et Mahinamine (Mali) dénoncent les 600 sites installés tout au long du fleuve par les Chinois et les orpailleurs traditionnels. L’installation des cracheurs sur le fleuve Falémé, qui sert de frontière entre le Sénégal et le Mali, enrage les villages de Kolia, Garaboréya et Faranding, plongés dans une ambiance indescriptible. Dans un vrombissement infernal, les orpailleurs et les exploitants chinois s’activent au lavage des roches avec des cracheurs. Et les cours d’eau sont couverts de poudre détruisant, rendant leur consommation impropre.
Aujourd’hui, une bonne partie de l’eau de la Falémé est rougeâtre. Le bruit des pompes, placées dans le fleuve, résonne partout, laissant couler de l’huile dans les profondeurs de la Falémé qui est devenue très polluée. Tout est souillé. «La situation du fleuve est devenue un problème très sérieux. D’ailleurs le long du fleuve est occupé par les trafiquants, en commençant par Saenssoutou, en passant vers Faranding et Kolia jusqu’à Garaboréya et Mous¬sala.
Actuellement, l’eau est complétement polluée. Donc même les animaux ne peuvent plus boire cette eau. Les autorités sénégalaises et maliennes sont au courant. Et elles refusent de réagir», fustige Kama Dansokho, président de l’Association des jeunes de Kolia. La situation de la Falémé est devenue très préoccupante. «Tout le monde est en train de voir les dégâts qui se font dans le fleuve, mais personne ne parle. Les autorités ne font rien pour changer la situation et ne peuvent même pas organiser des discussions entre les exploitants et la jeunesse, car elles sont au courant de la présence des engins au niveau du fleuve. Les Chinois sont beaucoup plus présents à Garaboréya qu’a Kolia», dénonce Kama Dansokho, natif de Kolia. Une société minière a aussi installé une usine de pompage au bord du fleuve, derrière la montagne. «Le village de Faranding est actuellement coupé de Kolia. Pour y aller, il faut contourner et faire 20 km, alors que ce village est à 4 km de Kolia. Ce sont les dégâts de cette exploitation parce que le marigot est complètement bouché et les gens ne peuvent plus traverser. Parfois même il y a des animaux qui se noient dans le marigot. Il y a une certaine époque, la rivière permettait à nos parents de faire le maraîchage et la pêche, mais tout est désormais pollué», regrette M. Dansokho, atterré par la persistance de ce drame écologique.
Bénéficiant d’une certaine impunité, les orpailleurs chinois, maliens, sénégalais, burkinabè et guinéens sont de plus en plus nombreux dans le cercle de Kéniéba. Ils n’ont pas de permis. Pourtant, ils ont installé des machines pollueuses le long du fleuve pour laver le minerai. Ils ont des engins et utilisent des pelleteuses pour creuser des grands trous partout. Toutes ces activités sont polluantes et contaminent les produits maraîchers qui poussent au niveau de la frontière de Moussala-Mahinamine. «Ils utilisent des gros engins pour polluer tout le fleuve. Les Chinois sont nombreux chez nous. Ils ont coupé tous les arbres. Ils sillonnent les cours d’eau. Ils vivent à Kéniéba pour souiller tous les cours d’eau du Mali et le Sénégal, en passant par la Guinée. Partout sur la Falémé, vous allez retrouver les Chinois, les Burkinabè et les Maliens. Ils ont actuellement 600 sites clandestins sur toute la Falémé. Le fleuve est à sec», alerte Demba Ndiaye, vice-président de l’Association Wassaton pour la sauvegarde des cours d’eau. Elle regroupe des lanceurs d’alertes maliens, sénégalais et guinéens.
Aujourd’hui, ces exploitants «illégaux» ne résident pas sur le territoire national. Ils repartent chaque soir vers Moussala-Mahinamine dans leurs pick-up. «Les orpailleurs ne voient que de l’or. Même si le minerai est dans un arbre, ils vont le déraciner. Surtout ces Chinois, ils sont très dangereux. Ils ont des pelles mécaniques. Ils sont dans le fleuve, dans les marigots et dans l’environnent. La frontière de Moussala-Mahinamine est toute souillée par ces mauvaises pratiques. Ils n’ont aucun document. Ils sont dans l’illégalité totale», assure Demba Ndiaye, de natio¬nalité malienne, vice-président de l’Association Wassa¬ton.
Pour l’instant, les autorités de la région ne veulent pas réagir sur la question.