L’aveu Par Adama Gaye* La vérité, dit-on, sort de la bouche des enfants, elle est cependant plus crue quand elle surgit de celle d’un adulte, diminué mental, vêtu d’un boubou en mode marinière, la coiffe penchée, comme pour la féminiser, le regard loufoque, heureusement enfoui derrière des lunettes d’un mannequin raté. Ecoutez donc Cheikh Abdou Bara Dolli Mbacké, le dernier des simples d’esprits qui s’agitent sur la scène politique sénégalaise. Son aveu d’hier vaut le détour, il interpelle tous les Sénégalais. «Toute l’opposition est d’accord pour que Macky Sall soit amnistié et qu’aucune poursuite ne soit engagée à son encontre s’il renonce à se présenter à la présidentielle de l’an 2024». Au cours d’une de ces folles journées où les perles verbales, aussi génocidaires qu’ethnicistes, ont fracassé les oreilles d’un peuple toujours sous le choc de la plus violente semaine vécue, voici dix jours, dans son histoire, les propos du truculent député pouvaient ne pas participer de l’agenda setting d’une nation en quête de repères pour trouver sa voie. Nul n’a d’ailleurs semblé y prêter attention. Comme si, suivant la Russie Yeltsinienne et ses oligarques, celle du milieu des années 1990, braquée par les successeurs des membres de la nomenclature de l’ancienne Union soviétique, le Sénégal n’avait d’autre idée que d’en faire de même. C’est-à-dire de laisser ses politiciens, avec à leur tête son boucher, l’assassin Macky Sall, reconnaissable parmi tous par le sang des jeunes qui coule de tout son corps, se faire, à l’instar des dealers Russes, la courte échelle pour se partager les dépouilles du pays. Il ne resterait ensuite qu’à faire monter en première ligne les parrains, ceux que les Russes appellent désormais les Silovicki, les apparatchiks sécuritaires, espions et tueurs de tous poils, réunis autour de leur actuel Tsar, réinventé, en la personne de Vladimir Poutine, pour s’assurer que la capture du pays entre salauds et gredins ne peut plus être remise en question par qui que ce soit, surtout pas par une population dépossédée et décapacitée, décapitée, par ses pilleurs. Ce que Cheikh Abdou Bara Dolli Mbacké a déclaré est tellement grave qu’il n’est donc pas question de n’y voir qu’une banale péripétie de plus dans l’évolution, frappée au coin d’une médiocrité sans fin, cahoteuse, qui inhibe le Sénégal. La première réflexion qu’il impose, dès lors, est celle de savoir ce qu’en pensent «tous» les opposants qu’il mouille par sa formule assassine. En un mot, pour ne pas tourner autour du pot, il faudra qu’en termes aussi clairs que l’a été l’accusation du religieux d’opérettes, que tous les opposants visés par sa sortie se dédouanent publiquement, s’en lavent les mains ou l’assument. Ousmane Sonko ? Idrissa Seck ? Malick Gackou ? Aida Mbodj ? Mame Diarra Fam ? Khalifa Sall ? Abdoulaye Niane ? Abdoul Mbaye ? Mamadou Lamine Diallo ? Thierno Alassane Sall ? Cheikh Bamba Dièye ? Avancez tous, individuellement, et dites-nous, à visages découverts, si oui ou non vous êtes concernés par ce projet qui veut absoudre les méfaits de Macky Sall ? Si oui, au nom de qui le feriez-vous, qui vous a mandatés ? Qui avez- vous consulté pour prendre un tel engagement ? En quels lieux cette décision a-t-elle été prise ? Sous quels parrains ? L’affaire est sérieuse. L’immaturité et le folklorisme, signes distinctifs entre autres de ce qui se dit opposition officielle ou non du Sénégal, commande que le débat soit posé. Qu’il le soit sans détours parce qu’il ne devrait être question pour le peuple sénégalais, cible visé par les entourloupes en cours, de se laisser mener à l’abattoir sans réagir. Pas question de laisser ses braqueurs le bazarder à travers les plans, désormais dévoilés, d’une horde de d’entrepreneurs politiciens ayant moralement failli en plus d’avoir exposé au monde entier leur incapacité à sortir le pays de l’impasse la plus grave de son histoire dans laquelle il se trouve plongé. Le réveil est de l’ordre d’un mouvement de survie, pour s’extirper des griffes sanglantes, criminelles, d’un Président fraudeur, voleur et nullard, asservi à des forces externes, mais soutenu dans son entreprise de démolition de la nation par une caste de bourgeois compradores prêts à tout, y compris vendre père et mère rien que pour nager dans les eaux troubles d’un marigot politique puant à mille lieues. Ce que Cheikh Abdou Bara Dolli Mbacké a affirmé signifie que les Sénégalais accepteraient que Macky Sall, en échange d’une promesse de ne pas être candidat à la présidentielle en l’an 2024, pourrait donc s’en tirer sans écorchures, en emportant tous les bijoux de famille. Avec ses interlocuteurs, aussi crapuleux que lui, il aurait négocié le jackpot. Qui lui permettrait, sans devoir rendre compte de ses crimes, de s’en aller, en sifflotant, le cœur-léger, sourire en coin, riant du peuple berné avec l’appui de politiciens vendus, les dealogueurs de tout acabit, pour compter les milliers de milliards qu’il a soutirés d’une nation, laissée à l’abandon, perdant de son sang, quand lui se réjouit, dans sa caverne, de sa capture : des hydrocarbures aux mines, des finances aux emprises foncières, qu’il a systématiquement cambriolés, pour, ensuite, le veinard, partir se la couler douce quelque part entre Bahamas e Hawai ou Abu Dhabi, si ce n’est sur les plages de Cancun ou Copacabana. Le projet est l’ultime version raffiné du blanchiment des patrimoines africains. Son aboutissement serait le point d’orgue de la déchéance de la démocratisation politique sur le continent. Alors qu’on en attendait une meilleure gouvernance, un partage plus équitable des ressources publiques, un pacte fondé sur le mérite et la justice, l’idée est de dire à qui sait saisir le sens des magouilles que la loterie la plus gratifiante est celle de la politique. Puisqu’elle permet de voler tout ce qu’on veut puis, avec de cupides et immoraux alliés dans le landerneau, recycler le tout sous le parapluie de ce qui se dit opposition, pouvoir ou parlement, avec la bénédiction de forces socioreligieuses pareillement corrompues. Mettons donc un terme clair et sans appel à cette escroquerie émergente, la dernière étape du projet Sénégal entourloupe (PSE). C’est pourquoi, Ousmane Sonko et co doivent dire publiquement qu’ils se désolidarisent des propos de Cheikh Abdou Bara Dolli Mbacké qui les mouillent. Qui ne dit rien consent. L’amnistie dont il parle, qui va de Karim à Khalifa, est une trahison et un viol, à grande échelle, contre le peuple sénégalais. Elle est aussi grave que le discours génocidaires que des Malick Sall (élève de Dembourou Sow) et Madiambal Diagne jettent sur la poudrière sénégalaise. Nous nous opposerons, tant au Sénégal que sous n’importe quelle autre juridiction, à toute forme d’amnistie. Entre cette bande de gredins politiciens, immoraux, corrompus, et nous, la ligne de partage est on ne peut plus nette. Pendant qu’ils bidouillent dans leur coin sombre, au milieu des périls et du feu qui montent autour du Sénégal, nous sommes debout, sous l’éclat du soleil et de la clarté dont le pays a besoin pour retrouver son âme perdue, et, ensemble, chers compatriotes, nous leur disons : nous ne sommes pas dupes. Laisser proliférer les arnaques et argumentaires délictueux qu’ils concoctent, au nom d’une malvenue amnistie, reviendrait à planter le dernier clou sur le cercueil d’une nation déjà sous le genou de ses assassins. No passaran : SénégalTampi. Adama Gaye* est un exilé politique, anciennement détenu illégalement par l’Etat criminalisé du Sénégal, et l’auteur de Otage d’un Etat (Editions l’Harmattan). Comentários Escreva um comentário…
Par Adama Gaye