Encore 350 milliards à vaporiser en 3 ans !

par Dakar Matin

Le programme d’urgence de 350 milliards annoncé par le président Macky Sall, lundi dernier, pour plus de pragmatisme dans les politiques d’emplois des jeunes couvrant la période 2021- 2023 est salutaire.

Le programme d’urgence de 350 milliards annoncé par le président Macky Sall, lundi dernier, pour plus de pragmatisme dans les politiques d’emplois des jeunes couvrant la période 2021- 2023 est salutaire. Toutefois, le bon sens requiert au préalable de faire une évaluation exhaustive et sans complaisance de toutes les structures ayant été créées pour concourir à la résorption de la problématique de l’emploi des jeunes. Faute de quoi, ce sera encore des centaines de milliards dans le vent..

La question de l’emploi des jeunes et femmes reste préoccupante pour tous les Etats du monde. Mais, elle l’est davantage pour les Etats en développement ou Etats pauvres. Ce challenge est aujourd’hui aggravé par la crise de la Covid-19 qui sévit depuis plus d’un an avec des dégâts collatéraux aussi bien au plan économique que social. Cette maldonne a amené le chef de l’Etat Macky Sall à admettre lundi dernier, dans son discours d’apaisement né des développements malheureux de l’affaire Ousmane Sonko/Adji Sarr, l’inefficience des politiques d’emploi menées depuis 2012, année à laquelle il accédait à la magistrature suprême. Ceci, en réponse aux événements inédits au Sénégal, qu’il dit comprendre pour avoir tiré tous les enseignements d’une situation qui a failli mener au chaos ce pays de dialogue légendaire. Dans la foulée, le président de la République s’est empressé d’annoncer qu’il va injecter 350 milliards dans les 3 ans à venir dont 150 milliards pour la première phase couvrant la période 2021 et 200 milliards pour 2022-2023.

UN PROGRAMME DE 350 MILLIARDS NON SALUTAIRE, A DEFAUT…

Une décision qui sonne comme une réponse à la détresse de sa jeunesse qui, au-delà de la personne d’Ousmane Sonko, a fini de montrer qu’elle en a ras-le-bol. Une mesure salutaire aussi à tout point de vue puisqu’elle participe à la restauration de la paix et à la cohésion sociale, garantes de tout développement durable et harmonieux. Toutefois, n’est-il pas convenant d’évaluer tout ce qui, jusqu’ici, a été fait en matière de politiques d’emploi et d’insertion professionnelle des jeunes et des femmes, hantés par leur devenir. Le bon sens ne voudrait-il pas que les décideurs politiques fassent une évaluation objective et sans complaisance de cette énième mesure, en cernant toute la problématique aux fins d’éviter de tomber dans les travers, par des solutions pragmatiques.

En 2016, Seydou Guèye, porte-parole du gouvernement de Mahammed Boun Abdallah Dionne, avait dit qu’entre 2012 et 2016, quelques 234 260 emplois hors secteur agricole, hors d’autres domaines de création d’emploi et d’activités, ont été créés. Il reconnaissait également que les problèmes subsistent encore au regard des statistiques montrant que plus de 62% des jeunes ont entre 15 et 35 ans. Donc, plus de la moitié de la population est jeune. Les mêmes études indiquaient un taux de chômage alarmant du côté des demandeurs d’emploi qui n’ont pas de formation et pas de diplômes. Conscientes de tout cela, les politiques d’emplois pilotées par les différents gouvernements n’ont pas atteint leurs visées. Aujourd’hui, il est donc important qu’on sache quelles structures devront gérer, à défaut d’une seule, ces 350 milliards annoncés pour les années à venir ?

Va-ton maintenir toutes les agences, les structures de création ou de promotion de l’emploi pour créer encore des doublons ou alors centraliser toutes ces structures comme le Fonds monétaire international (Fmi) ne cesse de le recommander à l’Etat du Sénégal, depuis la gouvernance du président Abdoulaye Wade jusqu’à ce jour ? En effet, depuis le déclenchement de la crise de l’emploi des femmes, et jeunes diplômés en 2000, le Sénégal s’est résolu à y faire face à partir des ressources propres mais également et surtout par l’engagement de ses partenaires, notamment l’Union européenne (Ue).

DER, ANPEJ, ANAMA, FNPJ… DES AGENCES A COUP DE MILLIARDS SANS EFFETS REELS

 Les politiques d’emploi et de formation ont été exécutées à travers la création d’agences et de fonds pour la promotion de l’emploi des jeunes qui s’est véritablement accrue à partir de 2005 avec entre autres la Direction de l’emploi, l’Agence nationale pour l’emploi des jeunes (Anej), l’Agence pour l’emploi des jeunes des banlieues (Ajeb), l’Agence nationale d’appui aux marchands ambulants (Anama), le Fonds national de promotion de la jeunesse (Fnpj), la Délégation à l’entreprenariat rapide (Der). Toutes ces structures et organes ont englouti des centaines de milliards de francs CFA sans un impact réel sur le but recherché. Cette non-efficience a conduit le président Macky Sall à partir de janvier 2014, à la création de l’Agence nationale pour la promotion de l’emploi des jeunes (Anpej) qui a fusionné entre autres l’Anej, l’Ajeb, l’Anama et le Fnpj. Cette décision reposait sur le besoin de rationalisation et de coordination des actions en faveur de l’emploi.

En plus de ces acteurs directs, il y a des intervenants qui agissent indirectement sur la politique d’emploi comme l’Agence de développement et d’encadrement des petites et moyennes entreprises (Adepme), l’Agence nationale pour la promotion des investissements et des grands travaux (Apix), l’Agence d’exécution des travaux d’intérêt public (Agetip), l’Agence nationale d’insertion et de développement agricole (Anida) et l’Agence pour la promotion et le développement de l’artisanat (Apda). Il en est de même pour le Fonds de financement de la formation professionnelle et technique (3Fpt). Autant de structures dont l’efficacité pose aujourd’hui problème, du fait du mal-être et du mal vivre des jeunes qui se sont exprimés durant les manifestations violentes qu’a connues le Sénégal, ces derniers temps-ci.

A charge maintenant pour les décideurs, en premier le chef de l’Etat, de décortiquer le message et de s’atteler à une réponse idoine qui permet de viabiliser le programme d’urgence de 350 milliards, annoncé pour résorber la crise de l’emploi et de la formation parmi la frange jeune.

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