L’actualité sociopolitique de ces derniers jours est marquée au Sénégal par des manifestations violentes dans la quasi-totalité des régions du pays ayant causé des pertes en vies humaines et la destruction de biens publics et privés. L’économie nationale, déjà éprouvée par la pandémie de la COVID dont les principales victimes sont les couches sociales défavorisées, en particulier la jeunesse, s’en trouve davantage fragilisée. Si le fait déclencheur reste l’arrestation du député et Président du parti PASTEF, accusé de viol, ces événements ont révélé la précarité économique des populations en général, l’inefficacité des politiques d’insertion des jeunes en particulier, mais aussi et surtout la crise de la démocratie et de l’Etat de droit.
En effet, le déficit de confiance dans l’institution judiciaire soupçonnée d’être souvent instrumentalisée par l’Exécutif à des fins politiques n’est pas de nature à favoriser une administration sereine de la justice, notamment lorsque le mis en cause est un opposant. Le sentiment d’une justice à deux vitesses, à tort ou à raison, est fort malheureusement présent dans les représentations collectives. C’est ce qu’illustrent en partie les péripéties de la convocation et de l’arrestation du Président du PASTEF. La célérité avec laquelle cette affaire a été traitée conforte chez nombre d’observateurs le sentiment d’une justice téléguidée dans la perspective d’un troisième mandat prêté au Président Macky Sall. Mais, que ces perceptions soient fondées ou pas, elles sont en passe d’entraîner le Sénégal dans une instabilité politique majeure, et pire encore dans la remise en question de la cohésion sociale, voire nationale.
Le Gorée Institute déplore vivement les pertes en vies humaines et présente à la nation sénégalaise toute entière, aux familles éplorées en particulier, ses sincères condoléances et prie pour le repos de l’âme des morts.
Le Gorée Institute invite les différents acteurs au dépassement pour s’attaquer aux véritables urgences de l’heure, notamment la crise sanitaire née de la COVID avec ses implications sur la vie quotidienne des populations. Le respect de chaque individu, des droits de l’homme et de la démocratie doit être au cœur de cette bataille.
Dans cette perspective, le Gorée Institute recommande
À l’Etat de :Garantir le règlement de l’affaire opposant le député Ousmane Sonko et la plaignante Adji Rabi Sarr conformément aux standards d’une justice indépendante
Réformer la justice pour renforcer son indépendance conformément aux standards internationaux en la matière
Garantir le droit à une presse plurielle et libre qui demeure un principe constitutionnel
Renforcer la formation professionnelle et l’insertion des jeunes
Mettre la voix des jeunes au cœur des politiques publiques
Mener des enquêtes crédibles et indépendantes sur les circonstances des personnes décédées au cours des manifestations
Mener une enquête sur la présence d’individus non identifiés ou nervis comme faisant partie des forces de l’ordre au cours de manifestations
Libérer tous les citoyens arrêtés sans motif valablement exprimé
Jeter les bases d’un dialogue inclusif avec comme finalité une synergie d’action pour consolider la paix et la stabilité, en définitive l’impulsion du développement du Sénégal.
Aux acteurs et partis politiques de :
Respecter les règles et valeurs fondatrices de la démocratie et de l’Etat de droit
Renforcer l’éducation civique des militants
Aux acteurs de la société civile de :
-Faire bloc pour la protection et l’élargissement de l’espace civique, de l’État de droit et des libertés fondamentales
Entreprendre des actions de promotion d’une citoyenneté active pour une meilleure gestion du projet démocratique souvent captif de l’insatiabilité des politiques.