Ousmane Sonko qui était jeudi à l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, officiellement pour rendre visite à des étudiants blessés lors des manifestations qui ont suivi sa convocation, a bien mesuré la portée de sa démarche. Officieusement, cette “improvisation bien préparée” était une manière de mesurer sa popularité dans ce temple du savoir. Manifestement, il a bien réussi son coup même si l’on peut dénoncer les rassemblements irresponsables en pleine pandémie de Covid-19.
Si les étudiants qui s’étaient massés, criant à tue-tête son nom, sont de Pastef, comme semblent le dire ses détracteurs, il peut se targuer d’avoir une bonne représentativité à l’Ucad. Ce qui est d’une grande importance pour une jeune formation politique qui n’a, à son actif, que des législatives et une présidentielle.
Si ces étudiants qui ne seraient d’aucune chapelle sont spontanément sortis pour acclamer un leader politique accusé gravement de viols et menaces de mort, c’est un signe symbolique à décrypter. Si on ne peut pas qualifier ces jeunes de naïfs, leurs actes peuvent être analysés comme un rejet d’une politique, d’une manière de gérer la cité dénoncée ailleurs. L’université a été toujours un espace de contestations souvent violentes.
Sonko y va, sans nul doute, pour avoir le soutien de cette “immense force inemployée”, pour reprendre le mot de François Mauriac. A la guerre comme à la guerre. Les étudiants du pouvoir, apparemment pris au dépourvu, menacent et comptent “faire face” la prochaine fois. Le coup est déjà parti ? Sur les traces du serpent. Le Gouverneur de Dakar lui aussi veut la paix. Il prépare sérieusement la guerre. En interdisant, pour un mois, la vente de carburant“ en détails”, il veut parer à toutes les éventualités susceptibles de “mettre du feu”.
Ne soyons pas surpris si on déclenche dans les prochaines heures une opération “ramassage de pneus d’occasion ou abîmés”. On assiste déjà à une opération de “traque aux brûleurs” ou futurs leaders de manifestations. Se prépare-t-on à une arrestation de Ousmane Sonko après la levée de son immunité parlementaire ? Tout porte à le croire. Le cas échéant, l’État veut être prêt pour une confrontation avec les soutiens de Sonko qui ne sont pas négligeables.
Des pas de géants vers une escalade de tous les dangers. Un combat à mort qui risque d’avoir des dégâts collatéraux énormes. Le pouvoir si géant, si puissant, peut bien gagner devant Sonko. Mais il pourrait y laisser des ailes. Il pourrait être affaibli par un combat à plusieurs incertitudes dans un contexte de crises multiformes. Une certitude: le pays en perd. En énergie et en temps.
Miim Reew