Covid: L’acquisition de vaccins en Afrique retardée par l’égoïsme des grandes puissances

par pierre Dieme

Pendant que certaines franges de la population en Afrique versent dans des débats stériles sur les vaccins contre la Codiv-19, au niveau des hautes sphères des Etats, on se préoccupe.

La raison principale tient au fait que certaines grandes puissances font des commandes excédentaires de vaccins dans le souci de les conserver, selon le principe de précaution.

Après l’Organisation mondiale de la santé (Oms) qui a alerté sur cet état de fait, demandant à ces gouvernements d’éviter ces pratiques et de verser l’excédent dans l’initiative Covax, le Président sud-africain Cyril Ramophosa est sorti de ses gonds pour tirer la sonnette d’alarme.

Invité du Forum économique mondial de Davos, il a dénoncé ces pratiques d’un autre siècle symptomatique des relations difficiles entre Etats et révélatrices surtout de l’égoïsme des grandes puissances guidées par le souci de toujours préserver leurs intérêts.

Après les excédents agricoles parfois brûlés alors que l’on meurt de faim dans de nombreux autres pays du globe, voilà l’excédent de vaccins que l’on commande parce que l’on en a les moyens.

On crée ainsi un déficit artificiel parce que toute la production des laboratoires actuellement autorisés à en produire risque d’être systématiquement absorbée.

Pendant ce temps, des pays comme l’Afrique du Sud, la Côte d’Ivoire et bien d’autres, ont dû revoir leurs protocoles vaccinaux avec retard dans l’acquisition des vaccins.

Car, si la demande est trop forte, les pays faibles seront naturellement les moins servis pendant que de nombreuses doses de vaccins attendent d’être utilisées.

Or, selon les prévisions, le dispositif Covax ne permet de vacciner que 20% des africains. Très peu au regard du regain de contaminations observé partout et surtout du taux de létalité qui ne cesse de grimper.

Le Sénégal, par exemple, a franchi la barre des 600 décès de Covid-19 alors qu’en Afrique du sud, on en est à 41 mille décès pour ne citer que ces deux exemples.

Or, à l’état actuel des choses, nous ne pouvons qu’attendre que les commandes faites par les pays africains soient satisfaites. Ce qui sera loin d’être facile pour les raisons évoquées plus haut.

Or, si cette situation perdure, il faudra s’attendre à beaucoup plus de cas de contamination dans le continent et à beaucoup plus de décès. Ce qui serait dommage.

C’est pourquoi, au niveau de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao), on veut prendre les devants afin de rationaliser la démarche par une mutualisation des efforts.

Ainsi, les chefs d’Etats ont instruit la Commission de la CEDEAO et l’Organisation ouest-africaine de la santé (OOAS), en collaboration avec les États membres, de conduire le processus d’approvisionnement de 240 millions de doses de vaccins.

Car, la Cedeao a opté pour une approche d’achat groupé des vaccins anti-Covid en travaillant, à

‘’mettre en place un fonds renouvelable pour les vaccins, et lance un appel aux gouvernements nationaux, aux banques de développement, au secteur privé et aux partenaires à y contribuer. Ce fonds servira à garantir la disponibilité des vaccins anti-Covid dans la région, par un approvisionnement commun à court terme et une fabrication régionale à moyen et long terme’’.

Les Chefs d’Etat qui se sont réunis tout récemment, ont décidé de ne pas croiser les bras et de travailler désormais à faciliter le ravitaillement et même la fabrication de vaccins.

Une initiative louable mais qui risque, elle aussi, de se heurter à l’égoïsme de nos Etats même qui, comme on l’a constaté, privilégient les approches nationales pour ne pas dire nationalistes.

En effet, non seulement le fonds de la Cedeao n’est pas encore alimenté, mais le retard observé dans la prise de cette décision n’encourage pas les Etats à compter sur l’institution sous-régionale.

Qui plus est, face au sauve-qui-peut, les Etats qui contournent l’Oms dans le cadre de Covax ne vont pas hésiter à le faire pour la Cedeao même si la démarche des Chefs d’Etat est à saluer.

Il est important cependant, que, dorénavant, l’Afrique apprenne à compter sur elle-même dans toutes les batailles où elle se trouve confronté en mutualisant ses efforts.

Assane Samb

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