Décrété le 6 janvier dernier, l’état d’urgence assorti d’un couvre-feu de 21 à 5 heures du matin, est prolongé de huit jours. La mesure, qui n’a pas été élargie, concerne toujours les seules régions de Dakar et Thiès. Le ministre de l’Intérieur et de la Sécurité publique.
Le Ministre de l’Intérieur Antoine-Félix Dione a accordé une interview à la RTS 1 hier à 20 heures pour s’expliquer sur l’état d’urgence et le couvre-feu qui, pour certains, devraient prendre fin ce dimanche à minuit.
Le Ministre a tenu à expliquer qu’il y a eu méprise parce que le décret présidentiel en la matière est entré en vigueur le 07 janvier et que donc, c’est ce lundi à minuit que l’état d’urgence et le couvre-feu prenait fin.
Il a aussi expliqué qu’en attendant l’entrée en vigueur des nouvelles dispositions de la loi révisée de 1969 portant sur les catastrophes naturelles et les urgences sanitaires, les gouverneurs de Dakar et de Thiès vont prendre des arrêtés pour une durée de 8 jours afin de faire maintenir les restrictions de liberté déjà en vigueur.
Il fonde cette possibilité sur un décret qui date de 1972 lequel permet à ces autorités administratives de prendre des mesures restrictives de liberté dans leurs zones de compétence.
Le problème, c’est que nous sommes dans le cadre de l’application de la loi de 1969 laquelle reste encore en vigueur jusqu’à la promulgation de la nouvelle loi et surtout sa publication au journal officiel.
Même si le Ministre annonce que la promulgation sera faite ce mardi, il va de soi qu’aucune loi ne saurait être applicable tant qu’elle n’est pas publiée au Journal officiel (JO).
Ce qui veut dire que les nouvelles dispositions votées à l’Assemblée nationale ne seront pas, pour le moment, applicables. Et ce qui fait que le Ministre fait appel à ce décret de 1972.
Bien sûr, il s’agit du Décret N°72-632 du 29 Mai 1972 sur laquelle nous avons jeté un coup d’œil pour y voir plus clair.
Il est mentionné dans son article premier qu’ ‘’il (le Gouverneur) peut prendre, s’il y a urgence, toute mesure conservatoire conforme aux lois et règlements afin que ne soit pas compromise l’exécution de la politique gouvernementale…’’.
En son article 10, il est mentionné que ‘’Le Gouverneur est responsable des mesures d’ensemble du maintien de l’ordre et du rétablissement de l’ordre dans les régions’’.
Il est clair, donc, que ce décret donne aux gouverneurs des pouvoirs importants de police, c’est-à-dire de maintien de l’ordre. Et c’est ce à quoi fait naturellement allusion le Ministre de l’Intérieur.
Mais, ce décret a bien pris le soin de préciser que ces décisions doivent être ‘’conformes à la loi et aux règlements’’.
Or, en l’espèce, le décret sur l’état d’urgence et le couvre-feu prend fin ce lundi sans que les nouvelles dispositions de la loi de 69 n’entrent en vigueur.
En clair, il apparait clairement qu’il y a une forme de cafouillage juridique, dicté par les circonstances.
Le Président de la République n’a pas voulu, manifestement, attendre la promulgation et la publication dans le JO des nouvelles dispositions de la loi avant de prendre de nouvelles mesures au risque de sembler incohérent.
Cependant, il aurait pu, simplement, saisir l’Assemblée nationale qui, dans une session spéciale, lui aurait évité ce cafouillage. Exactement comme lors de la première vague.
Malheureusement, c’est ce qu’il n’a pas voulu faire.
Les autorités ont, sous recommandation du Comité national de lutte contre les épidémies et sans doute dans le souci de bien faire, convoqué le décret de 1972 tout en sachant pertinemment que les pouvoirs de police des autorités administratives entrent dans le cadre strict du respect des lois et des règlements.
Bien sûr, dans quelques jours, Macky va prendre obligatoirement un autre décret lorsque la loi de 1969 aurait été applicable. Mais, en attendant, nous sommes en pleine violation de la loi. Donc, dans l’illégalité.
Mais, c’est sans doute, pour la bonne cause ! Même si Dakar et Thiès sont loin d’être les seules régions où la situation de la propagation du virus est inquiétante.
Assane Samb