C’est aujourd’hui, à 10 heures, en plénière, que l’Assemblée nationale, va examiner, le projet la loi n°46/2020 modifiant la loi n°69-29 du 29 avril 1969 liée à l’état d’urgence et à l’état de siège.
En clair, les députés vont voir s’ils vont répondre favorablement à la requête du Président Sall qui souhaite, désormais, se passer de l’autorisation de l’Assemblée nationale pour décréter ou proroger l’état d’urgence ou l’état de siège.
Bien sûr, dans la nouvelle mouture, il sera question du rajout des précisions liées à la catastrophe naturelle ou à l’état de pandémie, mais, le gros du travail sera simplement, de contourner l’Assemblée nationale.
Et au regard de l’existence de la majorité mécanique mais surtout du ‘’vote impératif’’ qui fait que les instructions sur le vote passent de l’Exécutif aux députés par le truchement du Président du groupe parlementaire, il ne fait pas de doute que la loi sera votée.
Car, les agissements, réserves et gesticulations des députés de l’opposition ou des non-alignés n’y pourront rien. Ça toujours été comme ça. Et il n’y a aucune raison que cela change.
Une façon, nette et claire, de dessaisir l’Assemblée d’un moyen important, de contrôle de l’action publique. En clair, l’Assemblée va s’auto-affaiblir au profit du Président de la République qui va ainsi concentrer davantage de pouvoirs entre ses mains.
Cependant, et cela est à la portée des députés, de tous bords, la loi n°46/2020 doit être amendée.
Elle ne peut pas passer sans que les députés, faute de pouvoir la bloquer, y apporter des garde-fous.
Le premier est d’éviter justement que les états visés, exceptionnels, perdurent. Un mois renouvelable, c’est trop, à notre sens. Il faudra penser à réduire le délai à 15 jours renouvelables une fois. Ce qui fait un total d’un mois au lieu de deux.
Le second, c’est y apporter l’avis d’experts notamment pour les pandémies. Le président de la République n’étant pas un expert en matière de santé, il est important que sa décision soit fondée sur l’avis favorable d’un comité d’expert désigné à l’avance.
Ce garde-fou permettra, sans doute, d’éviter des atermoiements et abus préjudiciables à tous.
Il est, dans tous les cas, dommage, de se passer du tamis ou verrou de l’Assemblée nationale. La loi, dans son état antérieur, ne freinait en rien l’action publique. La preuve, durant la première vague de la pandémie, les choses ont fonctionné correctement. L’état d’urgence, prorogé par le biais parlementaire, a pu être observé dans les délais.
On peut se demander, alors, ce qui pousse Macky, à chercher, ainsi, à renforcer ses pouvoirs ?
Il est le seul à pouvoir répondre à cette interrogation. Mais, on peut s’interroger et nourrir des craintes sur le fait que les états d’urgence et de siège sont des situations exceptionnelles.
C’est dire que, pour être déclenchées, ils doivent être nécessaires, proportionnels et surtout circonscrits dans le temps du fait, surtout du caractère terriblement désobligeant qu’ils charrient.
Car, pour l’état d’urgence, les pouvoirs de police seront élargis, les autorités administratives peuvent restreindre les libertés, procéder à des perquisitions, faire des assignations à résidence, interdire des rassemblements, etc.
Et pour l’état de siège, la situation est plus grave encore : la constitution sera suspendue, la loi martiale va s’appliquer avec des tribunaux militaires, etc.
Donc, pour des situations aussi graves et attentatoires aux libertés publiques, ce serait maladroit de les laisser entre les mains d’un seul individu qui apprécie de l’opportunité.
Surtout que, de par son passé, il avait versé dans de l’autoritarisme à l’égard de certains de ses concitoyens notamment ceux qui aspirent à diriger le pays et certains de ses partisans qui ont osé prendre des positions divergentes.
C’est pourquoi, nous rappelons à la représentation parlementaire, que la démocratie ne fonctionne que grâce à l’équilibre des pouvoirs, celui-là qui fait que, par la disposition des choses, le pouvoir arrête le pouvoir.
Assane Samb