Jusqu’en 2016, Ousmane Sonko n’était qu’un jeune anonyme Inspecteur des Impôts et Domaines. Mais, 4 ans plus tard, il est devenu le leader incontestable de l’opposition grâce à son « agent marketing » Macky Sall, président de la République …
Ses sévères critiques contre Macky Sall et son clan avaient poussé le chef de l’Etat dans ce qu’on pourrait considérer comme un accès de colère, à le radier de la Direction générale des Impôts et Domaines en août 2016. Le prétexte pour le moins fallacieux reposait sur un «manquement au devoir de réserve». Une radiation qui a réveillé ses ambitions politiques et sa détermination à lutter pour « chasser Macky Sall du palais présidentiel et remettre le pays sur le bon chemin ».
Ainsi, le jeune cadre des Impôts et Domaines décide de se jeter sur la scène politique sénégalaise. Il crée en 2014 le parti politique Pastef avant d’être élu député à l’Assemblée nationale du Sénégal aux élections législatives de 2017. Conscient que sa stratégie est payante, Ousmane Sonko multiplie les révélations et les attaques contre le « Macky ». Chacune de ses sorties est suivie de réactions hostiles de la part des responsables de l’Alliance pour la République (APR), le parti de Macky Sall, et de leurs alliés de «Benno Bokk Yaakar».
Ahmed Khalifa Niasse, un des alliés de Macky, avait été envoyé au charbon pour traiter Ousmane Sonko de Salafiste. Le porte-parole du gouvernement d’alors, Seydou Guèye, n’avait pas raté l’occasion de rebondir sur les propos d’Ahmed Khalifa Niasse. L’alors premier vice-président du parlement, Moustapha Cissé Lô, n’avait pas aussi hésité à user de gros mots quand il s’agit de parler du leader du «Pastef».
Des sorties qui faisaient la promotion de l’opposant Ousmane Sonko en qui Macky, son gouvernement et ses alliés, semblent avoir une peur bleue tant leurs réactions après chaque sortie du leader du Pastef paraissent incontrôlées.
Et Macky créa « 125 millions » de sympathie à Sonko…
En un laps de temps, Ousmane Sonko est devenu l’un des acteurs les mieux cotés à la Bourse politique du Sénégal. Ses sorties font l’objet de réactions à tous les niveaux, les unes très laudatives à son endroit, les autres plus que virulentes à son encontre. Ce qui lui a valu une notoriété à la vitesse d’un TGV. En l’espace de 4 ans, le leader des Patriotes du Sénégal pour le travail, l’éthique et la fraternité (Pastef) est devenu une personnalité très en vue.
Macky Sall ne semble pas apprendre de ses erreurs passées. De jour en jour, il fait bénéficier Ousmane Sonko de la sympathie de la majorité des Sénégalais. Le samedi dernier encore, Macky Sall, par le biais de son ministre de l’Intérieur, menace de dissoudre le parti de Ousmane Sonko qui a réussi la prouesse de collecter plus de 125 millions de francs Cfa et 80 millions de promesses de dons en seulement quelques heures.
« Tout parti politique qui reçoit des subsides de l’étranger ou d’étrangers établis au Sénégal s’expose à la dissolution », menace Antoine Felix Diome. Une « intimidation » qui a encore augmenté l’aura dont Ousmane Sonko bénéficiait déjà sur le plan national et dans la diaspora. Car, depuis la sortie de ce communiqué les réactions fussent de partout. Que cela soit au niveau des grand’places, dans les télés, les sites et les journaux, l’on ne parle que de cette énième bourde de Macky Sall et de son gouvernement pour neutraliser un adversaire qui ne cesse de se poser en leader. Même ceux qui ne sont pas du même bord politique que Sonko se mettent à ses côtés et tirent sur Macky Sall et son gouvernement.
Le professeur Moussa Diaw est du même avis. À en croire l’enseignant chercheur en politique à l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, Macky Sall et son clan contribuent involontairement à faire la promotion de Ousmane Sonko en s’attaquant à lui, le considérant comme le principal opposant actif contre leur gouvernance. « En s’acharnant sur lui, ils le renforcent auprès de l’opinion publique et crédibilise son discours. Sonko apparaît comme un acteur prépondérant de l’espace politique, et vouloir l’éliminer par des procédés peu orthodoxes, risque d’être contreproductif au regard de son capital de sympathie auprès des populations. Il en résulterait des tensions politiques au moment où les efforts sont à déployer pour faire face à cette deuxième vague de la covid-19 », soutient Moussa Diaw.
PR MOUSSA DIAw : «Macky pouvait éviter cet agissement qui crée un débat non prioritaire »
Pourtant Macky Sall et son clan pouvaient bien éviter cet agissement contre Sonko qui va créer un débat non prioritaire, si l’on en croit le professeur Moussa Diaw. Pour ce faire, il faut procéder sans attendre à des réformes sur les partis politiques et de leur financement afin de régler cette question plutôt que de chercher à l’instrumentaliser à des fins politiques. Cette velléité pourrait, pense-t-il, engendrer des situations incontrôlables « si elle correspond à une stratégie de «neutralisation» d’un opposant gênant par ses invectives politiques et les attaques centrées sur la gouvernance de la majorité. »
À la question de savoir comment Macky devrait s’y atteler pour éviter de créer une dualité entre lui et Ousmane Sonko ? L’enseignant chercheur à l’UGB pense que tout reste dans les débats d’idées et des propositions concrètes allant dans le sens de convaincre les citoyens d’une bonne gouvernance et des politiques publiques conformes aux attentes ou aspirations des populations. « La communication judicieuse et des arguments solidement ancrés dans des offres programmatiques représentent des voies à privilégier dans la compétition politique au sein d’une démocratie à revitaliser », pense en conclusion le professeur Moussa Diaw.
Par cette méthode, si Macky Sall pense neutraliser un adversaire insaisissable, il est encore en train de s’aventurer dangereusement contre Ousmane Sonko et son parti. Ses conseillers et « amis » de Benno Bokk Yaakar risqueraient de le conduire avant même 2024 au bûcher…
Le Témoin