Apr : un parti météore

par Dakar Matin

Selon le Larousse, «météore» au figuré signifie «personne ou chose qui brille d’un éclat vif, mais passager». Il me semble que c’est la meilleure définition pour camper le parti de Macky Sall. L’Alliance pour la République qui souffle sa douzième bougie, dont huit au pouvoir, est un parti météore. Quatre ans pour conquérir un pouvoir que Wade et le Pds ont eu après 26 années d’une très longue marche et dont rêve Idrissa Seck depuis 20 ans est un vrai mirage pour toutes les gauches depuis 1968. Quatre ans dans l’opposition et au pouvoir depuis 8 ans. Un éclat aussi vif ne peut être que passager, parce que Macky Sall ne peut être que de passage au pouvoir, et au Sénégal les partis politiques ne sont que des instruments pour concrétiser l’ambition d’un homme. C’est pourquoi ils survivent difficilement à leur fondateur ou à la perte du pouvoir. L’avenir de l’Apr est le présent du Pds après la perte du pouvoir, c’est-à-dire querelles de légitimité et fragmentations autour d’ambitions personnelles. Ce qui est inévitable parce que les partis ne sont pas bâtis autour d’idées, mais pour concrétiser l’ambition d’un homme.
Ainsi, le Pds a atteint son horizon indépassable quand Wade est arrivé au pouvoir. Le déclin du Ps est inexorable depuis la perte du pouvoir, car le parti de Senghor a choisi la mort lente dans le confort politique du compagnonnage de route. La volonté de Macky Sall de ne pas structurer le parti qui a été une grande force et qui a permis de gagner tant d’élections va être la principale faiblesse en fin de mandat et dans l’après-Macky Sall, et le fait d’avoir coupé la tête des généraux politiques comme lors du dernier remaniement n’y fera rien. Un météore se consume pour éclairer. C’est pourquoi son éclat vif est forcément passager. C’est dialectique. C’est comme le corona chez nous. Pendant qu’on attendait le pic, on avait déjà atteint l’immunité collective ou croisée sans s’en rendre compte. L’Apr a atteint le pic ou son apogée avec la réélection de Macky Sall en 2019. Après Macky Sall, il rejoindra le Ps et le Pds au rang des partis historiques.
Le Ps est un parti historique parce que c’est le parti qui nous a donné notre bien le plus précieux : l’Etat. Cet Etat qui fait si souvent défaut en Afrique. Le Pds est historique parce que c’est l’un des piliers de l’exception sénégalaise, avec la décision de Wade d’opter pour une opposition légale au temps des guérillas et des coups d’Etat. Le Pds est aussi le parti de la conquête des libertés politiques et de l’ouverture démocratique. D’ailleurs, notre Code électoral n’est rien d’autre qu’un résumé des 26 ans de lutte de Wade pour plus d’ouverture et de transparence électorale. J’ai toujours pensé que l’ancien siège du Pds à Colobane devait être classé bâtiment historique, car ce vieil immeuble incarne la longue marche politique vers l’alternance. L’Apr est déjà dans l’histoire pour avoir été un parti météore en prenant le péage pour arriver au pouvoir. C’est une entrée fulgurante. Macky Sall ne veut pas que son parti reste dans l’histoire par une sortie aussi fulgurante que son entrée. Il a la hantise du syndrome du météore. S’il réussit à conjurer ce syndrome (se faire remplacer par un membre de son parti à la tête de l’Etat), il réussira une prouesse historique, car la seule fois que nous l’avons eu, c’était entre Diouf et Senghor grâce à l’article 80, un yakale politique qui a permis à Diouf de devenir Président sans passer par les urnes. C’est la Côte d’Ivoire qui en est à l’ère de l’art. 80. Pour le Sénégal, le dauphin est un anachronisme politique qui n’a réussi qu’à Abdou Diouf, parce que Senghor a contourné les urnes.

SOURCE YORO DIA

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