Le discours du Président français Emmanuel Macron sur l’Islam a occasionné une levée de boucliers dans le monde musulman. Beaucoup d’adeptes de cette religion se sont sentis heurtés par un discours qui a fait beaucoup d’amalgames.
Macron a procédé à un glissement sémantique du point de vue de la perception du fondamentalisme islamique et à des amalgames qui n’ont pas manqué de rendre son discours ambiguë
Ainsi, du fondamentalisme musulman, on est passé à un autre concept, le ‘’séparatisme islamique’’. Si l’extrémisme ne concerne qu’une minorité de musulmans, le séparatisme, lui, englobe beaucoup plus d’adeptes de cette religion. Macron a ainsi indexé tous ceux qui portent le voile, éduquent leurs enfants selon les croyances de leur religion, ne serrent pas la main d’une femme en public, etc.
En somme, il a poussé le bouchon trrop haut dans le souci de faire plaisir à une opinion publique heurtée, à juste titre, par l’assassinat du Professeur Samuel Paty.
Il n’a sans doute pas pris conscience du fait qu’il a pratiquement interprété tous les signes religieux islamiques et le mode de vie des musulmans comme des actes hostiles à la République française.
Or, il oublie que toutes les religions du monde utilisent, publiquement, des signes distinctifs qui les caractérisent. Et ce n’est guère difficile de s’en rendre compte.
Donc, pourquoi cette stigmatisation de l’Islam ? Eh bien parce que cette religion dérange. Elle l’est non pas seulement parce que certaines minorités tuent au nom de Dieu et utilisent l’Islam. Des gens qui sont justement à combattre parce que leurs actes sont en porte à faux avec ce à quoi l’écrasante majorité des musulmans croient. L’Islam est avant tout une religion de paix. Et dans son essence fondamentale, elle interdit qu’un innocent soit tué et assimile cela comme le fait de tuer toute l’humanité.
Mais, l’Islam dérange surtout parce qu’elle n’est pas comprise par d’autres qui la perçoivent beaucoup plus comme un mode d’être, de vie qu’une foi.
L’Occident, chrétien ou qui se dit tel, se croit toujours dans une forme de confrontation avec d’autres manières de voir le monde. Et l’islam, avec le nombre de ses adeptes, son rayonnement mondial, fait peur à ce propos.
Macron vient de le prouver encore une fois. Bien sûr, il a voulu frapper les esprits, affirmer les principes de laïcité à la française, mettre des garde-fous. Et tout cela est normal. Car, personne ne cautionne justement que des innocents soient tués au nom d’une religion.
Mais, on ne répond pas à l’extrémisme par une autre forme d’extrémisme. Or, le discours du Président français a été marqué par une forte empreinte d’intolérance, de terrorisme verbal. Il n’est pas du tout cohérent et renvoie à une forme d’incompréhension et surtout d’intolérance des autres.
Car, après tous, les français savent que la liberté a des limites. Qu’au nom de celle-ci, on ne peut pas tout faire et tout dire. L’autocensure est importante pour ceux qui dirigent les Etats, les organes de presse et ceux qui assurent l’éducation des enfants. Il y a des limites que l’on doit se réserver de franchir, même si la loi le permet du fait du caractère général et impersonnel des textes.
En clair, une République n’est pas aveugle. Elle se veut intelligente, ouverte même si elle doit rester forte et ferme. A ce propos, point besoin de corser les lois en France. L’arsenal juridique et répressif permet de punir tout écart. Alors, inutile d’en rajouter, juste pour punir une catégorie de personnes. Parce que, dans ce cas, la loi cesse d’être impersonnelle et générale. Elle devient une loi taillée sur mesure.
Or, cette démarche, adoptée par d’autres gouvernements, ailleurs, alimente justement le fondamentalisme. Si les Etats continuent à encourager et à développer le repli identitaire au lieu de le combattre, exactement comme semble le faire Macron, nous ne sommes pas sûrs que l’extrémisme religieux va disparaitre de sitôt.
Ce phénomène, insidieux, sournois, est complexe et mérité justement de le comprendre pour le combattre. Or, notre conviction reste que l’Occident a utilisé largement son rayonnement économique, technologique et intellectuel au profit d’une forme d’arrogance institutionnelle face à laquelle, le fondamentalisme semble être, pour certains, une forme de réponse.
Sans justifier l’injustifiable, il apparait clairement qu’un monde plus juste, respectueux des droits de tous et de leurs différences dans un élan solidaire aurait beaucoup aidé à aplanir les incompréhensions qui se creusent aujourd’hui davantage.
La preuve, un homme de la trempe d’Erdogan, Président de la Turquie, a cru devoir se radicaliser contre la France…
Assane Samb