Le rapport dressé par les États-Unis d’Amérique sur le climat des affaires au Sénégal, notamment sur la corruption, la Justice et autres, risque de ne pas trop plaire aux autorités sénégalaises.
Pour baliser le terrain à leurs chefs d’entreprises voulant investir ailleurs dans le monde, chaque année, le département d’Etat américain passe au scanner le climat des affaires dans les pays où il a une représentation diplomatique. Les fruits de leurs investigations sont consignés dans le rapport annuel intitulé «Investment Climate Statements». Et pour notre pays, ils ont dressé un diagnostic sans complaisance.
Sur la corruption, le département d’Etat américain a rappelé, dans son document, la mise en place de l’Ofnac dont l’objet est de faire appliquer les lois anti-corruption. Il rappelle qu’une loi sur la déclaration de patrimoine a aussi été mise en place par les autorités du pays et «l’administration actuelle a lancé des enquêtes de corruption contre plusieurs fonctionnaires (principalement les rivaux politiques du président) et a obtenu des condamnations.» L’Etat a également pris des «mesures pour accroître la transparence budgétaire conformément aux normes régionales», saluent-ils.
«Des pratiques de corruption en toute impunité»
Mais, malgré tous ces actes posés, les efforts du gouvernement dans la lutte contre la corruption ont été jugés faibles par les américains. «Malgré la réputation positive du Sénégal pour la corruption, par rapport à ses pairs régionaux, le gouvernement n’a souvent pas appliqué la loi de manière efficace et les fonctionnaires ont continué à se livrer à des pratiques de corruption en toute impunité. Les rapports de corruption allaient de la recherche de rente par les bureaucrates impliqués dans les approbations publiques, aux marchés publics opaques, à la corruption dans la police et la justice. Certains hauts fonctionnaires de l’administration du président Sall seraient impliqués dans des relations de corruption», indique le département d’Etat.
Immixtion de l’Exécutif dans le Judiciaire
Les USA conseillent à leurs entreprises implantées au Sénégal, ou aux investisseurs américains désirant investir dans le pays, d’évaluer les risques de corruption et développer un programme de conformité efficace ou des mesures pour prévenir et détecter la corruption : «Les entreprises américaines opérant au Sénégal peuvent souligner à leurs interlocuteurs au Sénégal qu’elles sont soumises au Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) aux États-Unis et peuvent envisager de demander un conseil juridique pour assurer le respect des lois anti-corruption aux États-Unis et au Sénégal», leur suggère-t-il.
Sur le plan judiciaire, le rapport rappelle que la constitution du Sénégal exige que le pouvoir judiciaire fonctionne indépendamment du législatif et de l’exécutif. Mais, il signale que «l’exécutif exerce fréquemment une influence, en particulier dans les affaires pénales de grande envergure». le département précise, cependant, qu’en matière commerciale, ce type d’influence est rare. «Certains investisseurs étrangers signalent cependant un traitement discriminatoire par les tribunaux locaux», dit-il.
Youssouf SANE