Mbour : Les poignants récits de 5 femmes violées

par pierre Dieme

Les épouses Baldé et leurs belles-sœurs ont vécu le pire des cauchemars pour avoir été violentées et violées par un groupe de malfaiteurs connus dans la commune de Sindia. L’Obs est allé à leur rencontre.

Voile sur la tête, A. Baldé, 18 ans, collégienne en classe de 4e, vit un véritable drame pour avoir été violée dans la nuit du mercredi au jeudi dernier par un groupe d’individus. L’adolescente porte encore les stigmates de l’horrible souffrance que les violeurs lui ont infligée. Recluse dans la maison familiale dans la commune de Sindia, elle garde des souvenirs atroces de cette nuit. Dans cette petite maisonnée perdue au cœur d’un hameau de Sindia sur la route de Bandia, tout renvoie à la précarité. Un chien famélique qui n’a pas certainement pu défendre ses maîtres, dort tranquillement au milieu de la cour. La maison des Baldé est presque isolée des autres concessions dispersées à des différents endroits. Le regard triste et mélancolique, A. Baldé a les yeux qui sortent presque de leur cavité. Sa dignité bafouée, elle semble perdre goût à la vie. «Humiliée» dans sa chair, elle garde le profil bas, mais s’efforce de  reconstituer le film de cette nuit cauchemardesque. «Vers 3 heures du matin, ma mère m’a réveillée pour me demander de téléphoner à nos voisins afin de solliciter leur aide. Des individus tambourinaient à la porte métallique de la véranda», confie-t-elle. Le bâtiment constitué de 3 chambres, l’adolescente dormait dans l’une des pièces avec une de ses belles-sœurs. «J’ai pris mon téléphone et j’ai composé un numéro. Mais avant que je puisse parler, quelqu’un s’est dressé devant moi et m’a arraché le téléphone», se souvient-elle. Elle révèle que l’homme qui s’est dressé devant elle est de taille élancée et mince. «Il portait un bonnet. Ils étaient nombreux. Mais je ne peux dire exactement leur nombre. Ils nous ont fait sortir et nous ont rassemblées dans la cour. Ils ont ensuite conduit chacune de nous dans un coin de la maison. Ils nous ont frappées violemment avec le plat de leurs machettes. Sous la menace de leurs armes, ils nous ont violées ensuite», pleurniche la collégienne qui révèle avoir passé des moments douloureux entre les mains de ses bourreaux qui ont assouvi leur libido sur elle. «L’homme qui était sur moi dégageait une mauvaise odeur de cigarettes», se rappelle-t-elle. Très en colère, un membre de la famille d’ajouter : «Ces voyous sont des drogués, des alcooliques et des fumeurs de chanvre indien.» La nuit de leur agression, les femmes étaient seules dans la maison, les hommes étant tous partis à Dakar.

«Ils nous ont regroupées dans la cour pour nous violer»

Le vieux Baldé dodeline souvent de la tête. Guinéen d’origine, il donne l’impression d’être parmi ces fidèles musulmans qui ne ratent pas une prière. Le septuagénaire chef de la famille qui était aussi à Dakar, a vite rappliqué chez lui. Sous le regard bienveillant de ses parents encore sous le choc, la jeune collégienne se remémore encore des actes des malfaiteurs qui ont violé la collégienne A. Baldé, sa petite sœur âgée de 15 ans, élève en classe de 5e et ses deux belles-sœurs. «Ils n’ont pas touché à la fillette qui était dans la chambre», dira-t-elle.

F. Baldé, mère de la jeune fille, 49 ans, révèle que les malfrats l’ont sauvagement battue et délestée des 70 000 FCFA qu’elle gardait dans sa chambre. «Ils n’ont pas abusé de moi. Cet argent m’était confié par un parent. Ils ont aussi pris de la monnaie représentant les recettes de mes activités de vente», souligne-t-elle. La vieille dame qui porte une burqa confie avoir réussi à s’échapper en escaladant le mur de clôture de la maison et est allée demander de l’aide. D’ailleurs, elle n’en revient toujours pas d’avoir réussi une telle prouesse, d’autant que son physique ne facilite pas ses déplacements. La peur a certainement dû lui inoculer l’énergie du désespoir ! F. Bâ, épouse de l’un de ses fils, va aussi réussir à échapper aux visiteurs indésirables. Elle est aussitôt allée réveiller un voisin qui est venu à leur secours. Les agresseurs vont prendre la fuite, fondant dans les ténèbres de cette localité sans éclairage public et des hautes herbes qui ont poussé partout et qui ont annihilé toute velléité de poursuite.  Les victimes ont pu reconnaître deux de leurs agresseurs, notamment Babacar et Assane Sow, deux frères bergers, dont les troupeaux paissent dans les environs. Une voisine des Baldé informera, après la fuite des agresseurs,  son époux, M. Bâ, qui se trouvait à Dakar afin qu’il informe les conjoints des femmes violées qui rallieront le village à 5h du matin. Un jeune qui était resté auprès des victimes pour surveiller la maison, apercevra deux des agresseurs qui s’étaient terrés dans une maison en construction à quelques jets de là où ils ont commis leur forfait. «Ils viennent paître leurs troupeaux ici. On s’est une fois plaint à leur père qui nous a rétorqué qu’il ne pouvait rien faire contre ses enfants qui sont indisciplinés», confie M. Bâ, selon qui, les deux bergers étaient revenus pour leurs troupeaux. Avec les autres membres de la famille, ils sont entrés dans le bâtiment où ils ont trouvé les deux frères. «Nous avons réussi à attraper l’un (B. Sow). L’autre frère (A. Sow) s’est échappé. On nous a même dit plus tard que son père avait voulu le livrer à la gendarmerie avant qu’on l’en dissuade. On ne sait pas où se cachent les autres membres de la bande», signale-t-il.

Peur de grossesse

M. Bâ indique que ces jeunes bergers ont l’habitude de perturber la quiétude des riverains par une pollution sonore avec leur musique mise à fond. Aujourd’hui, leurs victimes sont traumatisées et ont peur de choper une grossesse. «Nous avons été obligés de les conduire à l’hôpital de Mbour pour des analyses gynécologiques. On ne sait pas quelle surprise l’avenir leur réserve. L’une des victimes est une adolescente de 18 ans. Sa petite-sœur a 15 ans. Leurs deux belles-sœurs viennent fraîchement de se marier. Ont-elles attrapé une grossesse ? On ne sait pas», s’inquiète-t-il. B. Sow, présumé violeur, livré à la Brigade territoriale de la gendarmerie de Popenguine, sera déféré aujourd’hui lundi, au parquet du tribunal de grande instance de Mbour. Les enquêteurs sont aux trousses du reste de la bande. 

OUSSEYNOU MASSERIGNE GUEYE

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