Mamadou Lamine Diallo interpelle le gouvernement

par pierre Dieme

Il m’est revenu que les gazelles Oryx, espèce menacée et confiée au Sénégal pour leur protection et leur reproduction, ont été distribués à des personnalités au Sénégal et dans la sous-région.

Revoilà les gazelles Oryx du ministre Abdou Karim Sall. Le député Mamadou Lamine Diallo, leader de Tekki (opposition) a déposé une question écrite sur la table de Moustapha Niasse, président de l’Assemblé nationale, interpellant le gouvernement, notamment le ministre de l’Environnement et du Développement durable, sur une éventuelle distribution de ces espèces protégées à des personnalités au Sénégal et dans la sous-région, pour y voir plus clair.

«Il m’est revenu que les gazelles Oryx, espèce menacée et confiée au Sénégal pour leur protection et leur reproduction, ont été distribués à des personnalités au Sénégal et dans la sous-région. Je souhaiterais être édifié et obtenir, le cas échéant, la liste des bénéficiaires, le nombre de gazelles par bénéficiaire, et le protocole signé avec chacun d’entre aux.» C’est Mamadou Lamine Diallo, député de Tekki (opposition), qui déterre ainsi le dossier des gazelles Oryx qui avait suscité débats au Sénégal, début juillet dernier. Dans sa correspondance, en date du 27 août dernier, avec en objet : «Question écrite posée au gouvernement» relative aux gazelles Oryx, déposée sur la table du président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse, et réceptionnée au Bureau du courrier de l’institution le 28 août, le député de Tekki mentionne : «J’ai l’honneur de vous transmettre, ci-joint, la lettre portant la question écrite posée au gouvernement relative aux gazelles Oryx. Tout en vous souhaitant bonne réception, je vous prie, Monsieur le Président d’agréer l’expression de ma haute considération et de mon profond respect». Cette question du député de l’opposition est adressée spécifiquement au ministre de l’Environnement et du Développement durable, Abdou Karim Sall, responsable direct de la protection de ces espèces menacées. Toujours dans le souci de tirer au clair cette affaire, Mamadou Lamine Diallo a aussi interpelé le Directeur des Parcs Nationaux, à qui il a posé la même question écrite, mais avec en objet «Affaire des gazelles Oryx».

RETOUR SU LA MORT DE 3 GAZELLES ORYX LORS D’UN TRANSFERT DE MATAM A UNE RÉSERVE PRIVÉE A BAMBILOR 

La polémique autour des deux (2) ou trois (3) gazelles Oryx mortes après leur transfert d’un Parc Nationale du Ferlo à une réserve privée à Bambilor, qui appartiendrait au ministre de l’Environnement et du Développement durable, avait alimenté les débats au Sénégal, début juillet dernier. Mais, ce n’est que le mardi 7 juillet 2020 que le ministre Abdou Karim Sall, a décidé de rompre le silence, reconnaissant les faits. Selon lui, toutes les bêtes étaient arrivées vivantes à destination et que c’est au cours de leur libération dans l’enclos d’accueil qu’il a été constaté que trois (3) d’entre elles ont eues des difficultés pour se relever. La cause, avait-t-il expliqué, «quelques blessures et une fracture du fémur lors du transport». Non sans préciser que le transfert des gazelles Oryx s’est fait «légalement» et dans de «bonnes conditions», avec un personnel qualifié du ministère. Aussi Abdou Karim Sall avait-t-il rappelé que l’Etat du Sénégal accompagne toutes les initiatives privées dans la gestion de la biodiversité sur la base de protocole d’accord dûment établis. Et ces bêtes ne peuvent devenir une propriété privée car selon le même protocole, toute population d’espèces cédée reste un patrimoine de l’Etat.

LES RESERVES ET LA COLERE DES ENVIRONNEMENTALISTES ET ACTIVISTES 

Cela n’a pas convaincu certains acteurs de la société civile et des activistes qui avaient exigé des éclairages dans cette affaire, notamment le protocole Etat-privé, la base légale sur laquelle ces six (6) Oryx ont quitté un Parc National du Ferlo pour peupler une réserve privé de Bambilor. Pour eux, le ministre de l’Environnement a pour mission de protéger ces animaux plutôt que de les mettre en danger dans une réserve de Bambilor qui ne répondrait pas aux normes pour accueillir ses Oryx qui ont parcouru plusieurs centaines de km, de la région de Matam à Dakar. Et l’ancien directeur du Parc National de Niokolo Koba de déplorer la mort de ces trois (3) gazelles, soulignant que cela pouvait être évité. Mieux, le colonel Momar Gueye a émis des réserves quant aux conditions de transfert des six (6) bêtes de Matam jusqu’à Dakar. En l’en croire, le déplacement de ces Oryx nécessite le concours d’un vétérinaire spécialisé et de techniciens spécialistes de la faune. En outre, d’autres spécialistes ont relevé que le transport de ces gazelles Oryx peut être fait individuellement ou en groupe sociaux. Cependant, ce transfert doit respecter un protocole de transport prenant en compte le nombre, le sexe et l’âge des animaux, en plus de veiller au respect de la structure sociale des groupes d’appartenance des bêtes.

CE QUE DIT LA LOI 

D’ailleurs, le Code de la chasse et de la protection de la faune sauvage (loi n°84-04 du 24 janvier 1986), encadrant la chasse et le Code forestier (loi 2018-25 du 12 novembre 2018) fixent les conditions d’exploitation de ressources forestières et assurent la protection des habitats fauniques. Et dans ces deux textes de loi, aucun article ne fait mention d’une autorisation de tout citoyen qui remplit les conditions de pouvoir élever des gazelles dans sa ferme ou terrain privé. Toutefois, l’Etat du Sénégal, à travers la Direction des Parcs Nationaux dispose de protocoles d’accord («agreement») avec tout privé souhaitant s’investir dans la restauration et la protection de la faune sauvage.

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