Des journalistes, des proches collaborateurs, des hommes politiques, des autorités religieuses et coutumières, des officiels, sans parler de la famille biologique du journaliste lui-même ont rendu hommage hier, lundi 27 juillet, au fondateur du Groupe Sud Communication Babacar Touré, décédé avant-hier, dimanche 26 juillet. La levée du corps a eu lieu à l’hôpital Principal de Dakar où on s’est souvenu d’un journaliste émérite. Les témoignages étaient unanimes sur la grandeur de l’homme qui repose désormais à Touba.
Décédé avant-hier, dimanche 26 juillet, à l’âge de 69 ans des suites d’une maladie, le fondateur du Groupe Sud Communication, Babacar Touré, a été inhumé dans l’après-midi d’hier, lundi 27 juillet à Touba. Quelques heures plus tôt dans la matinée, la levée du corps du journaliste à l’hôpital Principal de Dakar n’a laissé personne indifférent. Elle rassemblait à la fois parents, amis, proches collaborateurs, journalistes, hommes politiques, autorités religieuses et coutumières, officiels. A 10h30 déjà, la foule était immense.
Sous un soleil de plomb, chacun, enfilant son masque à cause de la pandémie de Covid-19, tenait à assister à la cérémonie pour marquer sa solidarité au défunt, «doyen» pour certains, «ami et frère » pour d’autres.
Des mouchoirs épongent les visages perlant de larmes. Des sanglots, des yeux rougis, des bras croisés dans le dos ou à la poitrine. C’est l’expression de la totale consternation des personnes devant le cercueil. Au cours de cette cérémonie, on s’est rappelé d’un homme aux multiples qualités. «Journaliste émérite», «professionnel hors pair», «régulateur discret», «grand intellectuel», «combattant de la presse ». Bref, c’est un pionnier de la presse et de la démocratie sénégalaise qui est parti. «Babacar Touré et moi, on s’est connus au Soleil. C’est après notre départ de ce journal qu’on a créé le Groupe Sud Communication. Babacar était un leader qui faisait le journal d’un commun accord avec tout le monde. Il recueillait l’avis de toute la rédaction. Il était véridique dans ce qu’il faisait. Je pense que son héritage sera bien assuré après tout ce qu’il a fait dans le groupe », a témoigné Abdoulaye Ndiaga Sylla au nom du Groupe Communication. Pour sa part, le ministre de la Culture et de la Communication, Abdoulaye Diop embouche la même trompette. « Babacar Touré était engagé en tant que panafricaniste. Il appartenait à tout le monde. C’est ce qui justifie d’ailleurs la présence de l’ambassadeur de la Guinée Conakry pour présenter les condoléances du Président Alpha Condé.
C’est un fils du pays, quelqu’un qui était très engagé pour la consolidation de la démocratie », a fait savoir le représentant du Président de la République, Macky Sall empêché par le Sommet extraordinaire de la Cedeao. Aux prises de parole, s’ajoute celle de la famille du défunt. « Je remercie la famille. Je ne peux pas raconter tout ce que j’ai vécu avec Babacar Touré ici. Je remercie tout le monde. Babacar appartenait à tout le monde. Il était quelqu’un d’un grand cœur. Il était très véridique», a confié le représentant de la famille. Non sans donner une consigne à l’assistance. Pas de photo du cercueil de Babacar Touré sur les journaux ou les réseaux sociaux. « Babacar avait demandé lors de la levée du corps du défunt rédacteur en chef de Sud Quotidien, Madior Fall qu’on ne publie pas la photo du cercueil dans les journaux, je veux que vous fassiez de même aujourd’hui », at-il ajouté. Aussitôt, les discours terminés, les prières sont dites par les autorités religieuses sous la houlette de Serigne Abdourahim Mbacké pour le repos éternel de l’ancien président du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (Cnra). Le cortège funéraire prend la direction de la cité religieuse de Touba. Les condoléances seront reçues aujourd’hui, mardi 28 juillet, avec une journée de prières chez le défunt à Ngaparou.
REACTIONS…
ABDOULAYEDIOP, MINISTRE DELA CULTUREET DELA COMMUNICATION : «Babacar Touré était de tous les combats de la démocratie»
Le ministre de la Culture et de la Communication, Abdoulaye Diop, a présenté ses condoléances au nom du président de la République Macky Sall et tout son gouvernement, à la famille éplorée et au monde de la presse tout court, lors de la cérémonie de levée de corps, à l’hôpital principal de Dakar hier, lundi. «Le Président de la République, Macky Sall, m’a raconté son lien avec le doyen Babacar Touré, son engagement par rapport à la démocratie, son dévouement par rapport à la liberté de la presse», a déclaré Abdoulaye Diop. Selon le ministre de la Culture et de la Communication, le président fondateur du Groupe Sud Communication était « un digne fils du pays et de l’Afrique et il a beaucoup contribué pour le développement du Sénégal, de la presse. Il était de tous les combats de la démocratie ».
AMINATA KOBELE KEITA, AMBASSADRICE DELA REPUBLIQUE DE GUINEE «Babacar Touré était pour mon président un jeune frère, un Guinéen…»
Venue assister à la cérémonie de levée du corps au nom propre d’Alpha Condé, président de la République de Guinée Conakry, l’ambassadrice extraordinaire et plénipotentiaire Aminata Kobélé Keita a magnifié la profondeur et la qualité des relations d’amitié liant son président et le défunt disparu. Aussi a-t-elle dit : «J’ai fait la connaissance de Babacar Touré par l’entremise de mon président Alpha Condé. Il était pour mon président un jeune frère, un Guinéen, un Sénégalais. Je puis témoigner ici, la sincérité de l’amitié entre les deux amis et la loyauté de Mr Babacar Touré à l’endroit de mon président Alpha Condé que je représente ici. Je lui ai rendu visite une fois dans sa résidence à Ngaparou sur demande de mon président. Cela montre à suffisance la profondeur et la qualité des relations qui lient mon président et le disparu Babacar Touré et qui étaient sans égal». Non sans révéler que « le président Condé venait tous les jours à ses nouvelles depuis l’hôpital. Bref, Mr Touré était un confident à mon président».
MACKY SALL, PRESIDENTDE LA REPUBLIQUE «Babacar Touré était un journaliste chevronné, un homme de consensus et de dialogue»
Le Président de la République a rendu hommage à Babacar Touré, décédé dimanche soir à l’âge de 69 ans dès suite d’une longue maladie. Selon le Chef de l’Etat, l’ancien Directeur général du Cnra était un journaliste chevronné et pionnier dans l’entreprise de presse. «Journaliste chevronné et pionnier dans l’entreprise de presse et la formation des journalistes, homme de consensus et de dialogue, Babacar Touré aura été de tous les combats pour la liberté et la démocratie. A sa famille, au groupe Sud et à la presse, je présente mes condoléances émues», a écrit le Président de la République dans un post publié sur sa page Facebook.
ALASSANESAMBADIOP, DIRECTEUR D’IRADIO ET D’ITV «si beaucoup de gens osent aujourd’hui entreprendre dans le journalisme, c’est grâce à… Babacar Touré»
«Le décès de Babacar Touré est une grosse perte pour la presse sénégalaise, pour le Sénégal. C’est une grosse perte pour l’Afrique parce que Babacar Touré est un monument. Si aujourd’hui, beaucoup de gens osent entreprendre dans le journalisme, c’est grâce à l’exemple qu’a donné Babacar Touré au groupe Sud communication. C’est le premier groupe de presse au Sénégal en termes d’investissement et de groupe. Je garde également de Babacar Touré un homme affable, généreux. Généreux sur le plan intellectuel, généreux naturellement. Ily a quelques années, il y avait une fille à Kaolack qui avait une préinscription au Japon pour aller étudier. Mais, elle n’avait pas les moyens. C’était une orpheline. Les frais étaient de quatre millions de francs CFA. La famille de la fille avait réussi à rassembler deux millions. Quand sa famille a fait une annonce dans l’Obs, Babacar Touré m’a appelé en me disant qu’il voulait rencontrer les parents de cette fille. Ses parents étaient à Kaolack. Je les ai appelés au téléphone. Babacar Touré m’a donné rendez-vous au Jet d’eau, devant l’agence de la BHS. Il m’avait remis une enveloppe de quatre millions de francs CFA. Il m’a conjuré de ne jamais dire aux parents de la fille que c’est lui qui avait fait ce geste. Les parents de la fille ont tout fait pour savoir leur bienfaiteur mais Babacar Touré m’a défendu de divulguer son nom. La fille a, aujourd’hui, terminé ses études et travaille en Australie. À chaque fois qu’elle vient en vacances, elle insiste pour rencontrer son bienfaiteur mais Babacar Touré m’avait défendu de le faire. Aujourd’hui, je suis obligé d’appeler la famille pour leur dire votre bienfaiteur, c’était Babacar Touré».
BACARY DOMINGO MANÉ, ANCIEN DIRECTEUR DE PUBLICATION DE SUD QUOTIDIEN : «De Babacar Touré, je retiens trois dimensions»
«Pour parler de Babacar Touré, permettez-moi d’énumérer trois dimensions de l’homme. Le premier est en tant que citoyen, Babacar Touré s’est battu pour l’instauration de la démocratie au Sénégal par son engagement total. Lorsqu’ils ont créé le groupe Sud communication, ils étaient de jeunes journalistes qui étaient au quotidien national «Le Soleil» avec une situation économique disons plus prometteuse que celle de la presse privée. Néanmoins, du fait de cette dimension de l’homme pour le combat démocratique, ils ont cru à cet idéal et c’est leur engagement qui a permis à la démocratie sénégalaise d’atteindre son niveau actuel. La deuxième dimension de l’homme que je veux souligner, c’est le professionnel. Babacar était quelqu’un de rigoureux qui aime le métier de journalisme qu’il a choisi par conviction et non pas comme un visiteur du dimanche qui visite le métier pour s’enrichir. Il a cru à ce métier et il s’est tout donné pour son rayonnement. D’ailleurs, quand vous passez dans le groupe Sud communication, on vous apprend à mettre de l’avant la déontologie et l’éthique en vous demandant de toujours de relater les faits de manière objective. Sud nous a aussi appris que le journaliste doit préserver sa dignité en évitant la compromission à tout prix, quelle que soit la situation de précarité dans laquelle on se trouve, cela ne doit pas justifier des écarts de comportements. Et, il y avait chez lui beaucoup plus de place pour le quotidien que pour la radio. D’ailleurs, on a appris que jusqu’à son dernier souffle, il était au cœur de la gestion du journal. La dernière chose que je voulais souligner, c’est la dimension humaine de l’homme. Babacar était quelqu’un de généreux et tous ceux qui ont eu la chance de l’approcher le savent. Il était quelqu’un qui donnait sans compter, quelqu’un qui donnait dans la discrétion».
EL HADJ MOUSSA THIAM, JOURNALISTE À SUD FM : «il ne nous considérait pas comme ses employés»
«Je retiens de Babacar Touré sa générosité, son humilité et sa rigueur dans le travail. Il nous a inculqué ses valeurs qui guident aujourd’hui notre action sur le terrain chaque jour. Il nous a beaucoup marqués par son professionnalisme. Très souvent, il n’hésitait pas à prendre son téléphone pour nous appeler soit pour nous féliciter du travail que nous abattons, soit pour nous rectifier de manière très professionnelle. Babacar Touré était également un homme très généreux dans l’effort mais surtout dans sa poche pour tout le monde. Il en faisait même trop dans le social et il était très attentif à ses collaborateurs parce qu’il ne nous considérait pas comme ses employés, un terme qu’il n’utilisait d’ailleurs jamais puisqu’il disait toujours qu’on est ses collaborateurs. Cette estime qu’il avait pour nous est notre source de motivation pour aller de l’avant dans le travail. Il est donc parti mais il est toujours là et il restera toujours avec nous parce que son héritage sera sauvegardé par les jeunes qu’il a laissés à la tête du groupe ».
DIADINE NIANG, COMMERCIAL DE SUD QUOTIDIEN ET NEVEU DE BABACAR TOURÉ : «il n’a jamais voulu que nos relations familiales interfèrent dans mon travail à sud quotidien»
«Babacar a été plus qu’un patron pour moi. Il me répétait souvent que c’est toi mon fils ainé. Pourtant quand il s’agit du travail, il faisait tout pour prendre de la hauteur sur l’affection qu’il me vouait. Ainsi, il me demandait toujours de me référer à la direction de Sud quotidien. Il n’a jamais voulu que nos relations familiales interfèrent dans mon travail à Sud quotidien. C’était un homme très professionnel et très généreux. J’ai vraiment perdu un oncle, un père et même une mère si je peux m’exprimer ainsi tellement, il était tout pour moi et il faisait tout aussi pour moi. Il laisse un grand vide dans mon cœur».
ALIOUNE MBENGUE, ANCIEN CHAUFFEUR DE SUD QUOTIDIEN : «il me répétait aussi très souvent qu’il n’y a pas de patron dans cette maison»
«De Babacar Touré, je retiens un homme travailleur, ambitieux et très courtois. Il était également d’une grande générosité qui a dépassé les murs du groupe Sud communication. Il aimait beaucoup son travail et vouait un grand respect à ses collaborateurs. Il veillait personnellement à ce que tout travailleur de Sud, peu importe son rang ou statut, soit bien traité. Très souvent, il m’appelait dans son bureau pour échanger avec moi sur les conditions de travail mais aussi s’informer de ma famille. Il me répétait aussi très souvent durant les vingt-sept ans que j’ai passés dans le groupe comme chauffeur qu’il n’y a pas de patron dans cette maison et ce qui importe, c’est le travail. De ce fait, chacun pensait qu’il l’aimait plus que les autres, tellement il était proche de tout le monde. Durant tout le temps que j’ai passé dans le groupe, il n’a jamais haussé le ton sur moi. Il est parti en laissant derrière lui un grand vide. Puisse Dieu lui rendre jusqu’au centuple de toutes les bonnes actions qu’il a accomplies sur terre sans tambours ni trompette !».
DIOMANSI BOMBOTÉ, JOURNALISTEMALIEN À BAMAKO : BABACAR TOURE, ÉMINENT JOURNALISTE SÉNÉGALAIS
Toute la presse sénégalaise, inconsolable, avec elle, toute la presse continentale, pleurent un géant ! Fondateur du groupe Sud Communication en 1986 et ancien président du Conseil national de régulation de l’audiovisuel (CNRA), Babacar Touré, a été une des locomotives de la presse moderne au Sénégal et en Afrique. Devant sa mémoire, les médias sénégalais, unanimes, rendent un vibrant hommage à la mesure de son rôle de pionnier. Sa solidarité professionnelle allait au-delà du Sénégal. Ils sont nombreux au Mali, de Cheick Oumar « Gilbert » Maïga, Secrétaire général au ministère de l’économie numérique à Hameye Cissé de la Haute autorité de la communication (HAC), en passant par Souleymane Drabo, ancien Directeur de l’Agence malienne de presse (AMAP), Saouti Haïdara (DG de la Société malienne de presse /SOMAPRESSE), Moussa Diarra (AMAP), Tiégoun B. Maïga, qui, dans la presse et en dehors, ont tissé de solides relations conviviales avec Bab’s, son petit nom affectueux. “Babacar était un homme dont la caractéristique principale était la fidélité en amitié et la générosité en toutes circonstances”, commente Gilbert, profondément meurtri par le décès de celui qui fut son promotionnaire au CESTI (Centre d’études des sciences et techniques de la communication) de l’Université de Dakar. Un homme au mental d’acier, d’une force de caractère exceptionnelle, d’un courage professionnel et intellectuel hors du commun. Ses propos pouvaient être aussi tranchants que la lame d’un rasoir. Ils ne les lâchaient pourtant jamais à contre-courant. Propos téméraires, certes, mais toujours pertinents ! Un parrain du journalisme s’en est allé laissant orphelins les médias sénégalais et africains ! Les semences qu’il a plantées, germeront pour inspirer les générations futures ! À sa famille, à ses inséparables compagnons Abdoulaye Ndiaga Sylla, Saphie Ly, Latif Coulibaly, Sidy Gaye, Ibrahima Bakhoum et tant d’autres, nos condoléances les plus attristées ! Dors en paix, jeune frère et ami !
Mariame DJIGO Jean Pierre Malou et Nando Cabral GOMIS