Macky noyé dans des problèmes

par Dakar Matin

Le Sénégal traverse une crise multifactorielle qui laisse croire qu’il n’y a pas un chef à la tête de l’Etat. C’est comme si la crise sanitaire liée au coronavirus avait ouvert la boite de Pandore

Le Sénégal traverse une crise multifactorielle qui laisse croire qu’il n’y a pas un chef à la tête de l’Etat. C’est comme si la crise sanitaire liée au coronavirus avait ouvert la boite de Pandore. Tellement, en un laps de temps, les problèmes se sont accumulés au point de laisser croire qu’il n’y a pas de remèdes possibles pour les résoudre. A l’instar d’un bateau dont la coque serait trouée en divers endroits, le navire Sénégal prend eau de toutes parts et, si l’on n’y prend pas garde, il risque de subir le même sort que le gigantesque Titanic dont les passagers étaient conscients de leur mort imminente.

D’abord, le taux de positivité lié à la pandémie à coronavirus explose au moment où le laxisme de l’Etat, l’indifférence et le déni permanent des populations font croire que le covid-19 est un souvenir lointain. Aujourd’hui, on assiste à un relâchement inquiétant des sénégalais relativement au respect des gestes barrières. Une attitude d’autant plus irresponsable que les taux de contamination et de mortalité prennent l’ascenseur. on assiste à une forme de démission de nos autorités sanitaires.

C’est d’ailleurs fort de ce constat que le sage de Tivaouane, le khalife général des tidianes, serigne Babacar Sy, a déclaré devant le ministre de la santé avant de le répéter devant le président Macky sall que l’Etat a démissionné dans la lutte contre la pandémie. Les indicateurs communautaires montrent toute la gravité de la pandémie dans notre pays. A la date du 20 juin, le Sénégal était le 8e pays du continent africain le plus affecté par le covid-19, le 3e au niveau de la Cedeao et le 2e dans l’Uemoa. Le taux de létalité présente une situation quasi-analogue.

9e au plan continental, le Sénégal occupe la 2e place dans l’espace Cedeao et trône à la première au sein de l’Uemoa. C’est donc dire que la situation épidémiologique est catastrophique dans notre pays même si nos autorités sanitaires laissent croire que tout va bien dans le meilleur des mondes possibles. Et aujourd’hui, si l’espace Schengen a fermé ses portes au Sénégal, c’est dû en grande partie à notre tableau épidémiologique pas du tout reluisant. Certes notre pays ne présente pas un tableau plus catastrophique que le Maroc et l’Algérie mais il faut savoir que d’évidents critères économiques ont pesé lourd dans le choix des pays admis dans l’espace Schengen. Le Maroc, l’Algérie et la Tunisie sont des expansions de l’Union européenne dans le cadre communautaire de l’Union pour la méditerranée dont font partie ces pays sus-évoqués. Il appert que l’Union européenne est le premier marché émetteur de ces pays du Maghreb en matière de tourisme. Rien que ces pays font annuellement presque 7000 milliards en termes de recettes là où le Sénégal peine à glaner 500 milliards. Le choix du Rwanda est rationnel vu d’abord sa situation sanitaire.

Au 20 juillet, le Rwanda a enregistré 1582 cas de contamination, 834 guérisons et 5 décès. Ensuite indépendamment de ses performances en matière de sécurité, en Afrique, le pays des mille collines est la 3e destination touristique en matière de tourisme d’affaires. Toutes choses qui font donc que notre diplomatie et nos autorités sanitaires doivent trouver une stratégie qui puisse permettre au Sénégal de reprendre ses vols en direction de Schengen au lieu d’engager, au nom d’un nationalisme bravache, un faux combat de réciprocité dont l’unique perdant est le Sénégal. Pour en revenir à la crise multifactorielle de notre pays, à la pandémie sont venus s’ajouter des problèmes politiques liés à l’indiscipline de certains responsables de l’APR. Il y a deux semaines, les sénégalais ont été choqués et estomaqués par les insultes de Moustapha Cissé Lo diffusées sur la toile. Et comme seule réponse, le président de l’APR a fait exclure des rangs l’APR l’insulteur public. Et black-out sur les révélations faites par l’insulteur concernant des scandales financiers sur la réhabilitation du building administratif, sur les semences destinées aux paysans, le ter.

Et comme si cela ne suffisait pas, les sénégalais ont dû avaler les scandales sur fond de détournements révélés par les derniers rapports de l’IGE. Des sénégalais qui, à force d’assister à des scandales, ont perdu leur capacité d’indignation au point d’être mithridatisés. Les scandales impunis, vu leur multiplicité, ne scandalisent plus, n’indignent plus, n’émeuvent plus. Dans le même sillage, ils ont été étonnés d’entendre le président sommer ses ministres de faire leur déclaration de patrimoine alors qu’ils devaient se soumettre à cet exercice au plus tard trois mois après leur nomination. D’ailleurs, les ministres constituent la portion congrue des personnes qui gèrent un budget de plus d’un milliard et qui refusent de faire état de leur patrimoine. Mais sur ce plan là, le chef de l’Etat n’est pas pédagogue parce que lui-même ne s’est pas sacrifié à cet exercice après sa réélection alors que la loi constitutionnelle l’y oblige. En vérité, le président, ses ministres et ses administrateurs de crédits n’ont cure de la loi.

Front social réchauffé

Par ailleurs, le front social se réchauffe avec les grèves répétitives du Sytjust dont le ministre de tutelle, Malick Sall, a préféré durcir le ton, engager une épreuve de force avec le secrétaire général Boun Aya Malick Diop au lieu d’assouplir sa position. A cela s’ajoute la levée de boucliers des agents de la santé. Et aucune initiative n’a encore émané du chef de l’Etat pour trouver solution aux revendications légitimes des travailleurs. Heureusement que la présidente du haut Conseil du dialogue social, Innocence Ntab Ndiaye, a entamé une médiation entre les deux parties en conflit. Last but not least, les scandales fonciers constituent le point d’orgue des problèmes qui assaillent notre pays. Partout les populations se révoltent pour avoir été expropriées de leurs terres. Le plus patent est celui de Ndengler où les autorités font du ponce-pilatisme dans le traitement de cette affaire. Si aujourd’hui le problème s’est exacerbé au point de mettre face-à-face Babacar Ngom et les habitants de Ndingler, c’est parce que Oumar Guèye, ministre des Collectivités territoriales, du développement et de l’aménagement des territoires s’est complètement débiné pour laisser la patate chaude à ses collègues Abdou Karim Fofana et Aly Ngouille Ndiaye. Le nœud du problème de Ndengler est lié à la délimitation du périmètre communal de Sindia dont l’alors président du conseil rural avait attribué 75 ha de terre qui n’appartiennent à sa zone. La loi ne permet pas à un maire ou ancien président de communauté rurale de délibérer sur des terres qui n’appartiennent pas à son périmètre communal ou rural. même si aujourd’hui le patron de la Sédima dispose légalement d’un titre foncier, il est possible que l’Etat qui a titrisé les 300 ha de Djilakh et de Ndengler désaffecte ces 75 ha objets du litige et les restitue aux exploitants de Ndengler. Mais on assiste à une fuite de responsabilité des autorités étatiques mais aussi à une épreuve de force de la part de Babacar Ngom qui met son titre foncier en bandoulière pour coloniser les terres de Ndengler.

Finalement, l’Etat a tranché le nœud gordien en sommant Babacar Ngom d’arrêter tous travaux sur la partie litigieuse et d’autoriser les paysans de Ndengler à aller y cultiver cette année puisque l’hivernage s’est déjà installé. Mais l’Etat risque juste d’ajourner le problème foncier de Ndingler si cette période hivernale n’est pas mise à profit pour réconcilier les deux parties antagoniques en tenant compte de la légalité de l’opérateur économique Babacar Ngom mais surtout de la légitimité coutumière de la communauté de Ndengler. Devant l’absence de toute perspective de solutions à ces multiples problèmes qui nous assaillent, tout porte à croire que le capitaine du bateau s’est noyé dans l’océan des problèmes qui submerge notre pays.

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