C’est loin d’être fini. C’est malheureusement la conclusion que nous avons été amenés à observer après ce qui a été présenté comme un dénouement heureux dans le problème foncier lancinant entre Babacar Ngom et les populations de la localité. L’Etat ayant décidé de leur allouer leurs terres, le temps de cette campagne agricole, donc d’ici la fin de l’hivernage dans 4 ou 5 mois, les paysans ne sont alors que des détenteurs provisoires.
Sans céder à aucune forme de passion relativement à cette question, nous devons d’abord nous féliciter de l’implication de l’Etat dans cette affaire qui, somme toute est privée. C’est un différend entre un promoteur privé et les populations d’une localité. Un problème foncier dont la solution devrait normalement être judiciaire si les tractations y afférent ont échoué.
Mais, l’Etat a joué au médiateur. Et tant mieux. Sur des questions aussi fondamentales, il était important que les hautes autorités en plus de l’administration centrale y participent pour des solutions à l’amiable. Nous insistons sur ce mot. Car, nous savons tous que le droit est avec Babacar Ngom. Car, si l’on est détenteur d’un titre foncier, à moins de contester la légalité de ce dernier, on est attributaire légal de la terre en question. C’est un truisme de le dire.
Mais, car, il y a un ‘’mais’’, les populations contestataires ont été possesseurs au titre du droit coutumier, c’est à dire du seul qu’eux ils reconnaissent. Malheureusement, la loi de 1964 sur le domaine national leur offre ici, peu de possibilités de récupérer leur terre face au détenteur du titre foncier.
Donc, c’est un arbitrage à faire entre le droit coutumier et le droit moderne. Et la position de la Justice est connue d’avance.
Cependant, tout le monde sait que les populations n’allaient pas se laisser faire. La confrontation étant inévitable, il fallait trouver un consensus.
Alors, l’Etat fait face à un dilemme cornélien comme cela lui arrive souvent dans de nombreuses affaires.
Il sait en effet que s’il restitue définitivement ses terres aux populations locales, tous les titres fonciers décernés seraient alors en sursis. Alors, d’autres pourraient légitimement revendiquer le même droit. Et d’ailleurs, il se posera un problème juridique : Comment exproprier un détenteur d’un titre foncier ?
L’autre aspect du problème, c’est comment laisser des dizaines et des dizaines de familles de Ndengler dans le désarroi en les privant de leur unique moyen de subsistance qui est la terre ?
Cette question est également importante. Alors, que faire ?
La solution trouvée est provisoire et factice même si elle a le mérite d’apaiser la tension.
Le problème a cependant été seulement différé et non résolu. Il va encore resurgir.
Ngom ne va pas renoncer à ses droits et les populations non plus. Alors, il faudra une vraie solution.
Une qui sera durable parce que définitive.
Même si ce ne sera pas facile, elle est possible. Faudra-t-il dédommager Ngom ? Faudra-t-il lui donner d’autres espaces de terre au risque de créer les mêmes réticences de populations ? Ou faudra-t-il indemniser les populations d’une façon substantielle pour faire taire les résistances ?
En tout état de cause, une solution ne pourra pas manquer. Et pour cela, il faudra un compromis de nature à permettre à chaque partie de céder une partie de ses ‘’droits’’ au nom de l’apaisement.
Ce qui est sûr, c’est que tous ceux qui avaient des problèmes fonciers comme les gens de Gadaye suivent de très près cette affaire. Si Ndengler conserve ses terres, la localité servira d’exemple à beaucoup à propos d’une équation qui se pose à toutes les localités.
Il reste évident que les autorités sont en train de mesurer toute l’importance d’une législation claire et équitable sur tous les domaines de la cité. Elle évite les conflits et s’il y en a, elle offre des solutions pérennes.
On a voulu conserver une dualité de droit et un flou autour de la terre. Elle est en train de générer une bombe sociale difficile à amorcer.
Assane Samb