112
Comme dans plusieurs localités de Dakar, des quartiers de Keur Massar sont aussi privés d’eau potable. Depuis presque une semaine, aucune goutte de ce liquide précieux ne coule des robinets. Un problème très récurrent dans cette partie de banlieue dakaroise où les réservoirs sont toujours à sec, témoignant de l’insuffisance de l’approvisionnement en eau en milieu urbain. En ces temps de pénurie chronique, l’eau des forages, des puits et des pompes demeurent la bouée de sauvetage des populations. |
A El Hadji Pathé, un quartier de la commune, les coupures d’eau sont quotidiennes. La longue file d’attente formée au tour d’un puits, en forme d’’un terrassement vertical, en face de la mosquée, en dit long déjà sur le calvaire des habitats. Sur place Amy Ndao remonte de l’eau à l’aide d’une corde attachée à l’anse d’un seau en plastique. Joignant l’acte à la parole, elle lâche : «c’est mieux que rien, hein ! Ça ne nous satisfait pas pour autant, mais on n’a pas le choix. Depuis 9h, je suis là. Ça fait maintenant 2 tours d’horloge que je fais des navettes entre chez moi et ici, avec des bassines (à charge) à la tête. Pourtant, à peine 6 mois, j’ai subi une opération et on m’a strictement interdit de porter les lourdes charges. Mais, je n’ai pas le choix. C’est impossible d’entretenir proprement une maison sans avoir de l’eau en abondance», assène-t-elle. A quelques encablures, une autopompe est aussi installée, au secours de la population. Une marée humaine est trouvée au tour de ce point d’eau, certains assis à même le sol, d’autres sur des bouteilles d’eau qui leur serviront plus tard de réservoir. Plus loin, une dame s’est isolée de la bande, assise seule sur un pneu, les deux mains jointes à la tête, témoignant ainsi son point de lassitude. Interpellée, elle fulmine directe, dénonçant le laxisme de l’Etat du Sénégal face à la situation. «Ce n’est pas du tout normal en ce temps de crise sanitaire qu’on peine à trouver de l’eau potable. Il ne se passe pas un jour sans qu’on ne décèle un cas de Covid-19 à Keur Massar. Mais regardez le rassemblement ici, tout le monde est obsédé par l’eau et ils n’ont pas tort. On ne peut pas vivre sans ce liquide précieux. Tout à l’heure, pas plus que 5mn, deux femmes ont failli se battre pour une bouteille de 20 litres et chacune se proclamait propriétaire. Il a fallu l’intervention du propriétaire (de l’autopompe) qui a menacé de les chasser d’ici pour qu’elles daignent se calmer. Autant de comportements en déphasage avec les mesures édictées. Mais la faute incombe à l’Etat», explique-t-elle. Avant d’ajouter : «la couleur de l’eau ne me rassure pas ; c’est très jaunâtre et très douteuse. Personnellement, je l’utilise juste pour la lessive, la vaisselle et le bain», précise-t-elle. Même scenario dans plusieurs autres quartiers de Keur Massar, où pas une seule goutte de ce liquide précieux ne coule des robinets. Des populations sont obligées de se ruer vers les puits et pompes, en faisant parfois, sous cette forte canicule, des kilomètres avant d’en percevoir un. Et pis, pas une silhouette de camion-citerne d’eau en provenance de Sen’Eau ne circule dans les coins et recoins de cette zone. Dans cette localité où le système d’assainissement est à améliorer, les populations se contentent, malgré elles et malgré les risques, de ces eaux aux qualités douteuses, souvent polluées, jaunâtres, avec une odeur parfois nauséabonde, pouvant occasionner l’émergence d’une nouvelle épidémie. Ainsi la population exhorte l’Etat à trouver une alternative dans les plus brefs délais. |