Sur l’échelle de Richter des tremblements politiques, le procès, qui s’ouvre ce jour, de notre compatriote Lamine DIACK, ancien patron déchu de l’athlétisme mondial, est plus excitant que les macabres arithmétiques autour de la pandémie de la Covid19.
Sociétés et nations, dans les dynamiques humaines, pèsent cependant plus lourd dans le bilan comparé final entre ces deux cas de figure.
On peut donc penser que peu importe l’issue de la procédure judiciaire lancée contre un homme au soir de sa vie, il est bien plus urgent de se pencher sur la gestion de la crise sanitaire qui s’est saisie de notre pays depuis bientôt quatre mois. Pour une raison simple: ses conséquences seront de très loin plus décisives sur l’avenir du Sénégal alors que DIACK, homme du passé, n’est plus que dans un mortel combat pour sauver ce qui reste de son honneur passablement écorné.
La scène laissée par la Covid19 est lamentable. Elle force une analyse approfondie. C’est celle d’un vaste champs de ruines. En son milieu, se tient debout, les mains sur les hanches, un général en guenilles. C’est, vous l’avez deviné, à quoi en est réduit le pauvre Macky Sall que plus personne n’ose considérer comme President du Sénégal.
Regard hagard, il voit l’étendue du désastre qu’il a causé. Ses yeux enfoncés par des nuits blanches dopées à toutes sortes de stupéfiants liquides ou durs dénombrent les morts par dizaines, en évaluent, anxieux, les futurs, à mesure que les cas de contamination s’accumulent.
Fiasco
C’est le dernier fiasco d’un minable et médiocre autoproclamé chef de guerre qui sait qu’il a conduit ses troupes à l’abattoir. Désespérément, il tente de comprendre comment d’une campagne engagée la fleur au fusil sous les vivats sur son leadership prétendument diagnostiqué jusque par d’inattendus thuriféraires, il en a fait le spectacle désolant qu’il observe.
Ses jambes flageolent. Il ne tient plus debout. Vite, ayant repéré une chaise anglaise qui a survécu à l’ouragan, il s’y précipite pour se soulager. Son mental, constipé, est aussi agité que son ventre en furie…
Ses pensées n’en parviennent pas moins à faire un rapide retour en arrière. Quand tout lui semblait alors n’être qu’un jeu d’enfants. C’était juré, croix de bois contre croix de fer, l’occasion pour lui de “tester”, grandeur-nature, son leadership.
Ce virus, le corona, dont on disait qu’il tuait tout sur son passage, menaçait la survie de l’humanité, allait voir, clamait-t-il, fier et vantard, ce qu’il en ferait: une bouchée.
Certes, ses compatriotes, enclins à s’aligner derrière le pouvoir de l’heure, ne s’étaient guère attardés sur ses palinodies, ses hésitations, pour trancher le sort du petit groupe d’étudiants sénégalais pris dans la tourmente naissante de la pandémie dans sa ville d’origine, celle de Wuhan, au centre de la Chine, il y a sept mois.
Peu lui en voulurent de ne pas les avoir rapatriés moins par stratégie que par impécuniosité et incompétence. Tous, soudain, plus complaisants à son égard, s’empressèrent de lui tresser des lauriers immérités de nouveau chef de guerre derrière lequel le mot d’ordre était de se mobiliser pour faire face à la bestiole meurtrière.
On en eut les larmes aux yeux quand les laudateurs de tous poils, sur le mode “j’en ai la chair de poule”, se mirent à chanter l’hymne de l’union sacrée, divisions politiques et sociales enterrées, pour affronter d’un même élan l’ennemi commun.
Qui ne se souvient de ces moments d’un consensus si général qu’aucune voix n’osait y trouver à redire sauf à se faire trucider sous les applaudissements du peuple.
On se mit même à faire le procès de ceux, suivez mon regard, qui étaient accusés, avec une déroutante légèreté, de salir la réputation du Sénégal à l’étranger, quand il ne s’agissait que de vilipender les dérives et la criminalité financière et politique, maçonnique et transgenre, du Macky Sall que ses nouveaux défenseurs voulaient préserver coûte que coûte des lumières d’une critique légitime et saine dans une démocratie.
L’unanimité hypocrite était si forte autour de lui qu’il dut s’en pincer sa cuisse pour réaliser le miracle se produisant sous ses pieds.
Sur les ondes et dans les journaux, ses critiques s’effacèrent. Certains d’entre-eux cessèrent d’être des militants contre la vie chère ou les hydrocarbures nationaux pillés par leur héros inattendu.
Chantres de la capitulation
Dans un volteface aussi bruyant que surprenant, ils se muèrent en chantres de la capitulation pour lui dérouler un tapis rouge, se posant en dociles serviteurs à son combat devenu, le présenta-t-il, celui de la nation entière.
Le patriotisme était à son comble. Les plus grandes gueules du pays en firent même une norme supérieure en oubliant de dire qu’il s’agissait, derrière leurs agissements proselytiques, de rien d’autre que d’aider leur champion à profiter de la crise pour se repositionner.
Ils le savaient en effet mal dans sa peau depuis qu’il avait frauduleusement volé les résultats de l’élection présidentielle de février 2019.
Sa légitimité était en doute. Rien ne lui réussissait en réalité comme le prouvaient tous ces projets mirifiques en rouille qu’il avait lancés en grandes pompes. Tous étaient à l’arrêt. Des milliers de milliards gaspillés pour rien en tirer, sauf pour les collecteurs de commissions.
Les investisseurs dont il attendait d’autres milliers de milliards de francs pour faire décoller le reste de ses rêves d’émergence dans ses tiroirs se portèrent pâles, parce qu’assez lucides, le nez creux, pour deviner qu’entre pratiques corruptrices et esbroufes en tous genres, ce qui attendait dans ce Sénégal enveloppé d’une réthorique enjolivée n’était qu’une piètre arnaque.
Sur sa chaise anglaise, retrouvant son statut de déchargeur industriel, le voici qui pousse un sourire aussi béat que le bruit de son bas-ventre. Il se dit: “ce fut magnifique l’arrivée de la Covid19”.
D’un coup, d’un seul coup, le pays entier s’était tu. Tous s’étaient mis à son écoute.
Il en sourit encore, en ajustant ses nombreuses fesses sur le rebord de son sanctuaire.
Et il y a de quoi. Ce qu’aucune manœuvre de sa part, y compris les plus tordues, n’avait pu réussir, il s’en rendait compte maintenant, était facilité par la pandémie. “A quelque chose, malheur est bon”, admit-t’il, en silence…
Ce fut magique. De sa chaise, il revoit défiler ces moments où tout semblait militer en faveur de la réduction de ses tourments antérieurs meme si rien, sur les fondamentaux économiques, politiques et sociaux de la nation, n’avait pas encore été résolus, bien au contraire.
Le naufragé de Douloumadji en puissance qu’il était n’en avait cure.
Il se disait que l’essentiel était de jouir de cet instant de répit qui s’offrait à lui et dont la plus éclatante manifestation fut la série d’audiences accordées à ses opposants (plus de façade que réels) qui étaient venus non seulement lui donner du Monsieur le Président, c’est-à-dire le légitimer, mais se livrer à ses actes qu’ils venaient ainsi de valider, en particulier l’erection d’une loi scélérate d’habilitation lui permettant d’agir en dictateur aux mains libres. Il en était devenu suffisamment arrogant pour éjecter d’un coup de pied aux fesses les membres, tous vendus, de la société civile venus, en s’y faisant inviter, aux rencontres de la compromission de la présidence assiégée en quête de bol d’air.
Mais ici sur cette chaise, ses pensées n’ont guère le temps de divaguer. Comme une gifle surgie de nulle part, plantée sur son visage en sueur, quelque chose est venue brutalement le tirer de ses rêveries.
Il redresse le torse. Sa chaise en fait un crissement monumental qui masque l’autre bruit sorti de ses propres entrailles.
“Parsembleu”, s’écrit il, “qu’est-ce qui n’a pas marché?”.
Chef de guerre
La superbe est partie en fumée. Ce n’est plus qu’un chef de guerre défait qui contemple les dégâts.
Il le sait : il a perdu la bataille contre la Covid19 et la guerre de légitimité de son leadership qui lui tenait le plus à cœur.
Avant même que les premiers échos des trémolos de soutiens ne se dissipent, le pays, abattu, avait découvert ses supercheries, notamment son plan émergent de vol (PEV) pour filer à son fils et à ses acolytes, criminellement, les marchés à milliards de denrées alimentaires d’aide aux populations fragilisées par la pandémie.
Pendant que tous décomptaient les scandales à son passif, celui de la Senelec-Akilee n’étant qu’un de plus, le peuple sénégalais réalisait hélas qu’au lieu de profiter de l’élan collectif suscité par l’appel à l’union sacrée, le malfrat Macky avait d’autres idées en tête.
L’heure du bilan est là, terrible. Après deux mois de confinement des citoyens, aucune avancée n’a été enregistrée pour contenir la pandémie. C’est l’inverse qui se produit. Le virus est partout, en maître du jeu. Les morts se multiplient. La société est perdue, angoissée. Toutes les régions sont contaminées. Les services de santé sont exténués. L’aide alimentaire n’est jamais arrivée, les milliards ayant été détournés. L’école reste fermée. Le relâchement des mesures de confinement conçu dans ke désordre provoque des bousculades et attroupements monstres sources d’amplification du mal.
La loi d’habilitation qui lui à été votée est devenue une voie royale vers le piétinement de l’état de droit et des règles démocratiques, ouvrant ainsi une ère de césarisme illégal, insulte à la mémoire institutionnelle du Sénégal.
Et puis l’union sacrée a volé en éclats. Tous, même ceux qui s’étaient rendus à son invitation, pour éviter de heurter les sensibilités d’un peuple par trop accommodant, sont revenus de leurs illusions. Ils se sont sentis floués.
Pendant ce temps, l’homme de la chaise, chimiste à ses heures perdues, est déjà sur un autre front.
Dans son laboratoire, au milieu de ses éprouvettes, il a commencé à évaluer les chances de réussite de ce qu’il croit pouvoir être sa nouvelle potion magique: la formation d’un gouvernement élargi à ce qu’il appelle MDR l’opposition.
Les noms qu’il a mis dans ses éprouvettes sont ceux d’individus devenus noirâtres à force d’être recuits, amortis, médiocres, immoraux politiciens, acteurs de tous les retournements.
Gageons le, un nouveau fiasco est à l’œuvre.
Le peuple sénégalais, lâché entre les griffes du virus, n’a, lui, plus d’autre choix que de faire face à la mort que son commandant en chef lui a fourguée dans sa fuite éperdue pour sauver sa peau.
Seul bémol: il reste aux Sénégalais quelques forces pour crier à son destructeur son ultime souhait: le voir, lui, Macky, démissionner devant ses échecs passés, présents et pour réduire le nombre de ceux, futurs, qui sont l’horizon de quiconque escompte quoi que ce soit d’un porte-malheur, incapable, de son espèce.
La lamentable déculottée du Général capitulard, ayant conduit le pays au centre d’une pandémie qui y règne en seigneur, devra être enseignée dans toutes les écoles du Sénégal comme exemple d’un leadership en faillite. Pour qu’une telle erreur de casting ne se reproduise plus jamais dans son histoire…
Adama Gaye, Le Caire 8 juin 2020
Ps: Du procès Laminé DIACK
Par principe, au nom du respect que j’ai envers une distribution juste de la justice et ne connaissant pas les tenants et aboutissants des accusations portées contre Lamine DIACK, et refusant d’embaucher la même trompette que les populistes, démagogues, qui voient dans son procès une affaire similaire au crime raciste contre George Floyd, je préfère ne pas ajouter au flou qui entoure cette douloureuse histoire.
Je peux cependant dire que DIACK devra admettre ses fautes, notamment d’avoir placé son fils Massata, alors qu’il combattait Wade pour le même délit, au milieu des trafics juteux de la fédération mondiale d’athlétisme.
À cette erreur, symbole d’un népotisme indéfendable, s’ajoute le fait que l’ancien patron de l’athlétisme mondial n’a pas eu la main heureuse dans les choix de ses hommes de confiance. Tous l’ont trahi dès qu’il s’est retrouvé en maille avec la justice. Ou sont les Diagna Ndiaye, Cheikh Thiare et autres bénéficiaires de sa générosité ?
Pour n’en avoir jamais bénéficié et n’avoir cherché à y accéder, je suis à l’aise pour expliquer ce qui, à mes yeux, justifie une clémence pour un homme de 87 ans.
Il a assez payé ses turpitudes ou celles commises en son nom ou sous sa supervision.
Les traîtres qui l’ont encouragé ne valent guère mieux.
L’exemple par Seb Coe, son successeur à la tête de la fédération mondiale d’athlétisme, devenu son principal délateur.
Ayant eu la chance de participer aux côtés de ce dernier à la campagne de Londres pour abriter les JO2012, je peux témoigner qu’il pistait partout DIACK, telle une dame de compagnie, prêt à tout, pourvu qu’il l’adoube en dauphin.
J’ai été témoin de la corruption faite pour obtenir les voix des membres des comités nationaux olympiques africains dont DIACK était le parrain.
En clair, on peut dire qu’il était partie prenante autant que victime d’un système fondé sur le capitalisme-Casino dont on fait le procès ces jours-ci.
L’argent, les lambris, les fringues, les croisières, les montres de luxes etc, les aspects d’une conception matérialiste de la vie ont pu agir sur DIACK et il a prêté le flanc.
Que dire alors de celles et ceux, y compris Macky Sall, que DIACK a financés, entre autres politiciens? Quid du chanteur Youssou Ndour impliqué dans sa galaxie au point de lui organiser un combat de lutte pour l’honorer et sans doute le placer dans l’orbite d’une compétition pour prendre le leadership de la nation?
Le système Laminé DIACK a bénéficie à beaucoup, notamment aux villes et pays qui le savaient incontournable pour décrocher l’organisation d’événements sportifs mondiaux, notamment les Jeux olympiques.
De Moscou au Qatar, du Brésil au Japon, ils ne se s’y ont pas trompés en allant, stratégie de corruption en bandoulière, pour l’enrôler.
Qu’il ait cédé à leurs pièges est certes son erreur mais cela a été facilitée cependant par les larbins qui l’entouraient…
La grande question est celle de savoir pourquoi doit-il être le seul à payer dans cette entreprise systémique de blanchiment d’argent qui irrigue les veines du monde sportif ?
D’Antonio Sammaranch à Michel Platini, de Sepp Blatter à tous les autres grands responsables des sports dans le monde, qui peut trouver un seul nom immaculé parmi les dirigeants de cet univers qu’il importe, au même titre que la finance, la politique, mais aussi la santé, de revisiter pour les assainir.
La souffrance physique et morale de DIACK est suffisante.
Il a payé pour tous les autres. Le condamner, pis, l’emprisonner, pendant que d’autres fautifs déambulent, parce qu’ils sont blancs ou bien couverts par leurs pays, ça ne serait pas juste.
Enfin, il est quand même incroyable que nul en Afrique n’ait relevé la capture, la prise d’otage, fruit d’un complot ourdi par les services français pour attirer DIACK dans un guet-apens à Paris, en l’y faisant revenir de Dakar, sous le prétexte qu’il devait recevoir une distinction, et ainsi l’arrêter.
Imaginons un pays africain qui tendrait un tel piège à un Nicolas Sarkozy pour ses crimes en Libye ou à un George Bush pour ses pratiques de tortures prohibées.
Quelles que soient les charges contre eux, leur gravité, ils auraient été libérés sur l’heure. Sinon, une guerre leur serait opposée.
Pour conclure, autant Laminé DIACK doit être libéré moins parce qu’il a raison mais au nom de tous les paramètres ici indiqués, autant son fils Massata mérite un coup de sabot pour s’être débiné..