Mali: Grande mobilisation pour le départ du président IBK

par pierre Dieme

Des milliers de personnes occupent actuellement la Place de l’indépendance à Bamako.

Se réclamant de différents mouvements et organisations politiques hostiles au pouvoir, les manifestants ont répondu à l’appel du très populaire guide religieux Mamadou Dicko, qui appelle à la démission du president Ibrahima Boubacar Keita.

Un imam empêche le président malien de dormir sur ses deux oreilles. Les deux hommes se connaissent personnellement, le premier a aidé à faire élire le second en 2013. Mais la rupture entre l’homme de religion et l’homme d’Etat est consommée. Mahmoud Dicko a appelé les Maliens à manifester vendredi pour demander la démission d’Ibrahim Boubacar Keïta. Depuis, un vent de panique souffle sur Bamako. Car l’imam Dicko est aujourd’hui l’une des personnalités les plus influentes du pays, à 95 % musulman.

Il n’a pourtant plus aucun titre officiel. Après avoir dirigé pendant onze ans le Haut Conseil islamique du Mali (HCIM), Mahmoud Dicko, tenant d’un islam salafiste quiétiste – il récuse le terme «wahhabite» et se présente comme «sunnite» –, a passé la main l’an dernier à son rival Ousmane Madani Haïdara, un populaire prédicateur traditionnel. Il a immédiatement fondé un mouvement politique à son nom : la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS) dont il est devenu le «parrain». La Cour constitutionnelle lui a rappelé qu’au Mali, aucun «parti ne peut se constituer sur une base religieuse». La CMAS n’a pas présenté de candidat aux élections législatives.

Il n’a pourtant plus aucun titre officiel. Après avoir dirigé pendant onze ans le Haut Conseil islamique du Mali (HCIM), Mahmoud Dicko, tenant d’un islam salafiste quiétiste – il récuse le terme «wahhabite» et se présente comme «sunnite» –, a passé la main l’an dernier à son rival Ousmane Madani Haïdara, un populaire prédicateur traditionnel. Il a immédiatement fondé un mouvement politique à son nom : la Coordination des mouvements, associations et sympathisants de l’imam Mahmoud Dicko (CMAS) dont il est devenu le «parrain». La Cour constitutionnelle lui a rappelé qu’au Mali, aucun «parti ne peut se constituer sur une base religieuse». La CMAS n’a pas présenté de candidat aux élections législatives.

La proximité affichée entre les deux leaders islamiques est «l’alliance de la carpe et du lapin»,

 juge Gilles Holder. «Ils n’ont rien à voir sur le plan doctrinaire, sur le plan social, sur le plan économique. Ils sont simplement liés par un intérêt conjoncturel, relève le chercheur. C’est la force de Dicko : il agrège tous les mal servis du régime.»

L’appel au rassemblement de vendredi est d’ailleurs porté par trois organisations, le CMAS de Dicko, le Front de la sauvegarde de la démocratie, une coalition de partis d’opposition, et le mouvement Espoir Mali Koura du cinéaste Cheick Oumar Sissoko. Mais la masse des manifestants sera là pour Dicko.

Bras de fer risqué

«Il a réussi quelque chose d’énorme : l’islamisation de la contestation, estime Bakary Sambe, directeur du Timbuktu Institute à Dakar. Il est un point de ralliement islamo-nationaliste, démagogique mais structuré.» L’imam dénonce pêle-mêle les tripatouillages électoraux des législatives du printemps, qui ont débouché sur des émeutes dans plusieurs villes du pays, la gestion de l’interminable grève des enseignants, les affaires de détournement des contrats militaires, et l’effondrement sécuritaire du Mali.

«Il critique les tares de la chefferie traditionnelle, ajoute Bakary Sambe. Ce que l’Occident ne perçoit pas, c’est que le salafisme peut incarner une forme de modernité alternative pour la jeunesse.» «Son succès n’est pas strictement religieux, il ne peut pas rester sur le programme étroit du wahhabisme classique, nuance l’islamologue Youssouf T. Sangaré, maître de conférences à l’université de Clermont-Ferrand. Lorsqu’il est entré dans le champ politique, il s’est fait le porte-voix de tous les mécontents.»

En allant jusqu’à exiger la démission du président de la République, Dicko engage cette fois un bras de fer risqué. Il risque de faire vaciller un Etat déjà fragilisé par une interminable crise sécuritaire. La nervosité du pouvoir, aux abois, n’est pas non plus propice au bon déroulement de la marche de vendredi. Sa gestion de la manifestation, et les mots qu’il y prononcera, diront si l’imam est prêt à renverser la table, ce qu’il s’est gardé de faire jusqu’à présent, ou bien s’il entend simplement prouver qu’il est devenu le pivot incontournable de la politique malienne.

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Liberation

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