Les failles de l’Education nationale indexées

par pierre Dieme
L’annulation de dernière minute de la réouverture des classes a pris de court les acteurs de l’école. Derrière cette décision tardive et non consultative, selon plusieurs directeurs d’écoles se cachent de grosses lacunes sur le dispositif de préparation et même sur la politique de gestion du milieu éducatif. Reportage.
 
Pape Ndiaye, directeur de l’école publique «  Mor Fall » de Grand-Yoff, est déconcerté et dépité par l’information relative au report du retour dans les classes qui lui parvenue matinalement de son inspection. « Ce n’est pas normal ! C’est aujourd’hui, ce matin (mardi matin-ndlr) qu’on nous a informé que la réouverture est reportée à une date ultérieure», a déclaré de façon véhémente Pape Ndiaye. Et de poursuivre : « c’est de la pure dictature, une fuite odieuse de responsabilité de la part de l’État.

Pour une telle décision, il faudrait nécessairement consulter l’avis des enseignants et non se lever d’un seul coup pour signer le report d’une réouverture défendue bec et ongles ». Tout en se plaignant pour la cause des enseignants qui ont déjà fait le déplacement dans le cadre d’une réouverture, le directeur de la dite école a indiqué : «Ils savent pertinemment qu’une reprise n’est pas possible, mais ils attendaient que les enseignants s’insurgent contre leur volonté pour nous faire porter le chapeau d’un fiasco ». Et d’ajouter : « si l’année doit être blanche, il faut que l’État ait le courage de le dire haut et fort. Ce n’est la faute à personne. Ce n’est pas la peine de chercher à qui jeter la faute. Car, dans mon école, nous sommes prêts pour cette reprise ». Sur cette dernière assertion, son adjoint n’a pas hésité à ouvrir sa salle de classe qui semble être bien rangée ainsi que les toilettes. « Si c’était juste pour quelques cas de contamination à la Covid 19 de certains enseignants que le report est acté, je pense que l’État aurait pu tout simplement remplacer provisoirement ces enseignants ou trouver d’autres alternatives. Mais, bien sûr que non, ce n’est pas la véritable cause de ce report », a conclu Pape Ndiaye.

 «04 BOUTEILLES DE GELS, 01 CARTON ET 04 BOUTEILLES DE SAVON… POUR 644 ÉLÈVES»

 La rature sur la réouverture des écoles a levé le voile sur la face cachée de l’iceberg. Au niveau de l’école Catholique, « Notre Dame du Liban », le constat est palpable et concluant. «  Nous avons reçu un don dérisoire de la part de l’État », tonne Michelle Ndong, directrice adjointe de ladite école. Et de tout étaler : « 4 bouteilles de gels hydro alcooliques, un carton de savon « Madar » composé de 12 bouteilles et 4 autres bouteilles, 3 seaux lave- mains, 1314 masques, alors qu’ils avaient dit que pour chaque élève il fallait 03 masques alors que j’ai 644 élèves en classes d’examen, 3 thermo-flashs or ils ont fait savoir qu’il faut 1 thermo flash pour 100 élèves  ». Montrant ainsi du doigt ledit dispositif octroyé par le gouvernement, la directrice de rappeler que « le ministre de l’Education a insisté à chaque fois pour dire que s’il y a un élément qui manque au niveau du protocole, n’ouvrez pas  !  ». Raison pour laquelle « nous avons pris nos dispositions de surseoir jusqu’à une date ultérieure en attendant qu’ils complètent». Aussi, Mme Ndong a indiqué qu’il y a « plusieurs questions sans réponse au sujet de cette réouverture des écoles » car s’est-elle interrogée, «  on nous a dit que le masque est obligatoire. Or, les enseignants qui doivent donner le cours, il y en a qui ne peuvent pas rester avec le masque, ils ne peuvent pas faire 1 heure de temps avec le masque. Ainsi, comment pourront-ils dispenser un cours de 2heures voire plus avec le masque ? On parle de la distanciation sociale, cette craie qui va passer de main en main, est-ce que ce n’est pas un risque pour les enseignants et pour les élèves ? ». Ainsi donc a-t-elle poursuivi, « on nous dit que tout est prêt, mais je vous dis que c’est loin d’être le cas dans les écoles  ». Il faut que « l’État revoie et murisse davantage sa politique de la réouverture des écoles  ». Sinon, «  le privé catholique n’est pas prêt à mettre ses élèves en pâture comme cela. Nous sommes responsables des enfants qui nous ont été confiés et nous voulons les mettre dans de très bonnes conditions ».

INSUFFISANCES DANS LE PROCESSUS DE RÉOUVERTURE 


Aux cours Sainte Marie de Hann, le Principal d’Éducation et Coordonnateur vie scolaire de l’école, Fidèle Coly, relèvera plusieurs insuffisances dans le processus de préparation de la réouverture des classes. « Il y a plusieurs séries d’insuffisances. Déjà sur le retour des enseignants dans leurs lieux respectifs de travail, sur la distribution des kits sanitaires dans les écoles publiques », a déclaré Fidèle Coly. Avant de poursuivre  : «  raison pour laquelle le ministère et le gouvernement ont pris  conscience qu’il fallait reporter cette reprise ». Interrogé sur les cas asymptomatiques qui peuvent être des élèves et donc susceptibles d’en contaminer d’autres, le Principal s’est contenté de citer les propos du président de la République dans son adresse à la nation le 11 mai dernier. «  Le président dans son dernier message à la nation nous faisait comprendre qu’il fallait apprendre à vivre avec le virus. Un discours purement politique. Donc, on comprend », a-t-il déclaré. Et d’ajouter  : «d’ailleurs, déjà la réouverture juste pour les classes d’examens reste une équation irrésolue jusqu’à cette date. Donc, de ce fait, penser rouvrir pour toutes les classes, c’est utopique ».

Car, a-t-il poursuivi, « si on ne tient pas le délai pour les classes d’examens, je ne vois pas comment on pourra tenir le délai pour les classes intermédiaires ». Au niveau du lycée John Kennedy, « tout va bien » selon la proviseure. Mme Sarr a fait savoir en effet qu’au niveau de son lycée, « toutes les dispositions sanitaires sont prises pour une réouverture pour les classes d’examens ». Non sans rappeler que « l’établissement est une école publique et qu’elle est sous la tutelle du ministère de l’Education nationale ».
 

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