La contamination du frère du président, Aliou Sall, diagnostiqué positif à la Covid-19, a peut-être eu l’effet d’un contre-feu sur la polémique autour de l’honorariat accordé aux anciens présidents du Cese. Mais le débat reste entier, et l’ancien ministre du Budget, Mamadou Abdoulaye Sow, joue les prolongations.
L’invité de Baye Oumar Guèye sur Sud Fm, ce dimanche, a démonté pièce par pièce l’argumentaire de l’Etat qui se serait compromis en voulant établir la fausseté du décret largement partagé dans les réseaux sociaux. En réalité, d’après l’ancien ministre de Wade, ceux qui se sont employés à nettoyer ont laissé des «indices concordantes» qui confirment que tous les trois décrets ont été façonnés dans le même moule, dans le même laboratoire et par la même personne.
«Quand j’ai lu le supposé décret et le faux décret, je me suis dit, la République est bien généreuse vis-à-vis des anciens présidents du Conseil, comme du reste elle l’est avec les anciens chefs d’Etat. Ils sont pris en charge à vie aux frais du contribuable», lance-t-il tout de go.
Avant d’ajouter : «Par curiosité intellectuelle, j’ai procédé à l’analyse comparée du faux décret et du décret authentique publié dans un site web. Ce que j’ai relevé, c’est qu’il y a des indices concordants qui me permettent de dire que le faux décret et le décret authentique, tous les deux ayant le même numéro, ont été intimement fabriqués dans le même service. C’est ma conviction.»
Il s’explique : «Dans les visas, le faux décret vise la loi constitutionnelle qui est relative à la révision constitutionnelle du 28 septembre 2012. Visa qu’on ne considère pas comme superfétatoire dans le faux décret, parce qu’on avait visé déjà la Constitution ; on n’a pas besoin de revenir visé. Ce qui est étonnant, c’est que dans l’authentique décret publié dans Dakaractu, ce visa n’existe pas dans ce décret-là. Mais qu’est-ce qui fait figurer que cette loi-là figure comme visa sur le décret du 21 avril qui accorde l’honorariat à Mme Aminata Tall et qui est publié dans le Journal officiel ? Pourquoi un décret pris le 21 avril reconduit cette bourde commise au niveau du supposé faux décret ?»
L’autre problème également intriguant, d’après M. Sow, c’est que «si vous prenez le supposé faux décret, le décret authentique publié dans Dakaractu et le décret publié dans le Journal officiel, tous les trois décrets ont commis une erreur sur la date de la loi organique relative à l’organisation et le fonctionnement du Conseil économique, social et environnemental. Si les deux derniers décrets sont authentiques, comment ils ont pu reconduire une erreur de date commise dans le faux décret ? On a dit que cette loi organique est datée du 28 septembre, alors que la date réelle, c’est le 28 décembre».
Autre chose encore plus «troublante», c’est le numéro du décret. «Le secrétaire général de la Présidence a le monopole de la tenue à jour du fichier chronologique des enregistrements des actes réglementaires, informe-t-il. Comment l’auteur du faux décret a-t-il pu savoir qu’à la date du 17 avril, son décret devait porter le n°2020-964, soit le même numéro que celui du décret dit authentique ?».
A en croire Mamadou Abdoulaye Sow, les mêmes erreurs de ponctuation trouvées dans le supposé faux décret ont été reconduites dans les décrets estampillés «Authentique». Par exemple : «Au niveau de l’article final du faux décret et l’article final du décret estampillé ‘Authentique’ publié par Dakaractu, vous verrez qu’après ministre d’Etat, il y a virgule avant secrétaire général de la présidence de la République. Comment le rédacteur de l’authentique décret a-t-il pu omettre la virgule, comme c’est le cas dans le faux décret ?». «C’est comme si on s’était basé sur le faux décret pour faire l’authentique décret», conclut-il.