Benjamin Netanyahu va faire face à ses juges, dimanche en début d’après-midi, à Jérusalem. Le Premier ministre israélien est accusé de fraude, d’abus de confiance et de corruption dans trois affaires. Il clame son innocence et dénonce un complot.
Le procès n’a pas encore commencé mais il est déjà historique. Celui qui fut le plus jeune Premier ministre en Israël et qui détient le record de longévité à ce poste va faire face à ses juges, dimanche 24 mai, pour répondre d’accusations criminelles et de corruption au cours de son mandat. Benjamin Netanyahu est attendu en début d’après-midi au tribunal du district de Jérusalem pour une bataille judiciaire qui s’annonce longue et rude.
C’est une première en Israël : avant lui, aucun Premier ministre en exercice n’avait été jugé dans l’exercice de ses fonctions. Ehud Olmert, ancienne étoile du Likoud, avait été inculpé pour corruption mais après avoir démissionné de son mandat de Premier ministre. Il avait été reconnu coupable d’avoir touché des pots-de-vin avant de passer seize mois en prison.
Un scénario que cherche à éviter Benjamin Netanyahu. Il clame son innocence et dénonce un complot ourdi par la justice. À 70 ans, il va comparaître pour corruption, abus de confiance et fraude dans trois dossiers pour lesquels il encourt jusqu’à 10 ans de prison.
Cigares, champagne et faveurs médiatiques
Il est d’abord accusé d’avoir reçu pour 700 000 shekels (180 000 euros) de cigares, champagne et bijoux de la part de personnalités richissimes en échange de faveurs financières ou personnelles.
Il est aussi accusé d’avoir tenté de s’assurer une couverture favorable par le plus grand quotidien payant d’Israël, le Yediot Aharonot. Et surtout, la justice le soupçonne d’avoir accordé des faveurs gouvernementales au patron de la société israélienne de télécommunications Bezeq en échange d’une couverture médiatique favorable d’un des médias du groupe, l’influent site Walla.
Après des mois de suspense, le procureur général Avichaï Mandelblit a inculpé Benjamin Netanyahu en novembre 2019, ce qui avait été considéré alors comme un « arrêt de mort politique » par ses détracteurs. Mais « Bibi » a réussi à se maintenir à la tête de son parti, à terminer en première place aux dernières législatives, à négocier un accord de partage de pouvoir avec son rival Benny Gantz et, ainsi, à rester Premier ministre.
Un procès qu’il a voulu éviter
Benjamin Netanyahu a cherché à éviter ce rendez-vous, déjà repoussé en raison du Covid-19. « Il a demandé à ne pas être présent pour l’ouverture de son procès et éviter d’être filmé, photographié dans l’enceinte du tribunal sur des modestes bancs en bois devant ses trois juges », détaille Antoine Mariotti, correspondant de France 24 en Israël.
Mais le tribunal a confirmé que le Premier ministre devait être présent à l’audience comme n’importe quelle citoyen israélien pour la lecture des actes d’accusation. « Une personne ne peut être jugée pour des allégations criminelles qu’en sa présence », ont insisté les magistrats.
Ensuite, les trois juges du tribunal pourront demander au Premier ministre d’assister à différentes audiences, mais il ne sera pas présent en permanence pour ce procès qui peut durer entre un et trois ans, avec les rappels. Pendant ce temps, le Premier ministre pourra continuer à exercer ses fonctions.
« Un nuage noir au-dessus de sa tête jusqu’au verdict »
En Israël, le Premier ministre ne dispose d’aucune immunité judiciaire mais il n’a pas à démissionner ou à se retirer le temps de son procès. « Il va pouvoir gouverner mais le procès va nuire à son image et sera comme un nuage noir au-dessus de sa tête jusqu’au verdict », estime Antoine Mariotti.
« En Israël, vous ne devez quitter vos fonctions que si vous êtes condamnés et que vous avez épuisé tous vos recours », précise-t-il. « Même s’il était condamné, il ne serait pas incarcéré avant 2022, le temps d’épuiser tous les recours devant la Cour suprême ».
Sachant que Benjamin Netanyahu est censé passer le relais à Benny Gantz en novembre 2021, il y a fort à croire qu’il finisse son mandat. « À moins qu’il ne se présente d’ici là à la présidence, à la fin du mandat de Reuven Rivlin, comme le redoute certains de ses détracteurs », ajoute Antoine Mariotti. Le poste est honorifique mais il dispose d’une immunité judiciaire.