Je m’engage sur un terrain que je ne maîtrise guère. C’est compliqué. Il s’agit d’un sujet très délicat. Donc, je vais avancer sur la fine pointe de mes pieds pour arpenter cette surface boueuse. En plus, je suis resté éloigné du bercail depuis longtemps. Je ne suis pas fonctionnaire et je n’ai jamais exercé de fonctions électives au Sénégal. Vous comprendrez aisément ma réticence à foncer tête baissée dans ce sujet épineux . Le sujet auquel je fais référence c’est évidemment l’existence hypothétique de commissions occultes dans les marchés publics au Sénégal… Je n’ai aucune once de preuves pour étayer ces propos. En fait, je discutais comme souvent avec un ami de divers sujets sur l’Afrique. Nous avons évoqué le séisme provoqué par le procès Vital Kamerhe en République Démocratique du Congo (RDC). M. Kamerhe, économiste de renom, est un proche du président Felix Tshisekedi. Il a été arrêté pour corruption au sommet de l’état dans l’exercice des missions de services publics dont il avait la charge. Son procès est d’ailleurs en cours en RDC.
Mon ami, sentant mon agacement par rapport à ce sujet me dit: « tu sais, la situation est pire au Sénégal . Là bas, ce sont les commissions occultes qui enrichissent certains fonctionnaires du trésor public ». Et il m’explique alors, qu’il semblerait que quand une entreprise gagne un marché public et que cette dernière reçoit un chèque de l’état, l’agent payeur demanderait une commission d’un certain pourcentage du chèque pour pouvoir payer. Si l’entreprise ne s’exécutait pas, l’agent de l’état dirait simplement que le trésor n’a pas de liquidités.
Je peux vous dire que je suis horrifié par de telles révélations si elles sont avérées. Sans preuves formelles, je ne peux en aucun cas m’étaler sur ce sujet.
Par contre, je ne peux que m’incliner devant le travail de M. Pape Alé NIANG. Journaliste, pétri de talents et de courage, il fait figure de dernier des Mohicans, dans le paysage audiovisuel du Sénégal. Ses chroniques resplendissantes sont d’une pertinence et d’un professionnalisme rare dans le microcosme médiatique de notre pays. Pour ne citer qu’un exemple, googlisez, puis écoutez sa chronique du 29 janvier 2020.
Parler de courage intellectuel de ce vertueux fils du joloff est une lapalissade. Vous saurez que M. Pape Alé Niang rime avec ces qualités citées plus haut et qui sont indispensables pour exercer dans le noble métier. Je dois avouer que sans preuves, la morale me dissuade de m’étaler sur des sujets aussi délicats que la corruption, la mal gouvernance ,les commissions occultes ou tant d’autres « crimes de gestions publiques » au Sénégal. Car sans preuves il n y a pas d’arguments qui tiennent. Pour autant, à défaut de mettre mon petit grain de sel dans le combat oh combien important de M. Niang, je lui témoigne mon soutien indéfectible. En même temps, je me désole de le voir seul, si seul, dans cette arène qu’il a inauguré en solitaire vaincu d’avance. Aussi longtemps que cette caste de roitelets voraces sera aux affaires dans nos pays, les espoirs de développement seront vains. Ce constat étant une évidence, l’honnêteté intellectuelle et la dignité auraient dû précipiter tous les patriotes moralement intègres à ses côtés. Au lieu de cela, nous nous réfugions en majorité dans le silence coupable et même complice. Dans cette majorité silencieuse, il y a les uns qui se taisent parce qu’ils n’ont aucune preuve des malversations, alors même qu’ils subissent les conséquences terribles de tous ces crimes économiques . Mais il y a les autres qui savent tout et, par égoïsme ou par lâcheté, ne disent rien, au final le résultat est bien visible de tous : nos pays sont exsangues…
Tant que cet état de fait durera, le Sénégal végétera dans les bas-fonds du progrès économique et social. Car « quelque soit la volonté et la persévérance d’un cultivateur muni d’un sac troué, ses efforts de le remplir de maïs se solderont toujours par un échec ».
BADJI Lamine