Une année mathématiquement irrécupérable, selon les syndicalistes

par admin

L’année académique 2019-2020 est partie pour être blanche à défaut d’être invalidée. Pour les syndicalistes de l’enseignement que sont Saourou Sène, secrétaire général du Syndicat autonome des enseignant du moyen et du secondaire du Sénégal (Saems), Ndongo Sarr du Cadre unitaire des syndicats de l’enseignement moyen-secondaire (Cusems) et Dame Mbodj du Cusems/Authentique, la reprise des cours pour les classes d’examen annoncée pour ce 02 juin pose problème par rapport au transport, au dispatching des cours, à la distanciation et aux mesures de protection des enseignants et des élèves.

Le chef de l’Etat a fixé la reprise des cours pour les classes d’examen à partir du 02 juin prochain. En prévision de cette rentrée, les inspecteurs d’Académie (Ia) et les inspecteurs de l’éducation et de la formation (Ief) invitent les enseignants à se présenter dans leurs établissements avant cette date. « Ce qui veut dire que les enseignants devront rejoindre leurs postes à partir du 28 mai prochain », ironise le secrétaire général du Syndicat autonome des enseignants du moyen et secondaire du Sénégal (Saemss), Saourou Sène.

Pour rappel, le gouvernement avait pris la décision de fermer les écoles pour, dit-il, circonscrire la maladie et éviter une contamination massive des élèves et des enseignants au coronavirus. Deux mois après, et pendant que le virus continue son bonhomme de chemin avec la multiplication des cas communautaires et des cas contacts, sans compter les décès, on demande aux enseignants d’aller faire les cours pour les élèves en classe d’examen. Or, lorsque le président avait décidé de fermer les écoles et les universités, tous les enseignants avaient rejoint leurs familles.

Entretemps, des mesures d’interdiction du transport interurbain avaient été prises par les autorités. Les enseignants se demandent donc par quels voies et moyens de transport vont-ils pouvoir rejoindre leurs lieux de travail ? Quels sont les dispositifs de prévention prévus pour eux enseignants, leurs collègues surveillants et les élèves ? « Ce sont des questions qu’on se pose avec acuité et auxquelles seul le gouvernement est habilité à répondre. 

Les gens doivent rentrer à partir du 28, et même si le gouvernement affrète des cars pour leur transport, le virus est là. Beaucoup d’enseignants servent dans des zones infectées comme Fatick, Kaolack, Louga, Thiès… », a expliqué Saourou Sène. A l’en croire, non seulement cette date du 02 juin est prématurée mais encore « aujourd’hui,  il  y  a  un  risque  d’une  année blanche dont ils veulent faire porter le chapeau aux syndicalistes ».

Son collègue syndicaliste Dame Mbodj n’y va pas avec le dos de la cuillère. « Dans les 6000 abris provisoires éparpillés un peu partout dans le pays, la date du 02 juin n’est pas possible. On sera en pleine saison hivernale. Encore que ce sera juste un mois et demi de cours avant la date fixée pour faire les examens car il y a les compositions, les conseils de classe, les contrôles… Encore que le livret de notes doit devancer le candidat à son centre d’examen. Donc il est impossible d’aller en  examen  sans  faire  des  compositions. Avec ce tâtonnement, ils ont voulu faire le rattrapage de quatre mois perdus. 

Les deux regroupements  syndicaux, G7 et G20,  ont observé deux mois de grève, de mi-janvier à mi-mars, plus le mois d’octobre où il n’y a pratiquement pas de cours, et les deux mois du coronavirus. L’année est perdue, et mathématiquement  elle  est  irrécupérable », soutient le secrétaire général du Cusems/Authentique (lire par ailleurs son interview ci-contre). « A  coup  sûr,  cette  décision  pose  problème » ! Ces mots de Ndongo Sarr ont tout leur poids. Pour ce syndicaliste, membre du Cadre unitaire des enseignants du moyensecondaire (Cusems), « le problème, ce n’est pas seulement le transport des enseignants et  les  conditions  dans  lesquelles  ils  vont prendre ces moyens de  transport en commun. Est-ce que les autorités vont aussi mettre  à  la  disposition  des  élèves  et  des enseignants des masques de protection, des dispositifs de lavage des mains, des gels… ? Il faudrait qu’on nous dise comment s’y prendre. Aussi,  parait-il,  qu’ils vont éclater les classes en cohortes de 15 à 20 apprenants. Pour  une  classe  de  60  élèves,  ce  sera  au moins trois cohortes. Si c’est en philosophie, par exemple, l’enseignant va tenir une cohorte  mais  qui  va  tenir  les  deux  autres groupes ? Sinon, le seul professeur dont dispose l’école sera obligé de faire trois fois le même cours. On sera obligé de refaire les emplois du temps. Cela risque d’impacter les enseignements, surtout dans le privé », a expliqué ce camarade d’Abdoulaye Ndoye du Cusems. A son avis, « les gens qui sont dans leurs bureaux, sous leurs climatiseurs, n’ont aucune idée du comment fonctionnent les enseignements-apprentissages ». Au contraire, estime-t-il, leur priorité c’est de sauver l’école même si c’est au prix d’une vie. « Il fallait faire comme l’Espagne et la France  en  repoussant  les  choses  jusqu’en septembre  pour  y  voir  plus  clair  avec  ce virus. On a toujours dit qu’il fallait attendre qu’il  y  ait  une  baisse  significative  de  la courbe avec des indicateurs pour en attester », rappelle-t-il.

Ndongo Sarr estime qu’il y a des préalables à satisfaire préalablement à toute reprise des cours, notamment le transport des enseignants et des élèves, la distanciation et les mesures de protection… Par conséquent, « l’Etat doit prendre ses responsabilités, son courage à deux mains, et déclarer une année blanche, car l’année est foutue ».

LE REFUS DU COLLECTIF DES GOUVERNEMENTS SCOLAIRES

Le Collectif des gouvernements scolaires du Sénégal a refusé toute idée d’un retour dans les classes le 02 juin. Ce mercredi, il a tenté de tenir un point de presse à Guédiawaye. Un point de presse interdit par les autorités. Cela n’a pas empêché le Collectif d’afficher son apposition. « Nous refusons catégoriquement de retourner dans les salles de classe. C’est vraiment désolant que nos gouvernants, nos dirigeants veuillent nous sacrifier.

Sauver une année ne veut pas dire qu’on va accepter que l’on mette en péril nos vies qui nous sont chères » a indiqué mercredi le porte-parole du jour de ce collectif, Maguette Ba. Youga Faly Diop, membre du collectif, martèle que « nous sommes contre la proposition du président de la République. Et nous n’accepterons pas que l’on nous jette en pâture sans des mesures sécuritaires et sanitaires ». « Lorsqu’on fermait les salles de classes, on était à moins de 20 cas. Aujourd’hui, nous nous retrouvons avec plus de 2000 cas. Nous disons à tous nos camarades de refuser d’aller à l’école le 02 juin puisque ces autorités ne peuvent pas nous assurer la sécurité.

De plus, la plupart d’entre nous ne sont pas de Dakar. Et Dakar n’est pas le Sénégal. La plupart des élèves doivent quitter les régions pour rallier Dakar ou vice-versa. Qui va assurer leur sécurité ? Comment peuvent-ils (les agents des forces de l’ordre) nous assurer qu’ils vont identifier l’élève du commerçant ? Donc laisser les élèves ou la population circuler, c’est les sacrifier. Nous n’allons pas accepter d’être les agneaux du sacrifice. Les propositions faites par le gouvernement ne sont pas pertinentes car elles exposent les élèves aux risques ».

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