Préparatifs de la Korité : Tailleurs, teinturiers et vendeurs de tissus cherchent clients

par admin

A moins de deux semaines seulement de la Korité 2020, les ateliers de couture qui, jadis, étaient pris d’assaut sont actuellement quasi-déserts. Parallèlement, les teinturiers peinent eux aussi à tirer leur épingle du jeu. Tout cela pour dire que Covid-19 dicte sa loi là aussi. Toutefois, certains parmi eux, plus stratèges et tactiques, parviennent à s’en sortir bien grâce à leurs astuces. Touba Darou couture, un atelier de tailleurs, les clients se font désirer. L’heure n’est plus aux altercations entre tailleurs et clients, ni aux navettes incessantes de ces derniers qui passaient faire leurs commandes ou s’enquérir de l’état d’avancement de cellelà (les habits). Cet atelier, qui jadis grouillait de monde, est aujourd’hui plongé dans un silence, perturbé parfois par le ronronnement des machines. Le maître des lieux Diagne Diaw, la quarantaine, couturier depuis 20 ans, passe tout son temps à guetter l’arrivée des clients potentiels. Une toute première dans sa carrière : «depuis que je suis tailleur, je ne suis jamais confronté à une telle situation. Bien vrai que le nombre de commandes régresse chaque année, mais celles-ci sont catastrophiques. Imaginez, à moins de 2 semaines de la fête, je n’arrive même pas à avoir plus de 10 commandes et la plupart c’est pour des petits garçons et des fillettes qui me reviennent à 2500 ou 4000 maximum. J’ai dû libérer mes apprentis, actuellement on est 3, pourtant on est presque inactif» se plaint-il tristement. Et il n’est pas le seul à vivre cette situation. Au contraire, l’inquiétude de Diagne Diaw en dit long sur le quotidien de plusieurs autres de ses camarades de métier. Covid-19 et ses effets ayant impacté tous les secteurs d’activité, nombreux sont des tailleurs qui continuent de se tourner les pousses, alors qu’à pareille moment, d’habitude, tous professionnels bouclent déjà leurs commandes pour la Korité. Il ne leur reste plus qu’à travailler d’arrache-pied pour honorer ces engagements. LES TEINTURIERS AUSSI IMPACTES Ici à Khar Yalla, un quartier populeux de la Banlieue Dakaroise, l’on ne pouvait passer par le célèbre terrain de football (du quartier) sans être attiré par le concert des coup de pilons, qui s’abattaient sur des habits, des teinturiers établis en ces lieux, mêlés aux cris des joueurs et aux klaxons des véhicules. Mais, aujourd’hui, le décor est autre. Installé presque à terre, sous l’atmosphère morose de la ville en ce contexte épidémiologique, il passe désormais tout son temps à humer l’air suffoquant des lieux et à contempler de manière reflexe l’ambiance que leur offraient les va-et-vient, les quelques passants et véhicules. Sounounou Diallo, un jeune teinturier, âgé d’une trentaine d’années, explique. «Même avant l’épidémie, nos activités étaient aux ralentis parce que nous sommes concurrencés par les revendeurs de «Thioup-Mali». Mais, actuellement, la maladie nous a complètement terrassés. On peine à écouler nos marchandises et on ne reçoit plus de commande, depuis un moment. C’est trop dur, d’autant plus que je suis étranger ici et j’ai une famille à nourrir. Je m’inquiète», argue-t-il. Abondant dans le même sens, son collègue Salif Diallo avance : «on ne reçoit même plus de commande pour la reteinte. Les rares clients qui viennent, sont ici pour le service de la lessive. Je me demande même si la Korité sera célébrée cette année», s’interroge-il. LE DESARROI DES VENDEURS DE TISSUS Depuis que le préfet du département de Dakar a publié un arrêté fixant provisoirement les jours et horaires d’ouvertures des lieux de commerce, la vente de produits non-alimentaires se fait 2 jours sur 7, seulement les mardis et jeudi. Une décision qui a plongé les vendeurs du marché HLM dans un désarroi total. Amary en est l’exemple, il criait déjà son ras-le-bol, lundi dernier. «Les autorités n’éprouvent aucune compassion à notre égard. Ils n’en font qu’à leur tête. S’ils étaient plus humains et sensibles à notre égard, ils pouvaient nous laisser vendre tous les jours, c’est notre période (de traite) et ça tout le monde le sait», peste-t-il. Avant de poursuivre : «pour ma part, je n’ai pas vu l’utilité de renouveler ma marchandise parce que ça revient à investir dans le néant, vu que les clients ont même peur de venir au marché à cause des messages véhiculés. J’aurai préféré qu’on ferme totalement les marchés, à ce rythme. Ça revient au même, comme ça tout le monde saura qu’on a rien dans les poches», s’indigne-t-il en ruminant sa colère. Pourvu que la décision du chef de l’Etat exprimée lundi soir à 20h lors de son message à la nation, de rouvrir les marchés, 6 jours sur 7, parvienne à leur redonner espoir, à quelques jours de la fête. VENTE EN LIGNE, UNE ALTERNATIVE A LA CRISE ECONOMIQUE ET SANITAIRE Pour s’adapter à la situation actuelle avec la restriction des déplacements, Mme Coulibaly a Complétement orienté sa vente de tissus sur les réseaux sociaux. Sur son mur Facebook et Instagram, elle fait souvent des offres et annonces avec en illustration des photos libellées et publiées à cet effet. «Vente de tenues chics et classes à des prix abordables, c’est chez Nénette création que ça se passe», poste-t-elle, numéro de téléphone et adresse également joints à la publication. Et, en commentaire, des internautes s’extasient sur les modèles en demandant les prix ou en passant des commandes. Interpellé sur son activité du moment, elle lâche : «j’ai un atelier de couture à la cité Damel, je couds, je vends des tissus et des habits prêt-à-porter. Au début de la crise, les clients se faisaient rare et certains même avaient la flemme de venir récupérer leurs commandes, certainement à cause de la maladie. Et comme j’avais déjà une page Facebook et Instagram dédié à mon complexe, j’ai décidé d’orienter plus mes activités sur les réseaux sociaux, déjà que j’ai beaucoup de «followers». Il a fallu que je me penche plus sur les prêts-à-porter et fasse des propositions de livraison gratuite. Et depuis, j’ai connu un léger avancement, même si les affaires étaient plus fructueuses les années précédentes. Je m’en sors tant bien que mal», martèle la charmante dame. RECOURS A LA TONTINE, POUR VENDRE Autant stratège et tactique que la Mme Coulibaly, Mami, étudiante en Ressources humaines, s’est penchée depuis 3 ans déjà dans la vente de cheveux naturels. Dès le début de la pandémie, elle a eu la pertinente idée de proposer des tontines de cheveux à ces clientes pour écouler ces marchandises et libérer son fournisseur à la date retenue. «Les temps sont durs et la crise sanitaire n’arrange rien. C’est pourquoi, depuis début mars, j’organise des tontines de 10 personnes et la cotisation bihebdomadaire dépend de la nature (frisé, raid, semi-ondulé etc.) de la mèche. Il y en a qui cotisent 10.000 F CFA, d’autres 20.000 jusqu’à 30.000 F CFA. Et, chaque 2 semaines aussi, il y a une gagnante. Plus de 10 personnes ont déjà récupéré leurs cheveux, comme convenu, et ça arrange les 2 parties. Particulièrement, j’y gagne, je n’ai plus besoin de sortir pour vendre. Je fais du crédit aussi à mes clients habituels», a-t-elle laissé entendre.

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