Les uns suent pour tous; les autres sucent seuls—Citation Adama Gaye
Poser un regard optimiste sur les choses, les êtres et la vie est l’attitude de tout politicien, son arme étant l’optimisme forcé ou forcené, mais comment l’adopter à la lumière de la rapide, quasi irréversible, décadence qui frappe notre société, la sénégalaise ?
En engageant ce grave débat ce matin, qui reste ouvert aux contributions de celles et ceux qui me lisent ou auront l’occasion de tomber sur ce texte via les partages ou reprises qu’il pourrait susciter ailleurs, j’ai conscience d’ouvrir un délicat chantier. Voire de ramer à contre-courant de ce que notre peuple souhaite recevoir comme image de lui-même en face d’un miroir, déformant ou authentique.
Précisons
Avant d’aller plus loin, quelques précisons sont utiles:
-je ne suis pas un fou ni ne suis atteint de quelque maladie, Dieu merci, contrairement à ce que certains, incapables de s’opposer à mes faits et chiffres, à mon argumentaire, tentent d’accréditer dans le seul but de détourner l’attention qu’il suscite de divers cercles, à l’intérieur du Sénégal, en Afrique et ailleurs dans le monde;
-je ne touche pas une seule goutte d’alcool;
-je n’ai aucune haine envers qui que ce soit même si l’exigence de la rigueur intellectuelle m’a parfois amené à charger au vitriol des personnes dont je reconnais le talent (Bachir Diagne, Manar Sall, Tidiane Thiam, Antonio Guterres etc) simplement parce qu’ils ont été associés à des projets ou postures justiciables d’une analyse sans fard, dure et un tantinet décapante: qui aime bien, châtie bien, on le sait;
-je ne m’en prends pas à Macky Sall et sa bande à la légère: je le fais, preuves à l’appui, et tout le monde a entendu le défi public, sur l’honneur, que je lui ai lancé sur les crimes financiers, y compris le vol par ses soins de milliards que j’ai obtenus pour le Sénégal, qu’il n’a pas osé relever.
Je n’évoquerai pas ma vie privée ici en relation avec ma famille ni avec mon épouse décédée pour laquelle je prie, sauf à dire que, de bout en bout, j’ai été décent.
Ces préalables sont utiles à l’éclairage du sujet que je veux mettre sur la table afin que nul n’y voit quelque ressentiment mais qu’il puisse être débattu sereinement dans le souci de trouver des réponses aux grandes interrogations qu’il soulève concernant la société sénégalaise.
La dimension personnelle en étant extirpée, ayons alors le courage d’entrer dans le vif du sujet. C’est à dire d’avoir le courage de dire en effet que le Sénégal baigne dans une médiocrité tellement handicapante que son renouveau, bien avant la victoire sur le Corona, passe par sa maîtrise.
Montée en puissance
J’ai, pour commencer, le sentiment que la montée en puissance de la médiocrité dans notre société est un phénomène récent.
Jusqu’à la fin des années 1970, elle était un espace de compétition où se distinguaient les meilleurs en tout, notamment à l’école, dans les sports, dans l’administration, dans la tenue des familles, dans l’ordonnancement des normes sociétales articulées autour de la discipline, du patriotisme et du respect des uns et des autres, en commençant par la sanctuarisation de la vie privée.
Que je sois obligé d’entamer cette conversation en énonçant une série de “disclaimers”, de clarifications utiles, est la preuve la plus évidente que les jugements de valeur ont pris le dessus dans la conversation et les interactions au sein de notre pays.
C’est une tendance lourde qui a pris son envol après le départ du pouvoir de Léopold Sedar Senghor. premier président du Sénégal. Jusqu’alors, peperes, les sénégalais vivaient dignement dans le respect de valeurs et vertus partagées. Ils en faisaient de même dans l’observance des harmonies ethniques et confessionnelles, avec au dessus de l’architecture un État bienveillant. Lequel semblait se poser en arbitre d’une compétition méritocratique et solidaire.
En dehors de quelques dérapages et de la marginalisation des élites qui lui étaient hostiles, le régime Senghorien, plus terrien et socialiste, était celui d’un bon père de famille auquel on tolérait ses errements poétiques chers à son âme.
Tout commence par se deglinguer sous son successeur, un Abdou Diouf paresseux et plein de fatuité qui laissa se développer sous son aisselle des forces du mal, mobilisées dans des journaux créés pour la circonstance et des groupes de réflexions spécialisés dans sa laudation.
Ce culte de la personnalité le déconnecta des réalités ambiantes et justifia son congédiement en l’an 2000 par un peuple assoiffé de changement.
Ce qui fut une victoire retentissante d’Abdoulaye Wade, le promoteur de cette dynamique théorique, se révéla être le vrai tournant dans la descente du Sénégal vers l’abysse des perditions, des prédations et de la perte de repères. Wade choisit de traduire le rêve de changement en projet monarchique pour déblayer le terrain à son fils, Karim, sorti du néant et placé au cœur de l’appareil d’état.
Pour lui faciliter la tâche d’une ascension au sommet, rien ne fut épargné pour faire la promotion des médiocres et criminels afin qu’il puisse luire a leurs côtés.
Les ressources du pays commencèrent à faire l’objet d’un saccage qu’elles n’avaient jamais subies avant. Wade, s’écartant de l’égalité confrérique, prétextant d’une soumission at mouridisme, entreprit de déverser des milliards de francs de corruption dans la ville de Touba et auprès des dignitaires de la confrérie élue.
Dans ses calculs de prestidigitateur, il finit cependant par se perdre. Et se fit doubler par le plus inattendu des larrons, le plus grand médiocre qu’il avait identifié pour ses talents de voleur et sa capacité à couvrir ses forfaits les plus crapuleux.
Monstre
En somme, sans s’en rendre compte, il avait fabriqué un monstre qui n’avait jamais pensé dépasser un niveau de chef de service dans une petite boîte ou de faire sa vie comme le resquilleur qu’il était devenu en immigré aux usa.
Depuis 2012, le Sénégal se trouve donc par la force de malheureuses circonstances entre les mains d’un Macky Sall, sa malédiction la plus mortifère.
Pour qu’il en soit ainsi il a fallu que le degré de médiocrité qui est maintenant le signe distinctif du peuple sénégalais ait atteint un niveau jamais imaginé. Les faits, en cette ère de coronavirus, l’attestent:
-le Senegal, sans réagir, a laissé Macky faire de lui le seul pays africain où les pleins pouvoirs sont donnés à son (illégitime) Président, ne partageant cet ignoble statut qu’avec le Hongrois Victor Orban, le dictateur le plus connu au monde;
-tous les leviers de commande du pays sont aux mains de Macky et de sa famille, au point que le saltimbanque chanteur en banqueroute Mame Gor Djazaka ne craint pas de lui proposer de nommer son épouse, Marieme, au poste de Ministre de la culture;
-les chefs religieux ferment les yeux sur les pilleurs et prédateurs de la nation, de Samuel Sarr, Mbaye Gueye Emg, Makhtar CISSE, pour ne citer qu’eux, qui viennent se réfugier auprès deux moyennant un transfert de leurs rapines en leur direction;
-l’opposition s’aplatit quand ailleurs, de la France aux Usa, le jeu démocratique n’a jamais été éteint par la survenance du coronavirus;
-le peuple semble se réjouir des querelles entre les pilleurs de la Senelec, de la Sar et des marchés publics;
-nul ne se lamente face à la dissipation, sur fond de détournement et de mauvaises décisions, des ressources les plus précieuses du pays, des hydrocarbures aux minerais d’or, de fer, de zircon et j’en passe…
Comble de la médiocrité ambiante, dès qu’une personne décide de ne pas en être, de la dénoncer, de s’en écarter, aussitôt se déclenchent les procès en sorcellerie pour la faire taire. Et en pittoresque, l’une de ses déclinaisons s’écrit à travers les formules qu’affectionnent les minables gribouilleurs du parti de macky sall qui, pour le défendre, utilisent les mêmes éléments de langage, du genre: la bave du crapaud n’a jamais atteint la colombe blanche ou il faut savoir raison garder.
Puis c’est le tour des adjectifs et adverbes classiques qui renvoient à une vacuité conceptuelle infinie.
Fou, méchant, jaloux, et autres gracieusetés, sont ainsi devenus les seuls arguments dans la boîte à outils intellectuels d’une société baignant dans la médiocrité.
Nul n’est surpris qu’ils aient naturellement fini par fermer l’horizon d’un pays, confronté à sa plus grave crise sanitaire mais aussi économique, et d’un peuple qui a jeté au diable ses valeurs, ses talents, pour ne plus suivre que ses instincts à la compromission, à la légèreté, à cette médiocrité qui lui fait accepter ce que ses ancêtres lui ont enseigné de ne jamais tolérer: se faire écraser. Déshonorer !
En refusant de combattre pour se libérer, en cédant à ses pires défauts, il a accentué sa fragilité face à la pandémie du coronavirus : sa médiocrité en est un facteur amplificateur.
Parce que la médiocrité s’est installée au cœur de notre société, quiconque tente de poser des débats et prend des positions intellectuelles ou physiques pour s’en sortir est la cible des profiteurs de ce cancer qui mine notre pays et notre société. Ce qui est dommage, c’est que les vrais talents, ceux qui savent et peuvent, se laissent embarquer dans cette aventure vers la déchéance en livrant le pays aux pires de ses membres.
Silence, on doit se soumettre…
Adama Gaye, Le Caire 6 Mai 2020
Ps:
-Je précise que j’écris à partir de mon téléphone portable et je n’ai pas toujours le temps de me relire. Excusez moi aussi de savoir que le fond importe plus que la forme dans ce que j’écris. Nous ne sommes pas à l’académie française;
-Parce que la crasse médiocrité fait que l’état du Sénégal est capable de s’immiscer dans mes projets personnels, activités professionnelles, je ne les évoque pas ici.
-De grace, ceux qui le font, sont invités à cesser de reprendre la vulgate d’un pouvoir acculé et dont le seul argumentaire est de traiter de fou ou méchant ceux, comme moi, son principal pourfendeur. Tout le monde sait que j’ai tourné le dos aux facilités qui pouvaient se dérouler sous mes pieds en un claquement de doigts.
La médiocrité, en plus des crimes tangibles qu’il a commis, est l’arme par laquelle, le régime de Macky Sall tue le talent du peuple sénégalais. Révoltons nous: il faut extirper ce syndrome de la médiocrité pour rebâtir le Sénégal.