La pauvreté et l’ignorance allaient souvent de pair avec le mal-vivre et les épidémies. C’est généralement dans les pays à faibles revenus que le risque était plus grand de nombre de victimes.
S’agissant du Coronavirus, les prévisions du Directeur général de l’Organisation de la Santé (OMS) et du Secrétaire général de l’Organisation des Nations-Unies (ONU), il y a de cela quelques jours de ‘’millions de morts’’ en Afrique étaient symptomatiques d’une forme de mentalité en vogue qui voulait que les dégâts se fassent le plus chez les pauvres.
Bien sûr, la logique voudrait que ceux qui mangent moins bien, ont un système de santé moins performant, sont stressés à loisir et vivent dans des conditions de salubrité discutables, etc. soient le plus prompts à tomber malades. A ce propos, leur pessimisme s’explique largement.
Toutefois, le Covid-19 fonctionne avec des paramètres nouveaux dont certains ne sont pas jusqu’ici maitrisés. Il frappe plus les pays riches que ceux qui sont pauvres. Et dans ces pays, il s’attaque également aux riches comme les hautes personnalités.
Par exemple, sur les plus de 130 mille morts dans le monde, l’Afrique en compte moins de mille selon le dernier bilan de ce vendredi du Centre africain de contrôle et de prévention des maladies (CDC Afrique). L’hécatombe tant redoutée n’est pas encore survenue. Et nous espérons qu’il en soit ainsi jusqu’à la fin de l’épidémie.
Pourtant, les pays africains ne sont en rien mieux préparés, mieux organisés. Bien au contraire. C’est que le virus est venu instaurer un nouvel ordre mondial. Il est en train de démocratiser l’insécurité sanitaire et partant, économique.
Faut-il le rappeler, une récession rare guette le monde. Car, avec l’arrêt du travail et des activités économiques fondamentales partout, l’économie mondiale va entrer dans une phase critique qui va remettre en cause toutes les prévisions.
Les pays riches et les hommes riches dans les pays pauvres sont en train de vivre les mêmes angoisses que ceux qui sont démunis. En ayant longtemps accaparé les instruments de richesse grâce à un jeu économique dont ils maitrisent les règles, les pays industrialisés ont fait preuve d’un égoïsme dans leurs rapports avec les autres qui a creusé le fossé et crée une race de personnes marginalisées y compris dans leurs propres pays.
Le système capitaliste triomphant avait relégué l’homme au second plan privilégiant les taux de croissance, les agrégats économiques, les bourses financières, etc.
Dans de nombreux pays, la santé, l’éducation et l’environnement ne mobilisaient que les altermondialistes qui, avec les armes du bord, étaient les seuls à alerter par rapport à la maladresse des politiques en cours.
Et dans ce sillage, les idéologies avaient cessé d’être opérationnelles. Dans la plupart des pays, socialistes, libéraux et autres avaient pratiquement les mêmes réflexes d’idéalisation du gain financier au détriment de tout le reste. L’éducation et la formation professionnelle ont suivi la cadence. Les filières financières, bancaires, comptables et autres de ce genre ont été magnifiées.
Le monde avait trouvé son nouveau dieu : L’argent. Et dans tous les pays, on mesurait la réussite par l’importance du taux de croissance. Qu’importe si les gens meurent de faim. Qu’importe si l’on ne se soigne pas et si l’environnement est malsain et que la nature est agressée.
Le monde était devenu fou. Et ceux qui alertaient étaient réprimés, humiliés, écartés.
Aujourd’hui, plus qu’une pandémie, le Covid-19 est une calamité. Il nous rappelle notre incapacité à faire face à un problème de santé car ceux qui avaient les instruments techniques et les moyens financiers avaient d’autres priorités.
Donc, si aujourd’hui, la pandémie a un tel écho, c’est qu’il a touché les intouchables. Mais en réalité, le paludisme, le Sida et autres tuent plus en Afrique.
Alors, l’espoir que l’on peut nourrir, c’est qu’au sortir de cette tragédie sanitaire, nous en tirons toutes les leçons en revisitant nos priorités.
Il n’est pas difficile de se dire que si nous mettons en place des Etats, des systèmes, c’est pour que l’homme vive mieux sur terre. Préférer des gains comptables à l’homme a été notre pire erreur.
Le faisant, l’humanité ne se s’est pas rendu compte qu’elle n’a fait que retourner à l’état sauvage avec la primauté de l’instinct de survie et comme viatique, la loi de la jungle c’est-à-dire du plus fort ou du plus rusé.
Assane Samb