Lors de son adresse à la nation du lundi 23 mars dernier, le Président Macky Sall a voulu envoyer à ses compatriotes un message clair. Le Sénégal est en guerre sanitaire et il n’y a plus de temps à perdre. Une semaine après, force est de reconnaître que les actes que pose le chef de l’Etat n’ont rien à voir avec ce qu’on doit attendre d’un chef de guerre.
«Ce soir, mes chers compatriotes, et je vous le dis avec solennité, l’heure est grave.» Cette phrase prononcée par le président de la République lors de son adresse à la nation du lundi 23 mars dernier résonne encore dans les oreilles de nombreux Sénégalais. Ces derniers mesurent ainsi la gravité de la menace. Macky Sall ajoutait même à propos de la gravité de la situation : «La vitesse de progression de la maladie nous impose de relever le niveau de la riposte. A défaut, nous courons un sérieux risque de calamité publique.» Décrétant l’état d’urgence assorti d’un couvre- feu tous les jours de 20 heures à 6 heures du matin, le numéro sénégalais ordonne les forces de défense et de sécurité «de se tenir prêt en vue de l’exécution immédiate et stricte des mesures édictées sur l’étendue du territoire national». Autrement dit, il n’y a plus de temps à perdre. Et comme pour convaincre tout le monde de sa détermination à mener la guerre contre «cet ennemi invisible» qu’il qualifie d’«infiniment petit» qui «fait trembler le monde entier, de façon brutale, rapide et massive», Macky Sall entame des consultations avec les différentes institutions de la République, mais aussi avec les principaux leaders de l’opposition parlementaire. Des actes que salue l’opinion publique.
Cependant, depuis quelques jours, la guerre semble faire place au folklore. Un ballet incessant de personnalités et d’organisations est noté au palais de la République. Une semaine que le président de la République renvoie à ses compatriotes l’image d’un chef de guerre qui n’a rien d’autre à faire que de recevoir des personnalités. Une véritable perte de temps, juge une certaine opinion. En fait, Macky Sall brouille, lui-même, son propre message du 23 mars 2020. Résultat, il est en train de perdre l’adhésion d’une partie de l’opinion. Nombreux sont ses compatriotes qui
s’interrogent sur l’opportunité d’audiences comme celles accordées au mouvement «Y’en a marre», aux rappeurs ou encore aux communicateurs traditionnels avec, dans leurs rangs, un certain… Abdoulaye Mbaye Pekh. Celui-là même qui a publiquement nié l’existence du coronavirus à Touba. Ce qui lui a valu une convocation par la section de recherche de la gendarmerie. Qu’apporteront ces audiences dans la guerre contre «l’infiniment petit» qu’est le Covid-19 ? Difficile à dire pour le moment. Toujours est-il que les actes posés, ces derniers jours, par le chef de l’Etat contribuent à brouiller le message. Résultat : de plus en plus de Sénégalais s’interrogent sur les véritables motivations du chef de guerre qui leur disait, le 23 mars dernier, qu’il n’y avait plus de temps à perdre.