Du rôle des intellectuels dans la cité républicaine. Quel rôle devrait jouer un intellectuel dans la cité ? Telle est la grande question que les sociétés, les peuples, se sont toujours posés.
S’il est permis de répondre à la première question à une clarification conceptuelle, qu’est-ce que l’intellectuel, en répondant qu’il est celui qui se lie aux masses, celui-là qui se pose continuellement de questions dont il n’a toujours pas les réponses, c’est celui-là qui s’émeut beaucoup plus dans le champ de son incompétence que dans le champ de sa compétence.
Il est alors permis de dire que l’intellectuel n’est pas seulement l’être, c’est-à-dire l’individu bardé de diplômes, mais bien celui-là doué de raison, de connaissances utiles à son peuple, à l’humanité. Aussi doit-il être actif au plan cérébral d’abord, mais aussi et surtout dans le champ de l’action pratique.
L’intellectuel doit ainsi, en d’autres termes, prendre la parole, provoquer, parler, écrire, faire voir moins pour une certaine gloriole, mais pour revendiquer à juste titre, et dans les limites de la décence, les premières et honorables places des masses laborieuses, sa principale cible. L’intellectuel doit éviter de tomber dans le piège sordide des malsains, d’une saisine manichéenne maudite, et entre ceux qui incarnent l’autorité et ceux que leur sont opposés.
En évitant la puissance du faux, c’est-à-dire l’idéologie revêtue du manteau de la science, il peut et doit prendre position. A ce propos, il doit lui, l’intellectuel, se distancier de la politique de la cabale contre tous ceux qui ont une lecture différentielle de la sienne. Eviter de faire des procès d’intention au détour de chaque expression.
Sous ce rapport, l’intellectuel ne doit nullement s’abaisser, au niveau des masses incultes, mais bien chercher constamment, nous disons bien chercher constamment à élever le niveau intellectuel et culturel de celles-ci sur le plan du bien-faire, sur le plan de l’activité créatrice, sur le plan de l’humiliation.
Enfin, parmi d’autres missions non moins nobles, l’intellectuel doit investir chez nous, son terroir, c’est-à-dire son environnement, sa communauté, et surtout son passé. Il s’apercevra alors de l’unanimité de beaucoup de nos préjugés. Et alors seulement, le démon sera exorcisé et ne viendra plus hanter nos rêves de grandeur, d’unité et de progrès social, économique et démocratique.